Chassez le naturel avec une fourche, il reviendra toujours en courant». Cette locution proverbiale empruntée à Horace colle on ne peut mieux à notre quotidien. En clair, plus les autorités font part de leur détermination à débarrasser le plancher du négoce informel en mettant en avant la création de marchés de proximité, plus celui-ci a tendance à proliférer. Une fois chassé par la porte, l'informel trouve l'astuce pour revenir par la fenêtre et, parfois, opère un retour en force, à l'image du long de la rue Ahmed Bouzrina (ex-La Lyre) qui, deux mois après avoir été vidée des vendeurs, a été réinvestie de plus belle. C'est le même décor qui s'empare du parcours dit Zoudj Ayoun où il faut jouer des coudes pour se frayer un chemin. C'est dire que, entre le chômage qui gagne chaque jour que Dieu fait les jeunes, il n'est pas aisé à la force publique d'éradiquer ce qui est supposé apporter quelques subsides aux «sans-emploi». Que de fois n'avons-nous eu vent d'échauffourées éclatant entre revendeurs et riverains à cause d'un éventaire barricadant un passage piétons ? Que de fois n'a-t-on entendu des riverains s'élever contre le diktat de ces petits nababs, sans compter les propriétaires des magasins alentour qui manifestent leur grogne, eux qui s'acquittent de leurs charges fiscales ? Au statut de vendeurs à la sauvette qui font partie d'un autre temps, on a substitué celui des squatters en permanence... Et gare à iriter les frelons ! Le négoce informel, certes, vole au secours de maisonnées, mais à quoi servent les centaines de marchés de proximité et le programme des «100 locaux pour chaque commune» que les autorités ont réalisés à coups de milliards de centimes ? Visiblement, quelque part, on semble affectionner la «fawdha» dans le dédale d'une cité qui se rurbanise, au détriment de la régulation et de la bonne organisation dans des sites censés être aménagés à cet effet. Une situation qui, il va sans dire, renseigne sur des réflexes que certains «sans-gêne» affectionnent, notamment ces deux dernières décennies. N'est-ce pas que, dans l'imaginaire collectif de ces petits revendeurs et autres gardiens de «parkings sauvages» qui bombent le torse et brandissent la batte, l'espace public est assimilé au «beylik» ? Quitte à semer le brouillamini devant le laxisme patent ou l'absence de rigueur dont fait montre la force publique. Autrement dit, une manière de ménager le chou et la chèvre.