La présidente brésilienne, Dilma Rousseff, a entamé, hier, une course contre la montre désespérée après l'éclatement de sa coalition pour tenter de préserver au moins un tiers des votes des députés qui lui permettrait d'échapper à une humiliante destitution. Plus que jamais fragilisée au lendemain du divorce de son principal allié, le parti centriste PMDB du vice-président Michel Temer, la dirigeante de gauche doit convaincre 172 députés sur 513, plus du tiers, de voter mi-avril contre son impeachment. Sinon, elle sera mise en accusation devant le Sénat, qui aura le dernier mot et pourrait prononcer sa destitution définitive dès le mois de mai, selon l'opposition. La présidence a bien sûr accusé le coup de l'abandon en rase campagne du PMDB. Mais à tout prendre, «cette décision arrive à un bon moment parce qu'elle donne du temps à la présidente Dilma pour recomposer son gouvernement», a tenté de positiver, mardi soir, son chef de cabinet Jaques Wagner. «Le programme du gouvernement est maintenant de conquérir des votes des députés au Congrès et la meilleure façon de le faire est d'élargir notre base d'alliés», a-t-il ajouté, estimant qu'un remaniement ministériel pourrait avoir lieu demain. En clair, le camp présidentiel va chercher à stopper l'hémorragie au sein des partis hésitants du grand centre «mou» de sa coalition en leur proposant les ministères laissés vacants par le PMDB et les 600 postes qu'il contrôlait au sein de la machine gouvernementale. L'opposition de droite mise au contraire sur un effet domino inverse en sa faveur. Tout comme le vice-président Michel Temer, qui ne cache plus ses ambitions de précipiter la chute de Mme Rousseff pour lui succéder jusqu'aux prochaines élections prévues en 2018. La mission sera donc très difficile pour la présidente brésilienne, actuellement embourbée dans une crise politique historique, sur fond d'énorme scandale de corruption et de récession économique, à quatre mois des Jeux olympiques de Rio de Janeiro. Dilma Rousseff n'est pas visée directement par l'enquête sur le scandale de corruption Petrobras qui éclabousse son parti mais tout autant le PMDB. L'opposition l'accuse d'avoir maquillé les comptes de l'Etat pour dissimuler l'ampleur des déficits publics en 2014, année de sa réélection, puis en 2015. Elle se serait ainsi rendue coupable d'un «crime de responsabilité» administrative, prévu par la Constitution. La Présidente répond que tous ses prédécesseurs ont fait de même et dénonce une procédure «sans fondement légal», masquant une «tentative de coup d'Etat» institutionnel. Dilma Rousseff peut néanmoins encore compter sur le soutien de son parti, le Parti des travailleurs (PT) et sa mouvance syndicale. La preuve, ils ont appelé la gauche à manifester massivement aujourd'hui «en défense de la démocratie» et de Dilma Rousseff. Cela suffira-t-il à faire pression sur les députés ?