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Le leader manager : se développer pour améliorer autrui
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Publié dans El Watan le 29 - 02 - 2016

Certaines idées vitales sont en train de devenir des évidences que personne ne conteste. Tout le monde serait d'accord pour dire que le développement d'une nation s'explique à plus de 90% par la qualité et le degré d'utilisation des cerveaux qui la composent.
La qualité de la formation diplômante et continue (recyclage) confère à une entreprise ou à un pays l'essentiel de sa compétitivité. Thomas Peters, un des gourous du management, disait, à juste titre, que jusqu'à présent nous n'avons trouvé nulle part une entreprise qui a fait faillite parce qu'elle a fait trop de formation. Je n'ai pas trouvé un analyste, un manager ou un employé qui conteste ces assertions. Mais alors, où se situe la faille dans notre contexte ? Faisons-nous ce qu'il faut faire pour nous hisser au rang de pays émergent ou d'entreprise compétitive à l'échelle mondiale ? Toute la problématique de l'efficacité – on souhaite une meilleure rationalisation des dépenses – réside dans une réponse effective à cette question.
Mais le développement personnel se heurte parfois à un problème culturel de taille : l'égo de certains managers. Ces derniers comprennent très peu la problématique de l'exemplarité. C'est pour cela qu'un manager ne suffit plus pour hausser les performances de son entreprise aux standards internationaux. Il faut qu'il développe également des qualités de leadership. Heureusement pour les managers, globalement on peut apprendre à devenir aussi bon leader. Un manager détient son pouvoir de son poste de travail, de sa position hiérarchique.
Un PDG ou un directeur des ressources humaines se fait obéir parce qu'il a une position hiérarchique, une nomination et un droit de décider. Il a une autorité formelle. Mais on peut avoir dans l'entreprise une personne dynamique, respectée, efficace qui prend des initiatives et soit écoutée par ses pairs et même ses supérieurs. Il peut être chef de service mais devient écouté, respecté et souvent obéi même par ses directeurs. C'est un leader. Il a une autorité informelle. Il est respecté et obéi parce qu'il a des qualités de leader. L'idéal serait d'être les deux : manager et leader.
Former des managers leaders
Beaucoup de gens savent peut-être comment être bons managers alors qu'on leur demande d'être en plus un bon leader. Nous allons prendre une seule facette du leadership : le développement personnel et d'autrui. Il y a plusieurs activités qu'un leader doit entreprendre pour être suivi. Maxwell, un chercheur spécialisé dans ce domaine, en identifie 21. Le développement de soi et d'autrui figure parmi les tops activités aussi bien d'un manager que d'un leader.
Mais il faut en montrer l'exemple. Et les bons exemples nous viennent souvent malheureusement de l'étranger. Jack Welch, ancien patron de la General Electric, gratifié du titre de meilleur manager du XXe siècle, laissait tout le monde savoir qu'il se formait 45 jours en moyenne par an pour deux raisons : donner l'exemple et encourager tout le monde à s'améliorer. Il se développe sans cesse et consacre au développement d'autrui la plupart de son temps. Tout le monde le trouve dans son entreprise comme un leader extraordinaire. Peter F. Drucker, le père fondateur du management moderne, disait que les techniques statistiques ont tellement évolué qu'il allait prendre un cours dans ce domaine.
Dans la plupart des entreprises japonaises, toutes les ressources humaines sont conditionnées à l'idée qu'elles doivent continuer à apprendre et à se développer dans tous les domaines (production, communication, travaux en groupe, cercles de qualité, etc.) durant toute la vie. L'Asie s'est emparée de l'idée qui s'est propagée dans tout le continent. Beaucoup de managers dans les pays sous-développés ont une tout autre culture.
On parle aussi bien des entreprises économiques que des institutions à but non lucratif (hôpitaux, universités, ministères et autres). Ils estiment que leur statut de manager leur confère l'autorité et le savoir pour réussir. Certains ont même honte de se former au vu et au su de leurs subordonnés. Ils croient qu'en donnant l'illusion de tout savoir ils feront bonne impression auprès des subordonnés et se feront respecter. Ils donnent le mauvais exemple. Ils diffusent la mauvaise culture. Les directeurs centraux vont faire la même chose. Les programmes de développement vont alors concerner uniquement quelques personnes en bas de la hiérarchie.
Et il y aura dans l'entreprise une dualité culturelle : des subordonnés qui savent mieux et qui sont bloqués, et des supérieurs qui croient savoir mais qui ne sont ni respectés ni obéis comme leaders, mais juste tolérés comme supérieurs car leurs collaborateurs n'ont pas le choix. Cet état de fait explique pourquoi la mise à niveau des entreprises peine à créer le dynamisme qu'il faut pour booster les performances des entreprises diagnostiquées. Au lieu de promouvoir l'efficacité partout, on qualifie le niveau bas de la hiérarchie et au niveau supérieur la stagnation culturelle alimente le refus du changement.
Alors, quelles pistes envisager ?
Certes, il ne serait pas juste de catégoriser tous les hauts managers et toutes les institutions ainsi. Nous avons des exceptions notables. D'ailleurs, ce sont les entreprises et les institutions les plus performantes qui échappent à cette typologie. Beaucoup de managers se forment en lisant : c'est insuffisant, mais cela constitue un bon départ. Certains se forment sans complexe ; d'autres le font souvent «en cachette» de peur de s'exposer devant leurs subordonnés alors que c'est un effet d'exemplarité extraordinaire.
Mais la majorité des entreprises algériennes connaissent ce problème de dualité. Alors, nous aurons des institutions mal structurées, où des dizaines de réunions par mois deviennent l'outil de travail essentiel et où la coordination et la précision des tâches et des critères de performance font défaut. Il va se produire que l'on va vanter partout les mérites de la décentralisation, de l'autonomie tout en centralisant davantage et en confisquant le plus de décisions possibles au niveau le plus élevé de la hiérarchie.
Tout effet de leadership disparaît et on aura uniquement des effets managers, mais les mauvais effets. La méthode n'y est pas et les ressources non plus. Un manager d'un groupe public se vante des ressources mobilisées pour la formation. Un calcul d'épicier montre qu'il en est à 0,8% de la valeur ajoutée du groupe par an. Les entreprises internationales en consacrent 3%. Pour rattraper le retard, il faut en consacrer 5% sur dix ans dans notre cas. Le bon leader est celui qui se développe sans cesse, le fait savoir, booste constamment les compétences de ses subordonnés et leur donne toujours plus de pouvoir de décision et d'autonomie : il les aide à devenir à leur tour de bons leaders. C'est un des principes du leadership.
Si on ne le fait pas ou qu'on le fait mal, on condamne son institution à des performances dérisoires. D'ailleurs, en règle générale, une institution ne peut pas être plus performante que ce que lui autoriserait son leadership de l'être. Ceci implique qu'une entreprise qui a des pratiques de leadership de niveau 6/20 va avoir des performances maximales de 05/20. Une autre qui a des pratiques de 16 aura des performances de 15 et ainsi de suite.
Les chercheurs et les managers efficaces considèrent que la mission n°1 du premier dirigeant est de développer les compétences d'autrui. Il n'y a pas de divergences là-dessus. Il y a seulement des managers qui le font et d'autres qui en parlent seulement.
PH. D en sciences de gestion


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