Ouagadougou, seule capitale du Sahel à avoir échappé jusque-là aux attentats terroristes, a été la cible vendredi soir d'une attaque d'une grande ampleur au cours de laquelle 26 personnes de 18 nationalités ont été tuées et une centaine d'autres blessées. Des sources françaises parlent, quant elles, de 27 morts, dont deux Français. Dans un communiqué rendu public hier, le ministère algérien des Affaires étrangères a signalé pour sa part «qu'aucun ressortissant algérien ne figure pour le moment parmi les victimes». Des sources indépendantes ont toutefois fait état de victimes algériennes. Au moment où nous mettons sous presse, nous n'avons pas pu savoir s'il s'agissait de morts ou de blessés. Devant l'étendue du drame, le gouvernement burkinabé a décrété un deuil national de 72 heures en hommage aux victimes. L'incursion terroriste, menée vers 19h30 par un commando constitué tout au plus de cinq éléments et revendiquée par Al Mourabitoune du sinistre Mokhtar Belmokhtar, a visé l'hôtel Splendide et un café-restaurant, Le Cappuccino. Se faisant pratiquement face, les deux établissements sont situés sur la très fréquentée avenue Nkrumah. Ils accueillent souvent une clientèle étrangère et aisée. Les assaillants, selon des témoignages de confrères burkinabés qui se trouvaient sur place au moment de l'attaque, ont ouvert le feu sans discernement sur la façade vitrée du Cappuccino et mis le feu à des véhicules avant de se retrancher dans l'hôtel Splendide qui affiche généralement plein en cette saison. Il aura fallu toute la nuit aux éléments des forces d'intervention burkinabés, appuyés par des militaires français, pour neutraliser le commando terroriste et libérer les otages. Ce n'est qu'hier vers 10h que l'armée burkinabé a annoncé la fin de l'assaut. 4 terroristes, dont deux femmes, ont été abattus au cours de l'opération. L'avenue Nkrumah, habituellement grouillante de monde, offrait hier matin un spectacle de désolation. Des carcasses de voitures auxquelles les terroristes avaient mis le feu lors de leur attaque sanglante continuaient à se consumer et les façades de plusieurs magasins portaient de nombreux impacts de balles. Peu habitués à vivre de telles scènes de terreur et de guerre, les Ouagalais étaient groggys et traumatisés. Il y a de quoi. Le raid des éléments du groupe de Mokhtar Belmokhtar s'est produit quelques heures seulement après une attaque dans le nord du pays, près de la frontière malienne, au cours de laquelle un gendarme et un civil ont été tués. Presque en même temps a eu lieu aussi l'enlèvement de deux ressortissants australiens à Baraboulé, dans le nord du Burkina Faso. Aucune information n'a filtrée sur un possible lien avec l'attentat terroriste perpétré vendredi soir à Ouagadougou. Il faut dire que la région a connu plusieurs attaques de ce type ces derniers mois. En avril dernier, le chef de sécurité roumain de la mine de manganèse de Tambao, dans le nord du pays, avait été enlevé par des assaillants. Le rapt avait été revendiqué aussi par Al Mourabitoune. La décision d'Al Qaîda en Afrique de l'Ouest (c'est l'appellation que s'est donné en août dernier le groupe terroriste dirigé par Mokhtar Belmokhtar) de frapper au cœur de Ouagadougou peut être interprétée d'abord comme un défi lancé au gouvernement français, dont l'armée dispose d'une base de troupes spéciales dans la banlieue même de la capitale Burkinabé et est, par ailleurs, engagée depuis janvier 2013 dans la lutte contre le terrorisme au Sahel avec d'importants moyens humains et matériels. Dans le pays, les Etats-Unis ont également sous la main un petit contingent de militaires. L'attaque terroriste est aussi une sorte de pied de nez à tous les pays de la région impliqués dans la traque des éléments d'AQMI et de Boko Haram. Pourquoi maintenant et pourquoi spécialement Ouagadougou ? Il faudrait peut-être lier l'attaque de vendredi soir au départ de Blaise Compaoré qui, selon certains spécialistes du terrorisme au Sahel, entretenait des rapports «ambigus» avec la nébuleuse terroriste de la région. L'un de ses anciens protégés, Mustapha Chaffi, avait d'ailleurs participé à la libération de plusieurs otages occidentaux. C'est probablement ce rôle de «médiateur» qui a permis à l'ancien chef de l'Etat burkinabé de faire en sorte que le Burkina ne soit pas dans le viseur d'AQMI ou du Mujao durant toutes ces années. Le général Diendéré, qui est actuellement en prison, connaît assurément très bien le dossier. Maintenant que le président Blaise n'est plus là, les règles du jeu ont forcément changé.
L'Algérie condamne avec «la plus grande vigueur» L'Algérie condamne avec la «plus grande vigueur» les attaques terroristes perpétrées vendredi et hier dans la capitale burkinabé, Ouagadougou, a indiqué hier le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. «L'Algérie condamne avec la plus grande vigueur les attaques terroristes qui ont ciblé vendredi et hier certains lieux dans la capitale burkinabé, Ouagadougou, et exprime sa solidarité avec les familles des victimes, le gouvernement et le peuple burkinabés», a précisé la même source. L'Algérie réitère «sa conviction que le terrorisme représente une menace globale et réelle pour la paix et la sécurité internationales et que seules une mobilisation collective de la communauté internationale et une fédération de l'ensemble de ses efforts sont à même de lui faire face», a ajouté le communiqué.