Rien ne va plus entre le syndicat des postiers et sa tutelle organique, la Fédération UGTA des postes et télécommunications. Dans un communiqué rendu public, hier, signé par les bureaux de Blida, Béjaïa, Bouira et Alger, les syndicalistes signataires de la plate-forme de revendications du 22 septembre dernier, et qui a soulevé le courroux du secrétaire général de la fédération, ont estimé que « les menaces de ce dernier ne visent qu'à diaboliser une contestation sereine et responsable ». Selon eux, ce mouvement de contestation a pris naissance il y a une année « au sein même » des structures syndicales d'Algérie Poste, « grâce à une base de plus en plus soucieuse d'arracher ses droits », précisant plus loin, qu'il est le résultat de « la frustration » ressentie par les postiers, notamment « face au monopole exercé » en matière de représentation syndicale. Les syndicalistes ont estimé que les menaces du secrétaire général de la fédération ont « conforté » leurs analyses et « dopé leur envie » de se voir « affranchis d'une tutelle qui a assez duré », car ont-ils expliqué, « le statut d'assistés dont lequel ils s'estiment confinés, contredit l'essence de la culture syndicale ». En outre, les signataires ont considéré la signature du pacte économique et social comme « un acquis pour lequel beaucoup d'efforts ont été consentis et vouloir l'utiliser comme l'épée de Damocles dans le but de maintenir une situation d'inertie, c'est faire manque de considération à tous ces efforts. Le traduire en gel de toute activité syndicale, c'est faire le hara-kiri de l'UGTA ». Les porte-parole des bureaux de la coordination ont, par ailleurs, fait remarquer que l'UGTA n'a pas mandaté le SG de la Fédération du secteur des postes et télécommunications à suspendre un droit constitutionnel et à traduire les syndicalistes devant les tribunaux. « Cette maladresse révélatrice a transformé l'UGTA défenderesse des travailleurs en instrument de répression. Qu'en penserait le Bureau international du travail (BIT) ? Pourra-t-on imaginer un instant la CGT, la FO ou le Snapap menacer publiquement leurs cadres et en présence de leurs employeurs ? », ont indiqué les syndicalistes qui se sont demandé pourquoi la fédération a observé le silence lorsque les cadres d'Algérie Télécom ont décidé d'exprimer leur protestation contre la mise en examen des responsables de l'entreprise. LégitiImité statutaire Silence, ont-ils noté, rapidement rompu lorsque les postiers « qui peinent à arrondir leurs fins de mois », ont présenté une plate-forme de revendications socioprofessionnelles. Ils ont tenu à préciser qu'aucun préavis de grève n'a été lancé par les bureaux de coordination, lesquels se sont limités à déposer une plate-forme de revendications à la direction générale d'Algérie Poste, après que « les portes de dialogue aient été fermées » à leurs doléances. Par ailleurs, la section syndicale d'Alger d'Algérie Poste a rendu, elle aussi, un communiqué signé par vingt-trois autres sections et demandé au secrétaire général de la fédération de « cesser de faire dans la résistance afin de permettre aux postiers d'avoir leur propre syndicat d'entreprise ». Ainsi, force est de croire que le conflit qui oppose la fédération aux sections syndicales des postiers n'est autre que le crucial problème de légitimité statutaire qui gangrène presque l'ensemble des structures de l'UGTA, non renouvelées depuis des années. Lors de sa sortie médiatique du 3 octobre, le premier responsable de la fédération, M. Tchoulak, en présence de nombreux cadres d'Algérie Télécom et d' Algérie Poste, a mis en garde contre toute action de grève dans le secteur, en menaçant de recourir à des sanctions prévues dans le statut de l'UGTA. Cette brutale réaction est intervenue après la publication par la presse de communiqués émanant des « bureaux de coordination de sections syndicales des postiers » faisant état d'une plate-forme de revendications socioprofessionnelles et dénonçant « l'absence de dialogue entre l'administration et le partenaire social. M.Tchoulak a indiqué que tous les problèmes liés aux salaires ont été pris en charge par l'UGTA et les employeurs, et à ce titre, une augmentation salariale de 20% a été arrachée grâce aux efforts du syndicat. Toute protestation est considérée comme un coup de couteau assené au pacte économique et social et à l'UGTA. Les seuls qui peuvent décider d'une grève sont au sein de lafédération ». Ces mises en garde et menaces ont été très mal perçues par les syndicalistes, d'autant que le mandat de M.Tchoulak, à en croire ce dernier, a expiré en 1998. En termes de légitimité, M. Tchoulak, de nombreux cadres de l'UGTA, à commencer par le secrétaire national, sont en violation des textes qui régissent l'organisation. Ce qui se traduit sur le terrain par les nombreux conflits syndico-syndicaux liés à l'absence de légitimité des uns et des autres.