Le polar a nourri les différents arts, mais il s'est aussi nourri de ses formes d'expression et d'inspiration. La dernière session de la rencontre euromaghrébine des écrivains, initiée par l'Union européenne, s'est poursuivi samedi à la salle El Djazaïr de la Safex des Pins maritimes, avec comme thème abordé le polar dans l'art. Pour ce faire, cinq intervenants algériens et étrangers ont suggéré leur appréciation sur la migration du polar entre la littérature et les autres genres. L'écrivain français Cary Férey, spécialisé dans le roman policier, a évoqué l'adaptation cinématographique de son roman Zulu sorti en 2013. Il estime que le film est fidèle à son roman, d'autant plus qu'il s'est attaqué à un répertoire assez pointu. Zulu plonge dans une Afrique du Sud pauvre, minée par la drogue, la violence et la prostitution. L'écrivain algérien Arezki Metref pense que la migration du polar du texte vers l'image s'est faite de tout temps. Les premiers films d'Hollywood étaient des adaptations de romans. Le cinéma s'est créé cette spécificité d'avoir ses propres écrivains sans ses scénaristes. Le roman a donné au cinéma, mais il a aussi pris du cinéma. Pour Arezki Metref, le polar ne s'est pas développé en Algérie en raison de l'absence de liberté de création qui n'a pas favorisé l'émergence du polar. «Je pense que la littérature policière algérienne est à construire avec les conditions d'aujourd'hui», précise-t-il. Le scénariste et écrivain roumain Igor Bergler a vu, lui aussi, l'adaptation de son livre au cinéma. A la suite de cette expérience, il estime que le polar a été écrit pour être adapté au cinéma. L'adaptation d'un livre au cinéma permet d'avoir plus de lectorat. «Une véritable connexion existe entre le polar et le roman. La littérature a une meilleure visibilité à travers le cinéma», lance-t-il. Le comédien principal du film historique Benboulaid, Hassen Kachach, avoue que le défi de chaque film est de capter l'attention du public. L'orateur a rappelé que l'Algérie possède son commissaire, et ce, à travers son téléfilm Le commissaire Llob revient de Yasmina Khadra, adapté au cinéma par Alexandre Arcady. Justement, selon lui, le polar donne cette possibilité dans sa structure de l'intrigue et le suspense. Le polar et le cinéma sont construits sur une même structure. L'écrivain algérien Hocine Mezali est convaincu que le polar et le cinéma ont des rapports déterminants. Il préconise un retour aux œuvres d'Agatha Christie sur les chaînes de télévision. «Le polar, confie-t-il, m'a accompagné dès l'âge de six ans, et ce, jusqu'à l'indépendance. Après cette période, le polar n'était plus prisé en raison de la rupture brutale de la génération de l'époque avec celle qui lui a succédé. Le polar est une culture aboutie, mais aujourd'hui les classiques des polars ne sont plus disponibles sur le marché national. La télévision s'est emparée du polar». Hocine Mezali est convaincu que le polar en Algérie a été représenté à travers «l'inspecteur Tahar». De son côté, l'écrivain et poète algérien Abderrezak Boukebba a souligné que le genre policier pourrait être plus présent dans la littérature algérienne, mais à condition qu'il puisse évoluer dans un monde de liberté de pensée. Si le polar à l'étranger peut s'épanouir dans le cinéma, il n'en demeure pas moins que dans le théâtre il ne peut pas se développer en raison du manque de moyens techniques. Le théâtre est le lieu, par excellence, de l'intériorité et du dialogue