Le régime politique, consacré par le projet de révision constitutionnelle rendu public hier, est plutôt présidentialiste, en ce sens que le pouvoir exécutif domine les autres pouvoirs. Le projet de révision de la Constitution, dévoilé hier par Ahmed Ouyahia, n'a finalement pas «révolutionné» le régime politique, qualifié par les constitutionnalistes de «présidentialiste». Les pouvoirs du Président, jugés trop importants, restent inchangés. Mieux encore, ils ont été légèrement renforcés. Contrairement à ce que les promoteurs de ce projet véhiculaient pendant de longs mois, la séparation des pouvoirs, élément essentiel dans l'instauration de la démocratie, n'a pas été consacrée. Le chef de l'Etat dispose ainsi à la fois du pouvoir exécutif, législatif et judiciaire. Il est le chef de l'Exécutif. Il nomme le Premier ministre et tous les membres du gouvernement. Il peut les dégommer quand il veut. Le Premier ministre n'est que le «coordinateur de l'action du gouvernement». Il n'a pas de programme mais plutôt un «plan d'action», qu'il présentera annuellement au Parlement. Les prérogatives du président de la République restent aussi larges qu'elles le sont dans la Constitution en vigueur. Il nomme aux plus hautes instances de l'Etat, comme aux postes de responsabilités locales, par exemple le secrétaire général d'une assemblée populaire communale. L'article 77 n'a pas été touché. Il stipule qu'outre les pouvoirs que lui confèrent expressément d'autres dispositions de la Constitution, le président de la République jouit des pouvoirs et prérogatives suivants : il est le chef suprême des forces armées de la République et responsable de la Défense nationale ; il arrête et conduit la politique extérieure de la nation ; il préside le Conseil des ministres ; il nomme le Premier ministre après consultation de la majorité parlementaire et met fin à ses fonctions ; il signe les décrets présidentiels, il dispose du droit de grâce, du droit de remise ou de commutation de peine, il peut, sur toute question d'importance nationale, saisir le peuple par voie de référendum, il conclut et ratifie les traités internationaux, il décerne les décorations, distinctions et titres honorifiques d'Etat. Et pas seulement. Il jouit d'autres prérogatives définies dans l'article 78. Ainsi, le président de la République nomme aux emplois et mandats prévus par la Constitution, aux emplois civils et militaires de l'Etat et aux désignations arrêtées en Conseil des ministres. Il nomme le Premier président de la Cour suprême, le président du Conseil d'Etat, le secrétaire général du gouvernement, le gouverneur de la Banque d'Algérie, les magistrats, les responsables des organes de sécurité et les walis. Dans l'article 79, il est indiqué que le président de la République nomme les membres du gouvernement après consultation du Premier ministre. Le Premier ministre coordonne l'action du gouvernement. Le gouvernement élabore son plan d'action et le présente en Conseil des ministres. Il nomme aussi et rappelle les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires de la République à l'étranger. Il reçoit les lettres de créance et de rappel des représentants diplomatiques étrangers. Ses pouvoirs peuvent être élargis à travers une loi organique dans laquelle il sera déterminé les autres fonctions judiciaires auxquelles nomme le président de la République. Autrement dit, le chef de l'Etat jouit de tous les pouvoirs. Le projet de révision constitutionnelle ne prévoit aucun contre-pouvoir. L'action du Parlement reste limitée. Et le président de la République va continuer à légiférer par ordonnance entre deux sessions parlementaires comme il le faisait conformément à la Constitution en vigueur. Il a le pouvoir de dissoudre l'APN. Selon l'article 129, «le président de l'Assemblée populaire nationale, le président du Conseil de la nation, le président du Conseil constitutionnel et le Premier ministre consultés, le président de la République peut décider de la dissolution de l'Assemblée populaire nationale ou d'élections législatives anticipées». En plus clair, le chef de l'Etat peut dissoudre l'APN en se limitant aux seuls avis consultatifs de présidents d'institution qu'il a lui-même choisis et nommés, à savoir celui du Conseil constitutionnel et celui du Conseil de la nation. Ainsi, dans ce projet de révision constitutionnelle, il y a l'hégémonie d'un pouvoir sur l'autre. Le pouvoir du Président domine le reste. Ainsi, le régime consacré par ce projet est plutôt présidentialiste. Car le pouvoir exécutif domine les autres pouvoirs.