La troisième saison des «Lundis de l'environnement» a pris son envol, la semaine dernière, à l'auditorium de la bibliothèque centrale de l'université de Jijel, avec un débat sur des préoccupations liées aux perturbateurs environnementaux comme les pesticides, les antibiotiques rejetés dans la nature, les poussières ou encore le captivant sujet des ondes électromagnétiques. La reprise de cet espace, en présence d'une audience appréciable, a été un nouveau pari réussi pour son initiateur, le docteur Fares Kessasra, enseignant en hydrogéologie à l'université de Jijel. Les risques sanitaires liés à l'exposition aux résidus de pesticides ont été le sujet de la communication donnée par Massika Roula, enseignante en éco-toxicologie, qui a présenté ces substances chimiques destinées à protéger les plantes contre les organismes nuisibles (insecticides, herbicides, fongicides…), mais qui exposent en premier lieu les agriculteurs et les travailleurs de l'industrie chimique, en second lieu les consommateurs, à des risques de contamination. L'oratrice insistera sur la dangerosité de cette multipollution touchant les aliments, l'eau, l'air et le sol. Elle reprendra des chiffres de l'Organisation mondiale de la santé qui estime à plus d'un million le nombre de personnes victimes annuellement d'intoxication par les pesticides et de 220 000 morts par an dans le monde. Des analyses effectuées sur 72 échantillons de légumes (poivron, tomate et chou-fleur) prélevés sur trois sites agricoles de la wilaya de Jijel ont montré que sur 9,72% des échantillons, 6,94% présentaient des taux de pesticides supérieurs aux limites maximales résiduelles pour deux substances sur les sept sur lesquelles a porté l'étude. Ces dépassements résultent du non-respect des bonnes pratiques agricoles (fréquence, dose, délai avant récolte…). Les étudiants en mastère 2, Zineb Khemissa et Nour El Houda Amrane ont initié les présents à l'agriculture biologique. Une notion communément désignée par le terme «bio» pour désigner cette pratique soucieuse du respect des équilibres naturels et excluant l'usage de produits chimiques. Elles céderont ensuite la place au binôme composé de deux autres étudiants en mastère 2, Yamina Ghemit et Karima Boulkamh, qui présenteront une communication sur un thème qui a suscité la curiosité de l'assistance : «Les antibiotiques dans les écosystèmes aquatiques». Les différentes sources de contamination des eaux par les antibiotiques sont les rejets domestiques et hospitaliers, l'élevage et l'aquaculture. La persistance de ces antibiotiques dans la chaîne alimentaire (poissons, coquillages, viandes…) peut favoriser la colonisation du tube digestif humain par des bactéries anti-biorésistantes. Impact des antennes de téléphonie mobile Ecoutée religieusement, la communication du professeur Bachir Nekhoul, spécialiste en génie électrique, a abordé un autre registre des polluants environnementaux, à savoir les ondes électromagnétiques (OEM) qui agissent aussi bien sur les équipements électroniques que sur la faune et la flore. Intervenant en premier lieu sur le champ magnétique terrestre, l'orateur a déploré l'absence d'étude d'impact lors de l'installation d'antennes de téléphonie mobile, de surcroît sur le toit d'habitations. Outre l'interférence de ces OEM qui font partie de notre environnement techno-logique (téléviseur, téléphone, électricité, réfrigérateur, séchoir, train…) causant des perturbations qui préoccupent désormais dès la phase de conception les spécialistes de la compatibilité électromagnétique (CEM), l'intensité des OEM que nous subissons, dira M. Nekhoul, reprenant les chiffres de l'OMS, est supérieure de plusieurs centaines fois à celui du rayonnement naturel, une exposition qui a triplé en 30 ans. Le conférencier préviendra sur les effets que pourraient subir les organes de fertilité des enfants utilisant très près de leurs corps des équipements émettant des OEM, ou des risques sur le cerveau pour ceux couchant avec un portable sous l'oreiller. Invisibles mais néfastes, les OEM sont de plus en plus suspectées d'être à l'origine de l'apparition de migraines et de pathologies du cerveau. Enfin, deux autres étudiants en mastère 2, Kahina Toudji et Mohamed Lamine Zegrour, clôtureront cette première session avec l'impact des poussières industrielles sur le corps humain en prenant le cas de la wilaya de Tébessa avec ses deux mines : celle de fer d'El Ouenza et celle de phosphate de Djebel Onk. Les travailleurs, ainsi que la population riveraine, sont exposés aux risques de pneumoconiose. Si à El Ouenza, on parle d'allergie, d'asthme et de silicose, à Djebel Onk, il y a plutôt présence de métaux lourds dangereux et toxiques pour la santé humaine et animale. On relèvera qu'en marge de cette reprise, l'universitaire et artiste peintre Hachemi Arada a exposé des toiles réalisées avec des produits de recyclage, alors que le club «Les gens de la mer» a présenté du matériel de plongée sous-marine dans le hall d'entrée de la bibliothèque.