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«Il faut une meilleure gestion de la transition vers l'économie de la connaissance»
Sid Ahmed Benraouane . Spécialiste en stratégie d'innovation
Publié dans El Watan le 18 - 01 - 2016

Professeur de stratégie d'innovation à l'Université du Minnesota (USA) et Secrétaire général du Conseil d'affaires algérien à Dubai, Sid Ahmed Benraoune explique dans cet entretien le concept de l'Economie fondée sur la connaissance (EFC) et revient sur son développement à travers le monde. Il estime dans ce sillage que le potentiel de la transition vers l'économie de la connaissance existe en Algérie.
Depuis quelques années, on parle en Algérie de la nécessité de passer à l'économie du savoir. Les conditions sont-elles réunies à cet effet ?
Le concept de l'EFC se réfère à ces mutations profondes que le monde a connues depuis les années 1960. Il y a au moins trois évolutions qui ont contribué au développement de ce concept tel qu'on le connaît aujourd'hui. La première évolution est celle des années 1960 avec l'apparition de nouvelles industries fondées essentiellement sur la découverte scientifique et leur impact sur la productivité et la croissance économique telles que l'introduction de super computer.
La deuxième évolution est celle des années1980-1990 qui focalisait sur l'émergence de nouvelle industries basée essentiellement sur l'usage de l'information comme dans le secteur des banques, finances et des TIC, et une troisième évolution qui a pris place à partir des années 2000 où on a vu clairement une dichotomie entre économie classique, conduite par la production industrielle et manufacturière et l'usage d'actifs immobilisés (fixed assets), et de nouvelles économies (new économies) conduites par le services, l'information, connaissances, et l'intangible d'une façon générale.
Si vous prenez le cas des USA par exemple, vous trouverez que la contribution de l'économie américaine au PIB de l'économie globale est de l'ordre de 26 à 28%. Mais si vous disséquez un peu plus ce chiffre, vous trouverez que la contribution de l'économie américaine au PIB global dans certains secteurs, considérés comme secteurs fondés sur la connaissance, tel que la Venture Capital Investment, dépenses en R&D, le cloud hosting et le Broadband, vous trouverez que la contribution de l'économie américaine est de l'ordre de 70%.
On peut dire que la formule fondamentale qui a accéléré cette transition d'une économie classique à une économie fondée sur la connaissance durant les deux dernières décades est la démocratisation de l'outil de production. Nos micro-processeurs sont devenus beaucoup plus puissants, de plus en plus rapides, et de moins en moins chers. Une très bonne partie de ce qu'on appelle la connaissance aujourd'hui est le résultat d'applications intelligentes, de services et de pratique managériale, c'est-à-dire l'intangible, par opposition au hardware et infrastructures industrielles tangibles qui caractérisaient l'économie classique.
On peut arguer qu'en Algérie le potentiel de cette transition existe compte tenu des investissements que l'Etat a consentis dans l'économie, mais encore faut-il qu'il y ait une vision et une stratégie qui permettraient une meilleure gestion de cette transition. En d'autres termes, un leadership visionnaire qui peut articuler nos priorités par rapport à cette transition et expliquer l'urgence de cette transition. En quelque sorte, les règles du jeu de cette transition ont été discutées ; malheureusement pour nous, durant les années 1990, période où nous étions absents pour des raisons que tout le monde connaît, il ne faudrait pas qu'on fasse la même erreur et qu'on s'absente une deuxième fois, alors que les nations sont en train de définir la future économie de la connaissance à l'horizon 2030.
Qu'en est-il de la place de l'Economie fondée sur la connaissance (EFC) en Algérie en comparaison avec ce qui se fait dans le monde ?
Il faut tout d'abord éviter la dichotomie économie fondée sur la connaissance/économie non fondée sur la connaissance. La nature même de la connaissance refuse une telle proposition. Toutes les économies modernes qui ont réussi le test des mutations profondes que le monde a connues à partir de la fin des années 1980 connaissent un peu d'économie classique et un peu d'économie de connaissance.
Aujourd'hui, 80% des actifs de la bourse de New York sont basés sur des actifs intangibles, c'est-à-dire la propriété intellectuelle, les brevets, la marque, l'image, le style de management et le R&D, alors qu'en 1975 ce pourcentage était de 20%.
Si vous prenez des exemples de compagnies qui opèrent dans le secteur de la connaissance, telles que Apple, Google, Microsoft, Facebook et Amazone, ces compagnies opèrent avec moins d'actifs tangibles (fixed assets), alors que leur valeur de marché est plus élevée que celle des entreprises qui opèrent dans le secteur classique, tel que le secteur du pétrole conventionnel.
Apple, qui ne dispose pas d'une infrastructure industrielle aussi coûteuse que celle d'Exxon Mobil, est plus riche qu'Exxon Mobile. Apple, une compagnie fondée sur la connaissance et qui opère dans le secteur de la connaissance, est évaluée à plus de 800 milliards de dollars (presque 1 trillion de dollars), alors qu'Exxon Mobil est à 300 milliards de dollars. Ce qui est important de souligner dans ce sens, c'est que dans les pays industrialisés, l'EFC est devenue une réalité pour le citoyen. Ce n'est plus un débat intellectuel. Le citoyen vit l'EFC dans sa vie quotidienne.
D'abord dans ses relations avec le marché du travail, le citoyen est confronté à ce nouveau prérequis qui fait de la connaissance un critère essentiel d'embauche. Les high-tech jobs, les fonctions managériales, l'économie digitale, le smart gouvernement, les secteurs de Broadband et des télécommunications, par exemple, exigent un certain nombre de compétences basées sur la connaissance et qui n'existent pas dans une économie classique.
Ensuite, et sur le plan relation citoyen-service public, le citoyen dans ses relations avec l'administration (gouvernement, banques, école, hôpital, etc.), est confronté à une nouvelle attente qui fait de la connaissance une condition.
Prenez l'exemple de ce qu'on appelle maintenant le smart gouvernement, c'est-à-dire la mise en place d'une administration en ligne pour gérer les affaires courantes du citoyen.
A Singapour ou à Dubaï, vous pouvez régler tous vos problèmes administratifs en ligne en quelques secondes et sans vous déplacer physiquement vers l'administration. Il y a des applications smartphone qui vous permettent de régler vos factures en ligne, de transférer de l'argent entre comptes bancaires, d'obtenir votre registre de commerce en ligne, d'obtenir votre passeport et carte d'identité en ligne, de dédouaner une marchandise à partir de chez vous, de déclarer un constat d'accident de voiture, et de faire énormément de choses.
Cette transformation dans l'offre du service public n'a pu se faire que grâce à cette notion EFC, car derrière cette nouvelle forme de gestion de service public, il y toute une révolution de management en back office, et qui a touché essentiellement le type de savoirs et de la connaissances qui font tourner l'administration, telle que l'adoption de nouvelles pratiques de management et la mise en place de nouvelles technologies basées sur la connaissance.
L'indice sur l'économie de la connaissance produit par la Banque mondiale classifie les pays sur la base de quatre critères : l'efficience économique, l'éducation, l'innovation et la technologie de l'information et de la communication. Les pays qui ont su gérer cette transition sont les pays de la Scandinavie et les pays de l'Amérique du Nord.
Diversifier l'économie ne passe-t-il pas justement par cette mutation vers l'EFC ? La diversification de l'économie est une condition de cette mutation. Dans la situation dans laquelle l'Algérie se trouve, on ne peut pas diversifier si l'investissement est encore fermé. La diversification requiert trois conditions essentielles : un régime d'investissement ouvert sur tous les secteurs, une administration flexible et impartiale pour que le climat des affaires ne soit pas une entrave à l'acte d'investissement, et un système de financement moderne qui puisse accompagner les entrepreneures et les investisseurs. Or, il y a beaucoup de travail à faire pour améliorer ces trois conditions.
Comment rattraper le retard accusé dans ce cadre ?
Il faut commencer par le commencement. La fondation d'une économie de connaissance est la connaissance. Et l'institution habilitée à créer la connaissance, c'est l'institution de l'éducation d'une manière générale, c'est-à-dire les écoles avec les trois paliers de l'éducation, les universités, les institutions de recherches scientifiques et les centres de formation professionnelle. L'ossature de l'ECF est le savoir. Or, malheureusement, notre système d'éducation, dans sa globalité, a besoin d'être réingénieré pour qu'il puisse produire un capital humain en mesure de créer et gérer une économie de connaissance.
On ne peut imaginer une économie de connaissance alors que nos écoles et nos universités sont encore fermées sur elles-mêmes et dispensent un curriculum scolaire mal adapté au rythme que la mondialisation nous impose. On ne peut réussir la bataille de la transition vers une économie de connaissance alors des concepts tels que l'innovation, la créativité, l'entrepreneuriat, l'induction et la déduction sont totalement absents de nos programmes pédagogiques et nos manuels scolaires.
Bien sûr, je suis conscient que notre système d'éducation, d'une façon générale, souffre des mêmes maux que la société, et donc quelque part il est injuste d'incriminer l'école toute seule. L'école, c'est aussi l'engagement des parents, de l'université, c'est aussi l'engagement de l'entreprise privée.
Les initiatives récentes de réforme du ministère de l'Education et celle de l'Enseignement supérieur sont louables et sont sur le bon chemin, mais il faut avoir de la patience et accorder du temps au temps. Je suis content aussi de noter que l'Algérie occupe maintenant la meilleur place au Maghreb sur le plan développement humain, et content aussi que l'Algérie a gagné quelques points sur l'échelle de développement humain, mais le chemin est encore long. Si on se fixe comme objectif une amélioration de 10 points tous les ans, en 2020 on sera parmi le Top 50.
N'est-il pas nécessaire de faire appel à la diaspora pour concrétiser ce projet ?
L'Algérie dispose déjà de compétences énormes qui travaillent à l'intérieur du pays. Les chercheurs algériens en Algérie et les jeunes entrepreneurs qui sont derrière cette nouvelle dynamique de création d'entreprises en Algérie sont déjà le gisement immédiat qu'il faut exploiter. Bien sûr, la diaspora a un rôle important à jouer compte tenu de sa proximité avec ce qui se fait dans les économies de la connaissance.
Ces compétences algériennes qui vivent à l'étranger sont les passerelles naturelles du transfert de la connaissance, et ce, compte tenu de leur posture biculturelle. D'abord, ils connaissent bien les fondamentaux de la réussite dans une économie de connaissance et sont parfaitement à l'aise avec la culture de la compétitivité dans les sociétés hôtes, mais aussi ces compétences peuvent apporter un plus, car elles sont au courant des besoins, des défis et des difficultés de leur pays d'origine. Il me semble qu'on manque aussi d'un cadre institutionnel qui puisse fédérer les initiatives de la diaspora.
On disposait, il y a quelques années, d'un Secrétariat d'Etat chargé de la communauté nationale à l'étranger, mais son approche, me semble-t-il, était beaucoup plus politique et administrative. On cherchait plutôt l'allégeance politique que la contribution économique ; et on s'occupait des problèmes administratifs tels que le biométrique, plutôt que la mobilisation de la communauté pour contribuer à l'effort national de développement.
Là où vous allez, vous trouverez des Algériens qui ont très bien réussi leur intégration professionnelle dans leur pays hôte ; ils sont disposés à s'impliquer dans la recherche scientifique, l'enseignement, la formation, le développement des capacités du leadership des jeunes cadres en Algérie et veulent avoir une voix dans ce qui se fait dans leur pays. Mais ces compétences, si elles ne trouvent pas de vis-à-vis, un cadre organisationnel en Algérie qui puisse les orienter vers les besoins et les secteurs dont on a besoin, elles ne peuvent pas bien sûr réussir.
La diaspora chinoise ou indienne, ou encore la diaspora roumaine sont des exemples particulièrement criant. Elles ont pu construire des passerelles qui ont servi leurs économies respectives. Dans le cas de l'Inde, je suis même tenté d'arguer que l'émergence de ce pays comme une puissance économique régionale dans le secteur des TIC et du consulting est due essentiellement à sa diaspora, qui, en plus de son background anglo-saxon, a su amener les multinationales américaines du secteur de la technologie à investir en Inde dans le début des années 1990.


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