Après avoir démantelé les marchés anarchiques de Bachdjarrah, Ferhat Boussad et le marché «Tnach» et après avoir rasé les commerces du Val d'Hydra, les pouvoirs publics viennent de débarrasser la commune d'El Harrach du négoce parallèle qu'est le marché de Boumaâti. Soit. Une opération qui vient soulager les riverains de ce capharnaüm longeant les artères, au grand bonheur aussi des commerçants qui s'acquittent de leurs contributions au profit du Trésor public. Ce négoce de la rue n'a de cesse de défigurer le tissu urbain sous l'œil erratique des autorités qui ont pris, pourtant, l'engagement, cela fait trois ans, de l'éradiquer. Bien que l'Etat ait annoncé, il y a quelques années, la mobilisation de plus de 100 milliards de centimes pour la création de marchés couverts à travers les communes d'Alger, l'informel semble avoir encore de beaux jours devant lui. Il faut avoir des œillères pour ne pas remarquer toute l'agitation fébrile de ce qu'on appelle par fausse pudibonderie commerce informel, qui réduit chaque jour que Dieu fait les espaces piétons, non sans déborder sur la chaussée. Il faut être borgne pour ne pas constater que le marché de la rue prospère au fil des jours en alimentant la gibecière d'opérateurs occultes... Dès qu'on libère une rue, de nouveaux squatters ne tardent pas à la reconquérir. Plus on ressasse la question, plus le phénomène prend de l'ampleur devant des édiles qui mettent en avant de manière récurrente leur impuissance. En d'autres termes, cela signifie aussi, selon eux, «mieux vaut permettre à cette catégorie de sans-emploi de squatter la voie publique que de la laisser s'adonner à des larcins». Dans ce sillage, il y a ce traitement à deux vitesses de la part de la puissance publique vis-à-vis de ces animateurs du commerce de la rue. Si des décisions sont prises par décret ministériel interposé, pour supprimer définitivement les endroits commerçants informels sus-cités, pourquoi s'échine-t-on à fermer l'œil sur d'autres revendeurs squatteurs qui prennent en otage l'espace public. A l'image de la rue Ahmed Bouzrina (ex-La Lyre) – qui, sitôt libérée, sitôt réinvestie –, la rue Amar El Kama (ex-Chartres), le long du parcours dit «Zoudj Ayoûn» et surtout les indétrônables fripiers de la rue Amar Ali (ex-Randon) – fief par excellence des produits pyrotechniques – et autres dresseurs d'étals-camelot qui investissent les abords du marché dit les «Trois horloges» non sans causer moult désagréments au voisinage, selon le code de voyouterie. Une manière qui nous invite somme toute à emprunter cette citation de Jean Dutourd : «Tout usage finit par se changer en abus». Finalement, le riverain et l'usager de passage ont fini à composer avec ces petits nababs, en les priant tout juste de céder le passage... devant le regard laxiste, voire l'œil bienveillant de la puissance publique.