Depuis juin dernier, le conflit au Proche-Orient est revenu avec beaucoup de fracas sur le devant de la scène internationale, à travers ses volets palestinien, syrien et libanais. C'est-à-dire, tel qu'il est connu depuis 1948 pour le premier, et 1967, en ce qui concerne les deux autres. Le monde semble se complaire par le maintien du statu quo que l'on sait intenable et même dangereux. Le constat n'est pas nouveau à plus forte raison pour d'anciens dirigeants internationaux de premier plan, et qui, pour certains d'entre eux n'avaient pas fait preuve de hardiesse. Mais leur point de vue est intéressant, à plus forte raison, quand il s'agit d'interpeller l'opinion internationale, manipulée, sinon trop souvent mal informée. Plus d'une centaine d'anciens dirigeants mondiaux, ministres des Affaires étrangères, diplomates et chefs religieux, se sont ainsi prononcés, hier, dans une lettre ouverte publiée par le Financial Times pour une résolution rapide du conflit au Proche-Orient. La lettre, dont l'idée a été lancée par le Groupe international de crise et paraphée notamment par l'ancien président américain Jimmy Carter , l'ex-Premier ministre britannique, John Major, et l'ancien Président de l'Union soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, lance un appel à « une action internationale urgente ». Parmi les autres signataires, figurent l'ancien secrétaire général de l'ONU, Boutros Boutros Ghali, le dalaï-lama, l'archevêque sud-africain Desmond Tutu, et huit prix Nobel de la Paix, dont Carter, Gorbatchev et Tutu. « Toutes les parties sont perdantes dans ce conflit, à l'exception des extrémistes à travers le monde qui prospèrent par la rage qu'ils continuent à déchaîner », affirme la missive. « Chaque jour qui passe, plombe un peu plus la perspective d'une solution pacifique et durable », poursuit la lettre signée par 135 personnalités. Pour les signataires de la lettre ouverte, « tant que le conflit durera, il provoquera de l'instabilité et la violence dans la région et en dehors ». « Les buts à atteindre doivent être la sécurité et l'entière reconnaissance de l'Etat d'Israël à l'intérieur des frontières reconnues, la fin de l'occupation pour le peuple palestinien, avec l'octroi d'un Etat souverain, indépendant et viable, et le retour à la Syrie de son territoire perdu », poursuit la lettre. Elle appelle à la réunion, le plus tôt possible, d'« une nouvelle conférence internationale, en présence des acteurs les plus importants du conflit du Proche-Orient, qui permettra de mettre en route des négociations détaillées sur un accord de paix global ». La lettre demande également la fin du boycott financier de l'Autorité palestinienne, l'ouverture de pourparlers entre Israël et les dirigeants palestiniens, ainsi qu'entre Israël, la Syrie et le Liban. C'est la première fois que ce conflit est abordé sous cet angle par nombre de signataires. Et leur appel qui ne manque pas de pertinence, en ce sens qu'il récuse toute forme d'unilatéralisme, met fin au cercle fermé des pourparlers dont le contenu est dicté par Israël. Et puis cette notion de frontières qu'Israël entend définir de manière unilatérale. Rien de tout cela. Mais est-ce que cet appel sera t-il entendu ? Là est toute la question. Sans chercher apparemment à joindre sa voix à ces dernières, un ministre du Kadima, le parti du Premier ministre israélien Ehud Olmert s'est prononcé publiquement hier en faveur de l'initiative de paix saoudienne pour régler le conflit israélo-palestinien. « Il faut prendre le taureau par les cornes et, lorsque je dis cela, j'estime qu'il faut accepter l'initiative des pays (arabes) modérés, l'initiative saoudienne », a déclaré le ministre de l'Habitat, Meir Sheetrit. L'initiative de paix saoudienne, adoptée à l'unanimité en mars 2002 par les pays arabes réunis au sommet à Beyrouth, propose la paix et des relations normales avec Israël en échange d'un retrait des territoires arabes occupés depuis juin 1967, une offre rejetée par Israël. Selon M. Sheetrit, Israël serait prêt à se retirer des territoires arabes occupés depuis 1967 en échange « d'une paix totale ». « Si l'on parle d'une paix totale, si nous voulons une paix totale nous sommes forcés d'accepter tous les éléments de l'initiative et un retrait sur les frontières de 1967 », a-t-il dit. Ce qui tranche avec la décision annoncée en avril dernier, du premier ministre israélien de fixer unilatéralement les frontières d'Israël d'ici 2010. Mais là encore une fois, ce n'est que la position d'un ministre, comme il y en a souvent en Israël, une pratique relevant des sondages ou de l'effet d'annonce. Ou encore de la simple mystification au regard des programmes de colonisation israélienne, et du refus d'Israël de restituer à la Syrie, le plateau du Golan.