Passant outre les mises en garde internationales, la Corée du Nord a rejoint hier le club très fermé des puissances nucléaires. Comme pour l'Inde autre pays non signataire du TNP (Traité de non-prolifération nucléaire), ou le Pakistan qui ont intégré ce cercle en 1998, l'essai nucléaire coréen suscitera des sarcasmes d'abord. C'est le pays de la famine comme le décrit déjà le PAM (Programme alimentaire mondial). C'est aussi celui des menaces comme le considèrent ses principaux voisins comme la Corée du Sud et le Japon qui redoutent des conséquences désastreuses liées à cet essai. Défiant les mises en garde internationales, la Corée du Nord a annoncé hier, soit exactement quatre jours après un vote du Conseil de sécurité la mettant en garde, qu'elle avait fait exploser sa première bombe atomique, un « événement historique », selon le régime communiste. « L'essai nucléaire a été réalisé grâce à la sagesse et une technologie à 100% autochtone », a indiqué l'agence officielle nord-coréenne KCNA. La Corée avait averti, dès le 3 octobre, qu'elle procéderait à un essai nucléaire si les conditions de sécurité étaient réunies. Pyongyang avait alors invoqué « la menace extrême des Etats-Unis de déclencher une guerre nucléaire » ainsi que « les sanctions vicieuses » imposées par le Trésor américain contre des entités nord-coréennes accusées de blanchiment d'argent. La Corée du Nord s'était déjà déclarée en février 2005 la neuvième puissance nucléaire mondiale, après les Etats-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, la Chine, l'Inde et le Pakistan. Mais Pyongyang n'avait jamais confirmé ce statut par un essai nucléaire. Les services des renseignements sud-coréens croient que l'essai a été mené dans un tunnel horizontal creusé dans une colline de la région de Hwadaeri, près de la ville de Kilju, dans la province septentrionale de Hamgyong. Même position au plan scientifique. Selon un diplomate proche de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique) à Vienne, « un essai réussi, c'est quand il y a eu réaction en chaîne, quand il y a eu une explosion nucléaire ». L'AIEA, dont les inspecteurs ont été expulsés de la Corée du Nord fin 2002 et qui n'a elle-même aucune capacité indépendante de détecter des essais, attendait une confirmation de l'Organisation du traité pour l'interdiction totale des essais nucléaires (CBTO) avant de réagir, selon cette source. Dans la réaction en question, le CBTO a indiqué hier avoir détecté un « événement » de magnitude 4,0 sur l'échelle ouverte de Richter dimanche à 1h35 GMT en Corée du Nord, mais sans confirmer, pour raisons statutaires, qu'il y avait bien eu essai nucléaire. « Nous avons communiqué à nos Etats signataires des informations sur un événement de magnitude 4,0 survenu à 1h35 GMT » en Corée du Nord, a indiqué, depuis New York, le secrétaire exécutif de cette organisation Tibor Toth. Il existe une marge de 0,3 degrés d'erreur, selon lui. « Treize stations (de mesure) ont enregistré un pic » à cet instant, a-t-il précisé. La CTBTO entretient un réseau unique au monde de 189 stations de mesure sismiques et hydroacoustiques très sophistiquées, destiné à détecter d'éventuels essais nucléaires. Mais cet organisme, basé à Vienne, n'est pas habilité à se prononcer publiquement sur la nature des incidents détectés et donc à confirmer ou non officiellement s'il y a eu ou non explosion nucléaire, a précisé son responsable. En revanche, selon M. Toth, la CTBTO a transmis des analyses à ses 176 Etats membres ainsi qu'à 770 institutions associées de part le monde. Mais pour beaucoup, ce débat de procédure ne devrait pas occulter ce qui relèverait de l'évidence. Et celle-ci est double. En ce qui concerne l'essai, il ne semble pas y avoir de doute à son sujet, puisque non seulement le CTBTO mais aussi les pays de la région ont enregistré cette fameuse secousse. Et puis rien n'a été fait pour en dissuader la Corée du Nord, même pas la récente déclaration du Conseil de sécurité. Cela aurait tout de même posé problème car d'autres pays, échappent à tout contrôle. C'est simple, ils ne figurent sur aucun registre. A l'image d'Israël puissance nucléaire avérée avec un arsenal évalué à deux cents armes atomiques. Et cela relance tout le débat sur la crédibilité du TNP qui est en fin de compte un compromis, mais qui reste pour beaucoup un traité discriminatoire.