S'achemine-t-on vers une guerre des tranchées entre les deux principales formations politiques au pouvoir ? Les deux frères ennemis, le FLN et le RND, s'adonnent depuis quelque temps à un échange de tirs à distance. Amar Saadani ne cache pas sa «haine» contre son partenaire politique, Ahmed Ouyahia, secrétaire général par intérim du RND, qu'il «soupçonne» d'avoir des ambitions présidentielles et qui lui fait de surcroît de l'ombre. Ainsi, le parton du FLN ne rate aucune occasion pour décocher des piques, voire des critiques, quant à l'attitude d'Ouyahia qui est également chef de cabinet de la Présidence. Saadani martèle à chacune de ses sorties que le prochain candidat du FLN à l'élection présidentielle de 2019 sera issu exclusivement des rangs du parti, ce qui sous-entend que si Ouyahia se présente à cette élection, il n'aura ni l'appui ni le soutien du FLN dirigé par Saadani. «Ni Ouyahia ni quelqu'un d'autre ne marchera sur le dos du FLN pour arriver au palais d'El Mouradia», a déclaré Saadani. Réponse aussi cinglante concernant la proposition du RND pour la reconstitution de l'alliance présidentielle pour Saadani, le FLN dispose de la majorité absolue dans l'Exécutif et ne peut, à cet effet, accepter de former une alliance, dont l'objectif est la participation au gouvernement. L'homme du consensus est révolu pour le patron le plus contesté du FLN qui envisagerait de s'engager seul dans la course à la présidentielle. La bataille des sénatoriales remportées par le RND, qui demeure la première force au Conseil de la nation, n'est pas fait pour arranger les choses. Saadani estime qu'il a la majorité en dépit des résultats officiels rendus par le Conseil constitutionnel qui démontre que le RND, avec un siège au moins, conserve sa majorité au sein de la Chambre haute du Parlement. Pour sa part, Ouyahia n'a, jusqu'à ce jour, jamais répondu ouvertement aux attaques de Saadani ni affiché son adversité à son égard. Usant d'une certaine diplomatie, le premier responsable du RND, révèlent nos sources, ne veut pas se donner en spectacle. «Ouyahia répondra au moment opportun», c'est-à-dire une fois le projet de révision de la Constitution approuvé et mis en œuvre. Actuellement, Ouyahia veut concrétiser le rêve du président Bouteflika : faire passer le projet de Constitution «sans bruit». Seddik Chihab , porte-parole du parti et proche d'Ouyahia, confirme à demi-mot cette vérité. Chihab refuse de commenter les propos et les multiples déclarations, instruction donnée apparemment par Ouyahia. «Nous n'avons aucun commentaire à faire au sujet des attaques de Saadani. Le FLN est un allié stratégique pour nous et au RND, nous avons des priorités et nous agissons en fonction de nos engagements. Aujourd'hui, notre priorité est de faire campagne pour expliquer le contenu de la nouvelle Constitution et pour que les Algériens comprennent le bien-fondé des nouveaux articles», affirme Chihab qui a tout de même tenu à recadrer Saadani qui a reproché à Ouyahia de s'être conduit comme le chef du RND plutôt que comme le chef de cabinet de la présidence de la République, lors de la présentation de l'avant-projet de révision de la Constitution. «Ahmed Ouyahia est imprégné de la culture de l'Etat et de ce fait, il sait très bien faire la différence entre les deux fonctions», lâche Seddik Chihab.