Le 70e anniversaire de la fondation des Nations unies est l' occasion d'affirmer la volonté d'en finir avec l'embargo économique imposé par Washington depuis 1962. Près d'une année depuis le dégel historique, le processus de normalisation des relations entre Cuba et les Etats-Unis a franchi une étape importante avec le rétablissement des relations diplomatiques. Les déclarations des deux chefs d'Etat, Barack Obama et Raul Castro, le 17 décembre 2014, suivies de l'ouverture des ambassades ont constitué un acte fondateur à forte charge symbolique. D'autres «gestes» ont été également accomplis montrant que les deux pires ennemis du continent américain sont disposés à tourner la page d'une guerre froide qui dure depuis le triomphe de la révolution communiste à La Havane. Le 70e anniversaire de la fondation des Nations unies était une occasion pour affirmer cette volonté d'en finir avec l'embargo économique imposé par Washington à l'île de la révolution verte depuis 1962. Lors de son intervention Barack Obama avait clairement exprimé sa ferme volonté d'en finir avec une politique (blocus) que «pendant 50 ans, les Etats-Unis ont menée vis-à-vis de Cuba qui a échoué à améliorer la vie du peuple cubain». Une prise de position qui fait croire que l'administration américaine allait, pour la première fois, voter la levée du blocus, sinon s'abstenir lors de la présentation du projet devant l'Assemblée générale. Pour les Cubains, c'est un test pour jauger la volonté de Washington. A la surprise générale, mardi dernier, le représentant des Etats-Unis a voté contre la résolution – pourtant non contraignante – réclamant la levée des sanctions économiques en vigueur depuis 1962. Il est le seul avec le représentant de l'Etat hébreu à s'opposer alors que 191 pays ont voté à l'unanimité la fin d'un embargo unique dans l'histoire des relations internationales. Un vote à l'opposé de l'esprit de la déclaration d'Obama. Les Cubains ont vivement déploré que les Etat-Unis aient voté contre la résolution et reprochent à Obama une politique faite de «pas timides». En tout état de cause, la position américaine traduit toute la difficulté à obtenir un consensus au sein des acteurs politiques et économiques américains sur la nécessite d'en finir vite avec un embargo qui a, certes, empêché le développement de Cuba, mais qui a lamentablement échoué à renverser le régime castriste. Des ténors du Congrès, dominé par les Républicains, ne cachent pas leur opposition à la politique cubaine du patron de la Maison-Blanche. Obama en tient compte, sinon comment expliquer ses réticences à prendre des mesures pouvant alléger le blocus. Il refuse pour l'instant de faire valoir ses prérogatives exécutives. Le vote américain exprime aussi et surtout que le processus de normalisation des relations entre Washington et La Havane est encore long. De son côté, Cuba redoute que «l'ogre impérialiste» lui impose, dans le cadre des négociations, des changements à l'intérieur de son système politique. Pour le moment, l'île rouge refuse de céder sur la nature du régime socialiste. Elle a fixé les lignes rouges et les questions qui ne seront pas discutées dans le processus de normalisation. «Nous avons décidé d'entamer le processus de rétablissement des relations bilatérales avec les Etats-Unis, sans conditions préalables, sur des bases de réciprocité et d'égalité souveraines, sans amenuisement de notre indépendance et de notre souveraineté. Les Etats-Unis n'ont pas le droit d'exiger des changements dans la politique intérieure de notre pays», prévient la diplomate cubaine. Cela étant, le pays de Fidel Castro a engagé quelques réformes économiques présentées comme «une rénovation du modèle économique pour construire un socialisme prospère et durable». En somme, la reprise des négociations prévue pour le mois en cours à Washington va sans doute lever le voile sur l'état d'esprit des belligérants. Derrière les chaleureuses accolades entre Cubains et Américains, un climat de méfiance domine des pourparlers devant mettre un terme à l'une des survivances tragiques de la guerre froide.