Des centaines de travailleurs de la SNVI de Rouiba ont observé hier un arrêt de travail de plus de deux heures pour dénoncer la décision du gouvernement de fixer l'âge du départ à la retraite à 60 ans. «Nous assurons des tâches très pénibles. Nous sommes sous-payés et la plupart d'entre nous ont développé des maladies. Le travail jusqu'à l'âge de 60 ans et au-delà des 32 ans d'exercice doit rester un choix», lance un employé de l'entreprise. Les travailleurs de la Société nationale du véhicule industrielle (SNVI) de Rouiba renouent avec la protestation. Après les multiples grèves observées en décembre dernier à cause du blocage de la production, cette fois c'est la suppression du droit de départ à la retraite anticipée qui attise la colère du personnel de cette importante entreprise publique. Hier, ils étaient plusieurs centaines à avoir observé un arrêt de travail durant plus de deux heures pour dénoncer la fixation de l'âge de départ à la retraite à 60 ans. Les protestataires n'excluent pas la possibilité de revenir à la charge dans les prochains jours si la décision venait à être confirmée officiellement. «C'est une mesure grave qui remet en cause les acquis arrachés de haute lutte par nos aïeux. La retraite anticipée est un droit. Et ce n'est pas à nous de payer les conséquences des politiques infructueuses du gouvernement pour renflouer la CNR», s'écrie Djilali, un employé qui cumule 27 ans d'expérience au sein du groupe. «Cela fait 27 ans que nous cotisons pour avoir un jour le droit de prendre la retraite avant 60 ans. Aujourd'hui on nous apprend que ce ne sera plus possible dès le mois d'août prochain. C'est impensable !» regrette-t-il. Selon lui, il est inconcevable de mettre tous les travailleurs algériens sur le même pied d'égalité. «Nous assurons des tâches très pénibles. Nous sommes sous-payés et la plupart d'entre nous ont développé des maladies. Le travail jusqu'à l'âge de 60 ans et au-delà des 32 ans d'exercice doit rester un choix. Au lieu d'annuler la retraite anticipée, on aurait pu la limiter à une certaine catégorie de travailleurs ou la justifier par l'incapacité du concerné à continuer à exercer son activité», préconise-t-il. Un autre travailleur s'élève contre le fait que tout a été décidé à notre insu. Les syndicalistes, eux, affirment n'avoir reçu aucun document officiel quant aux modalités et à la date d'application de la loi en question. «A présent, le droit de départ à la retraite est accordé à tous ceux qui cumulent plus de 20 ans d'activité même s'ils ont 50 ans», explique un syndicaliste exerçant à la division véhicules industriels (VIR), une filiale qui emploie 2300 travailleurs. Selon lui, pas moins de 450 employés du groupe ont pris leur retraite anticipée depuis janvier dernier. Cette «hémorragie» est due au ralentissement de la production et des plans d'investissement prévus pour moderniser le groupe. Nos interlocuteurs affirment que les plans de sauvetage décidés par le gouvernement peinent à être traduits dans les faits. «L'argent (92 milliards de dinars, ndlr) promis par les banques n'est pas encore débloqué. De janvier à ce jour, nous n'avons fabriqué que 420 véhicules entre bus et camions, soit 20% de l'objectif tracé pour l'année en cours», déplore un syndicaliste, qui dénonce des lenteurs bureaucratiques au niveau des banques et des Douanes. Lors de la tripartite tenue le 5 juin, Abdelmalek Sellal a annoncé que l'âge légal de départ à la retraite est toujours fixé à 60 ans, mais une modification sera apportée à la loi sur les retraites pour supprimer la retraite anticipée. La décision vise surtout à sauvegarder l'équilibre financier de la CNR en difficulté depuis quelques années. La décision est accueillie avec beaucoup de réserve par les syndicats autonomes. Certains trouvent «inconcevable» de remettre en cause des acquis sociaux, tandis que d'autres comprennent le souci des autorités de préserver le système national des retraites.