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Youcef Bouzidi et Lotfi Amrouche : Portraits croisés de deux coaches, de générations différentes... mais au parcours similaire 52e édition de la finale de la coupe d'Algérie. MCA-NAHD (demain à 16h30) au stade du 5 juillet
Les deux coaches des finalistes de la coupe d'Algérie 2016, Youcef Bouzidi (59 ans - NAHD) et Lotfi Amrouche (38 ans - MCA) ont une particularité : ils ont fait leurs classes comme joueurs au sein du club qu'ils ont conduit en finale de la coupe d'Algérie. Youcef et Lotfi ont toujours baigné dans l'ambiance du Nasria et du Mouloudia. L'aîné se souvient : «J'ai ouvert les yeux sur le football dans mon quartier à Hussein Dey. Un vrai fief du football avec des dirigeants d'une dimension jamais égalée, des éducateurs hors pairs, un environnement exemplaire et enfin des joueurs à l'immense talent, à l'instar des anciens comme Nazef, Djebar, Aouar, Ouchen, la génération qui a bercé nos premiers rêves de footballeur.» Son cadet, Lotfi Amrouche, dit à peu près la même chose : «Le Mouloudia a toujours été une école de la vie pour des centaines de milliers de jeunes Algériens. Mon éveil au football s'est produit grâce au Mouloudia. Je suis mouloudéen jusqu'au bout des ongles. C'est tout naturellement que je me suis orienté vers le MCA pour taper dans mes premiers ballons. J'ai rejoint le Mouloudia au niveau de l'école de football. J'ai gravi tous les échelons jusqu'en senior avant de partir chercher plus de temps de jeu à Chéraga (JSMC), le RC Kouba (pendant 6 mois) suivie d'un prêt au WA Rouiba, avant de revenir au bercail comme entraîneur des jeunes. Les circonstances ont voulu que je sois le coach du MCA en cours de saison et que je conduise l'équipe en finale de coupe d'Algérie.» La similitude dans le parcours des deux hommes ne s'arrête pas là. Elle est plus poussée. Tous deux ont enfilé le survêtement d'entraîneur et commencé à prodiguer conseils et orientations aux jeunes joueurs des années après avoir mis fin à leur carrière de joueur. Sur ce chapitre, Lotfi Amrouche indique : «Ma reconversion joueur-entraîneur s'est produite le plus normalement du monde. J'étais programmé pour cela. Mes différents éducateurs m'ont transmis l'amour de ce métier. De Bousri à Bira en passant par Farhi, Oudina, Rachid Malek, tous m'ont inoculé le virus de la passion du football et du métier d'entraîneur. Tout jeune, je buvais leurs remarques et enseignements. Ils m'ont fait aimer ce qui est aujourd'hui mon sacerdoce. Si je suis là aujourd'hui, c'est d'abord grâce à ces hommes qui m'ont accompagné dans ma carrière de jeune footballeur.» Le coach husseindéen a suivi la même trajectoire et dit la même chose : «Je ne remercierai jamais assez tous les éducateurs et entraîneurs qui m'ont prodigué tout ce que je sais aujourd'hui sur le football. Des regrettés Amokrane Oualiken (DNC), Abdelkader Bahmane (NAHD) jusqu'à mon ami Chaâbane Merezkane, sans oublier feu Abdelhamid Kermali - bien que je n'ai pas eu l'honneur et le privilège d'être entraîné par lui -, tous et chacun à sa manière ont une influence sur ma carrière d'entraîneur. Oualiken n'avait pas d'égal pour conduire un joueur vers les sommets. Je me souviens encore de ce qu'il disait à Hamid Bouteldja, à l'époque meneur de jeu talentueux de la DNC, à la fin d'un match accompli : ‘‘Hamid, tu as été moyen'' alors qu'il venait de réaliser un grand match. Hamid notait la remarque et le match suivant il faisait encore une magnifique prestation… sans que Mokrane soit totalement satisfait. Son objectif était de faire de Hamid le meilleur joueur d'Algérie. J'ai fait mienne cette exigence pour booster mes joueurs. Abdelkader Bahmane était un exemple de conscience professionnelle. Du matin au soir il était au stade. Il m'a légué cette passion et cet amour du travail. J'ai bien aimé l'approche du football qu'avait Abdelhamid Kermali, qui ne m'a jamais entraîné mais dont les joueurs qui sont passés sous ses ordres m'ont dit qu'il avait une science de la vie et du football à nulle autre pareille. Chaâbane Merezkane a guidé mes premiers pas comme entraîneur des seniors. Cette passion du défi qui m'habite, c'est lui qui me l'a inculquée.» Un entraîneur ne vient jamais de nulle part. Youcef Bouzidi et Lotfi Amrouche en sont la parfaite illustration. Partis du bas de l'échelle, ils ont fait leurs gammes au sein de leur club formateur en tant que joueur et éducateur ensuite, ils se retrouvent aux avant-postes, exposés à la médiatisation derrière laquelle ils n'ont jamais couru, comme l'atteste leur conduite depuis qu'ils sont en charge des seniors de leur club respectif. Ils mesurent la responsabilité qu'ils portent sur leurs épaules à la veille d'une fin de saison que chacun des deux clubs veut boucler en apothéose avec, à la clef, une victoire en finale de la coupe d'Algérie et le maintien en Ligue 1. Destinés à entraîner ! Au fait, étaient-ils préparés à ce rôle ? ont-ils rêvé un jour de diriger l'équipe fanion ? Lotfi Amrouche répond sans détours : «Depuis le premier jour où j'ai mis les pieds au Mouloudia (école de football), j'ai toujours pensé que ma carrière de football je ne la ferai pas ailleurs qu'au MCA. A partir de la catégorie juniors, j'ai commencé à réfléchir à l'après-carrière de joueur. Bira et Oudina ont fait naître en moi la passion pour le métier d'entraîneur. Sous leur direction, j'ai remporté 2 coupes d'Algérie juniors contre l'ESS et l'USMA. La seconde victoire (1997), devant l'USMA de Ghazi, Achiou, Yacef, avait une saveur particulière. Le jour-même, j'ai décroché mon bac et remporté la coupe d'Algérie. J'avais l'intime conviction que je serais un jour l'entraîneur du Mouloudia. J'ai effectué mes premiers pas d'entraîneur seniors à la JSM Chéraga comme joueur-entraîneur aux côtés de Benali. J'avais comme joueurs Slimani et Khoukhi qui brillent actuellement au Portugal et au Qatar. J'ai réalisé deux accessions avec Chéraga avant de revenir à la maison pour diriger les jeunes après deux brefs passages au RC Kouba et au WA Rouiba. Joueur senior, je notais tout sur les séances d'entraînement du Belge Michel Renkin, coach du MCA en 2001. Je consignais tout après l'entraînement. Il a renforcé ma conviction d'être un jour entraîneur du Mouloudia.» C'est pratiquement le même cheminement qu'a emprunté la carrière de Youcef Bouzidi. Après ses classes au niveau des petites catégories avec lesquelles il a remporté de nombreux titres (2 coupes d'Algérie et championnat), celui que beaucoup d'Husseindéens surnomment «Le sauveur» a naturellement atteint le sommet qu'il convoitait. «Diriger le NAHD est le rêve de tous les joueurs husseindéens qui ont fait leurs classes dans ce prestigieux club. A Hussein Dey, les gens vivent et respirent Nasria. Nos aînés et les générations qui ont écrit les les plus belles pages de la riche histoire du NAHD ont légué un lourd héritage. Le NAHD a été et sera toujours une école de football. Chez nous, l'exigence de la qualité et du spectacle est indissociable du label Nasria. Pour être entraîneur du NAHD, il faut d'abord être imprégné de cette culture. J'ai été nourri par cette culture. Pour avoir été jeune joueur, éducateur, supporter, je sais ce que ressentent les Nahdistes après une victoire ou une défaite. J'ai toujours vécu au rythme du pouls du NAHD. Alors, comme entraîneur, je fais le maximum pour offrir du bonheur aux supporters. Je mesure la grande attente née de 34 ans de disette en coupe d'Algérie. Je serai l'homme le plus heureux du monde si le trophée fait une virée dimanche soir à Hussein Dey. J'ai côtoyé de nombreux entraîneurs qui ont tout fait pour offrir des titres au NAHD et qui, malheureusement, n'ont pu le faire ; je vais faire en sorte de ne pas vivre les mêmes affres. Les soirs d'échec, je m'interroge si j'ai bien retenu les leçons de mes aînés, sur quel aspect j'ai failli, et les soirs de victoire je n'oublie jamais d'avoir une pensée pour tous les coaches qui ont dirigé le club en leur dédiant le succès. C'est cela la véritable richesse du NAHD.» Du rêve… à la réalité Les deux coaches gardent-ils des souvenirs particuliers des finales disputées par leur club respectif ? Lotfi Amrouche avoue : «Le souvenir que je garderai toute ma vie est celui des joueurs du MC Alger montés sur le bus impérial et paradant dans les rues d'Alger après la finale gagnée contre l'USMA. J'étais dans la foule qui célébrait la victoire des nôtres. C'est un souvenir inoubliable. A l'époque, j'étais à mille lieues d'imaginer qu'un jour je serais le coach du Mouloudia qui brandirait la coupe d'Algérie au milieu des joueurs et de milliers de supporters. Je rêve les yeux ouverts. J'ai pleinement conscience de l'importance de ces moments. Ils peuvent être éphémères et sans lendemain. C'est la règle en football. Rien n'est jamais acquis. C'est pour cela qu'il faut toujours garder raison». A 38 ans, celui qui se présente comme un admirateur de Abdelhak Benchikha est conscient qu'il vit des moments exceptionnels : «Pour rien au monde je ne changerai ma situation. Diriger le MCA en finale de la coupe d'Algérie, c'est être sur les pas des monuments qui ont conduit le Mouloudia vers la lumière et qui avaient pour noms feus Ali Benfaddah, Smaïl Khabatou, Abdelhamid Kermali, Hamid Zouba, des hommes qui ont marqué l'histoire du club. Je mesure la chance que j'ai grâce aux dirigeants du club qui me font confiance. Il y a 3 mois, personne ne connaissait Lotfi Amrouche. Dans le football, tout va très vite. On peut tomber dans l'anonymat aussi facilement qu'on est monté au sommet. Je garde les pieds sur terre. De toute façon, ma famille, mes amis et les Mouloudéens ne me laisseront pas faire n'importe quoi.» Son homologue Youcef Bouzidi vit cet événement marquant dans la vie d'un entraîneur de la même manière. Les sensations sont les mêmes. Le vécu aussi. Le coach nahdiste se rappelle des moindres détails des 4 finales disputées par son club : «En 1968, j'étais devant mon poste de télévision pour suivre la finale NAHD-ESS (2-3). Le souvenir que je garde de cette finale, c'est le but de Bouyahi contre son camp alors qu'il restait deux ou trois minutes de jeu et que le NAHD menait 2-1. Après l'auto-goal de Bouyahi, le match a basculé en faveur de Sétif. En 1978, le NAHD est donné favori, ouvre le score par Ali Fegani et s'incline 1-2 face à la JSK. Une année plus tard, les deux équipes se retrouvent en finale, la JSK est le favori et le NAHD s'impose 2-1 avec 10 joueurs suite à l'expulsion de Azziz Zarabi. En 1982, le NAHD joue et perd la finale contre la DNC. Huit joueurs étaient absents ce jour-là, retenus en sélection. Ces moments nous ont marqués. Il a fallu attendre 34 ans pour goûter au plaisir de jouer la finale. J'ai dit aux joueurs : ‘‘Vous êtes des privilégiés. De grands joueurs n'ont pas eu la chance de disputer une finale. Vous avez là une belle opportunité avec l'histoire. Ne laissez pas passer votre chance et entrez dans l'histoire du club par la grande porte''. Je serai tellement fier de conduire le NAHD vers la victoire. L'attente a été si longue, les espoirs de succès tellement déçus qu'il serait bien que cette bande de copains réunis sous les couleurs du Nasria procurent du bonheur aux Husseindéens. C'est maintenant que le plus difficile commence. En cas de victoire, il faudra ensuite repartir vers d'autres challenges, et en cas de défaite il sera difficile de trouver les mots pour remotiver les joueurs et garder la confiance et le soutien de nos supporters. Cette finale contre le MCA n'est pas une fin en soi. On veut la remporter pour inscrire le club dans la dynamique du succès. Là, c'est l'entraîneur et le supporter qui parle.» Lotfi Amrouche et Youcef Bouzidi, deux entraîneurs, un même itinéraire et un seul objectif : remporter la coupe d'Algérie 2016.