Après la France et la Tunisie, les Algériens changent de cap et préfèrent se soigner en Turquie. Détails. «Ce n'est pas par goût du luxe ou parce que la médecine d'ailleurs est meilleure que la nôtre. Mais quand on a besoin d'un rendez-vous dans les trois mois et qu'il faut attendre six mois, on est obligés de chercher ailleurs.» Face à l'indisponibilité des rendez-vous de chimiothérapie et de radiothérapie dans nos hôpitaux, Mohamed n'a pas trouvé meilleure solution que de chercher une prise en charge pour sa femme, atteinte d'une cancer, ailleurs. Sa destination ? La Turquie. «Je ne peux pas rester les bras croisés alors que la maladie se propage et que les chances de guérison diminuent. Des amis nous ont conseillé le centre médical Anadolu d'Istanbul», témoigne-t-il. Après la Tunisie et la France, la Turquie est devenue la nouvelle destination des Algériens. Plusieurs raisons expliquent cette tendance : la maîtrise en Turquie de plusieurs spécialités médicales, la bonne qualité des soins, de l'accueil et des tarifs moins cher comparés à ceux des pays européens. Tout cela, dans des établissements accrédités par la Commission mixte internationale (JCI). Selon Nagehan Nazli, spécialiste des patients algériens au département des services internationaux du Centre médical Anadolu, l'hôpital turc reçoit des patients algériens sans interruption. «Nous recevons tous les mois, environ 10 à 15 nouveaux Algériens âgés de 9 à 85 ans. Soit environ 10% des patients de l'hôpital. Ils viennent en général pour l'oncologie (cancérologie), chirurgie cardiaque, neurochirurgie, gynécologie, chirurgie gynécologique, l'orthopédie et pour la fécondation in vitro (FIV).» Le spécialiste regrette par ailleurs que la plupart des cancéreux viennent à un stade avancé de la maladie, ce qui rend le traitement plus difficile. Accueil Autre détail intéressant : toutes les familles viennent se soigner, quelle que soit leur situation financière. «On reçoit des Algériens de toutes les catégories sociales. Nous avons des patients aisés qui ont les moyens de se traiter chez nous, d'autres qui ne le sont pas et sont pris en charge par des associations ou leurs proches», explique-t-elle en précisant : «des réductions sur les tarifs de traitement sont exceptionnellement appliquées pour les patients algériens». Cet établissement affilié à Johns Hopkins Medicine des Etats-Unis a pensé à tout pour séduire les patients étrangers, notamment les Algériens. «Une fois le premier contact fait par internet ou au bureau d'Alger pris en charge par le docteur algérien Farid Achaïbou, le dossier médical est traduit et transféré au médecin concerné par la spécialité. Quand ce dernier donne son accord médical, on prépare un devis des examens, consultations et traitements recommandés et on contacte le patient. Si ce dernier est d'accord pour venir, on lui organise ses rendez-vous, on envoie une liste d'hôtels proches de l'hôpital, on s'occupe de la réservation selon son choix et on organise le voyage. Notre chauffeur va récupérer le patient de l'aéroport et l'accompagne jusqu'à l'hôtel ou l'hôpital. Une fois au centre, il est reçu par un interprète, français ou arabe, pour les Algériens, qui l'accompagnera durant tout son traitement. Idem pour le départ, tout sera organisé par le centre», explique Nagehan. Kamel, dont le fils s'est fait opérer au centre médical Anadolu, assure : «Nous avons été pris en charge dès notre arrivée à l'aéroport et tout a été organisé et prévu avant l'hospitalisation. Je n'ai jamais vu un personnel médical communiquer et accueillir son patient de cette façon chez nous.» Tarifs Selon le docteur Farid Achaïbou, consultant international à Anadolu Medical Center, responsable du bureau d'Alger et spécialiste en médecine nucléaire en France : «Trois raisons font d'Anadolu Medical Center une nouvelle destination des malades algériens. D'abord, c'est un service international qui attend les malades et les accueille. Ensuite, le fait qu'il soit lié à Johns Hopkins Medicine des Etats-Unis et managé par le Global Quality et troisièmement, le fait qu'il soit situé en Turquie fait que les soins sont moins chers.» Anadolu Médical Center n'est pas le seul établissement turc à appliquer des tarifs réduits pour les malades venus d'Algérie. D'après Maria Ines Kurtulus, superviseur des relations internationales Afrique du Nord et région francophone au groupe hospitalier privé Acibadem : «Il est vrai que les tarifs varient selon la pathologie et son traitement, mais des forfaits spéciaux sont proposés pour les Algériens.» Selon les deux spécialistes, les tarifs de traitement en Turquie sont entre 40% et 50% moins chers qu'en France ou en Grande-Bretagne. Pris en charge au groupe hospitalier Acibadem, Mustapha reste marqué par la qualité des soins et la sympathie des médecins. Cet établissement privé, qui regroupe toutes les disciplines médicales et chirurgicales et qui est considéré comme un véritable pôle d'excellence en Turquie depuis 1991, reçoit entre 1300 et 1600 patients algériens par an, pour les spécialités de radiothérapie et de neurochirurgie pédiatrique et adulte, les cardiopathies congénitales, l'orthopédie et la traumatologie. Par ailleurs, «entre 2007 et 2015, environ 20 patients algériens ont reçu des soins médicaux par Bayindir Healthcare Group. Ces patients ont été admis dans les services d'orthopédie, urologie, pédiatrie, obstétrique et gynécologie, cardiologie, chirurgie cardiovasculaire, chirurgie plastique», affirme Mine Bayhan, responsable au département des patients étrangers au Bayindir Healthcare Group.