L'auditorium du palais de la Culture Moufdi Zakaria de Kouba a accueilli, jeudi soir, l'avant-première nationale de la création chorégraphique El Hijra, signée par Faïza Maâmeri. Pour cette avant-première nationale, une foule nombreuse - constituée notamment de parents et d'enfants - est venue découvrir cette toute nouvelle création de la chorégraphe Faïza Maâmeri, une dame qui s'est toujours investie dans l'univers artistique, mais depuis la création de sa propre école «Profil» en 2005 - devenue aujourd'hui une académie -, le défi de réussir était l'évidence-même. Diplômée de la société des Beaux-Arts d'Alger en 1979, l'artiste a toujours planché sur la recherche et l'histoire du patrimoine. En témoignent les nombreux spectacles qu'elle a présentés entre autres lors de ses participations au Festival international de danse contemporaine d'Alger, ou encore au Festival de l'habit traditionnel. C'est parce que la tragédie des migrants est d'une actualité brûlante de nos jours que la directrice de l'académie «Profil», Faïza Maâmeri, a voulu monter un spectacle chorégraphique autour de cette thématique. Mais avant de dévoiler le spectacle en question, les nombreux convives ont eu un petit aperçu du performant travail qui se fait au quotidien au niveau de l'académie «Profil» à El Biar. Ainsi, les plus jeunes élèves de l'académie - vêtues de tutus et de ballerines - ont présenté un extrait du célèbre Lac des signes de Piotr Ilitch Tchaïkovski. En seconde partie, c'était au tour des plus grands de l'académie de dévoiler un extrait du spectacle chorégraphique intitulé Volonté de Faïza Maameri. Place ensuite à la présentation tant attendue du spectacle chorégraphique El Hijra, d'une durée de 25 minutes. L'ossature de ce spectacle est bâtie sur quatre tableaux distincts de l'histoire des migrants, à savoir la décision de partir, la traversée, l'arrivée et la frontière. Alors qu'une musique des plus douces chatouille les oreilles, une fille investit la scène, vêtue toute de noir. Elle accapare son espace avec une facilité des plus déconcertantes en faisant des va-et-vient continuels. Un jeune homme déterminé à mener à bien sa quête de départ la rejoint. A travers des gestes convaincants, elle tente de retenir son bien-aimé. Mais rien à faire, l'homme est convaincu que le départ vers l'inconnu est irrévocable pour sa petite famille. A droite de la scène, leur fille les regarde sans rien comprendre de la situation. L'enchaînement du deuxième tableau La traversée se fait simultanément par l'entrée sur scène d'autres danseurs et la projection sur un écran géant de séquences montrant le cheminement de ces milliers de migrants, toutes nationalités confondues. Le jeu de lumière - servi par intermittence - a donné plus d'intrigue au spectacle. La traversée de la terre mère se devine en filigrane. Le mouvement de l'eau se conjugue à la détresse des migrants. Le couple finit par se mêler au milieu des réfugiés pour prendre la mer. Puis arrive le troisième tableau, «l'arrivée» avec ces corps qui se déchaînent dans un miroitement de mouvements. Les couples, les trios et les quatuors se forment et se déchirent à la fois. Si les corps sont en continuel duel, il n'en demeure pas moins que les visages sont expressifs à l'extrême. Le dernier tableau évoque l'arrivée de la frontière. Les danseurs sont alignés les uns à côté des autres avec en main des soupapes avec des manches à la hauteur de leur taille. Ils tapent de toutes leurs forces sur ces objets du moment, mais en vain. Ils finissent par les poser. La petite fille en profite pour avancer lentement, mais sûrement. Elle réussit à se frayer un chemin en n'omettant pas à chaque fois de faire tomber une soupape, façon singulière de dire que la frontière est installée. Ils n'ont plus le choix. Ces migrants sont sur un autre sol étranger. S'ils s'attaquent au mur sans pour autant défaire les barrières, ils sont convaincus qu'ils sont partout chez eux. Il est à noter que ce spectacle bien construit sur les plans scénographique et chorégraphique par Faïza Maameri est le résultat de six mois de réflexion et de quatre mois de travail intense. Ce projet a été soutenu par le ministère de la Culture. La créatrice de Hijra espère faire partager ce spectacle avec d'autres wilayas du pays à compter du mois de février prochain. Elle aspire également à faire tourner ce dernier cru à l'international.