La projection en avant-première nationale du film Madame courage de Merzak Allouache, samedi soir à la salle du Théâtre régional Azzedine Medjoubi, à l'occasion du premier Festival de Annaba du film méditerranéen, a été marquée par une forte présence du public. «Je suis ému, puisque mon film fait son avant-première en Algérie dans cette ville, alors qu'habituellement cela se fait à Alger. Mon film appartient au public, on peut le critiquer, l'aimer ou pas. Ce qui m'intéresse, c'est que le film existe. Il ne faut pas que les films algériens restent dans les boîtes. C'est pour cela que je souhaite que des salles ouvrent à Annaba et ailleurs», a déclaré le cinéaste, souhaitant une réouverture prochaine de la Cinémathèque de Annaba (une salle qui sera rouverte en mars 2016). La conférence de presse organisée après le projection a été également marquée par la présence de beaucoup de journalistes. Interrogé sur son regard critique sur la société algérienne, Merzak Allouache a eu cette réponse : «J'aimerais travailler avec des cinéastes algériens de la jeune génération qui ont un autre regard sur l'Algérie d'aujourd'hui, différent du mien. Parfois, on me reproche de ne pas raconter l'histoire d'une femme ou d'un homme qui a réussi. On me dit pourquoi tu choisis des gens qui ont des problèmes. C'est ma manière de voir les choses. En Algérie, il faut des cinéastes, des films, des salles, un public.» Il s'est dit ravi par les réactions du public de Annaba lors de la projection du film. «Des réactions qu'on ne peut jamais avoir lorsqu'on regarde un film derrière un écran d'ordinateur ou de télévision. Le public sait de quoi on parle, sait ce que veut dire Madame courage, la situation des jeunes», a-t-il dit. Merzak Allouache a confié qu'il ne construit pas de décors, préfère tourner dans des décors naturels (les rues de Mostaganem pour Madame courage. «Je filme en montrant ce qui se présente. J'ai eu la chance de tourner dans un bidonville avec des gens extrêmement gentils qui nous ont aidés. A côté du bidonville, une cité est en construction. Les habitants du bidonville regardent tous les jours ces bâtiments avec l'espoir d'y habiter. Renseignement pris, les gens du bidonville ne seront pas relogés dans cette cité», a-t-il déclaré. Merzak Allouache a confié avoir rencontré Adlane Djemil, qui a interprété le rôle de Omar, lors du tournage du film Les Terrasses «C'est un jeune de quartier qui m'a fait visiter une terrasse. Mon choix pour lui confier le rôle de Omar est venu naturellement. J'ai découvert Mostaganem en tournant Harragas. Une ville connue par son rapport au théâtre et où il y a beaucoup de troupes. Au départ, il y avait deux possibilités, Annaba ou Mostaganem. A l'époque, on m'a dit qu'il était dur de le faire à Annaba avec des jeunes un peu hard. Je suis un cinéaste qui aime tourner dans les villes. Je trouve qu'il devient terrible de tourner à Alger. Et lorsqu'on va vers d'autres villes, on découvre qu'un autre monde existe et une autre manière d'accueillir un film. En tournant Le Repenti dans les Hauts-Plateaux, j'ai découvert d'autres Algériens moins agressifs et moins méchants. Le pays est tellement vaste. Il y a des choses à faire dans toutes les régions», a-t-il dit. Interrogé sur les prêches et le Adhan dans le film, Merzak Allouache a précisé que le terme Allah ouakbar rythme la vie dans les pays arabes et musulmans. «Le mot fait partie du langage quotidien. Les appels à la prière quotidiens ressemblent à une espèce de musique. Dans le film, je ne pouvais pas aller au-delà de la scène où Omar enlève le foulard à Selma. C'est déjà beaucoup. C'est érotique dans un contexte particulier», a-t-il souligné.