Les Britanniques sont appelés aux urnes aujourd'hui pour se prononcer pour ou contre la sortie de leur pays de l'Union européenne. Devenu, depuis au moins deux mois, source d'inquiétude au sein des capitales européennes et même aux Etats-Unis, le référendum devrait changer le destin de la Grande-Bretagne, et ce, peu importe le résultat final. Il intervient, par ailleurs, dans un climat lourd après notamment l'assassinat de la députée écologiste Joe Cox (41 ans), partisane du maintien de son pays au sein de l'Europe. Elle a été tuée par balle par un extrémiste anglais proche des milieux nazis et défenseur acharné du Brexit (British Exit, ndlr) qui veut dire sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne (UE). Depuis ce meurtre et l'émotion qu'il a suscitée tant au niveau national qu'à l'étranger, la tendance semble s'inverser très légèrement en faveur du maintien de la Grande-Bretagne au sein de l'espace européen, même si tout peut changer à la dernière minute. Mais au-delà de la fracture politique et idéologique que ce référendum risque de créer au sein de la société britannique, quelles seraient les conséquences dans le cas où le Brexit l'emporte ou échoue ? 1- Si les Britanniques votent pour la sortie de leur pays de l'UE Ce sera comme un fracassant divorce après tant d'années d'union. Les conséquences seront désastreuses pour le couple. Ce dernier devra répartir les biens, renégocier les accords qui le lient à l'UE, entre autres dans le domaine économique, douanier et social, mais aussi repenser la répartition budgétaire de 28 membres à 27. Cela se traduirait par un manque à gagner financier pour l'UE et pour la Grande-Bretagne elle-même, car elle bénéficie de crédits européens, notamment dans le domaine de la politique agricole commune. Pour rendre le divorce concret, cela demandera plusieurs années de discussions et de négociations. Si le Brexit l'emporte, David Cameron, le Premier ministre britannique, devra actionner l'article 50 du traité de l'Union qui fixe les modalités conditionnant la «clause de retrait volontaire et unilatéral» d'un pays. Bien entendu, plus les discussions seront simplifiées et soutenues par les autres membres de l'Union, plus la sortie de la Grande-Bretagne de l'Europe se fera avec un peu de délicatesse. Mais c'est sans compter la position de certains pays, comme la France ou la Grèce, qui risquent de faire payer cher à Londres le choix du Brexit. Paris et Bruxelles pourraient, par exemple, renforcer le contrôle aux frontières pour les Britanniques qui prendraient les trains Thalys ou l'Eurostar pour venir au sein de l'espace Schengen. La possibilité aussi d'instaurer un visa n'est plus écartée par d'autres pays nouvellement arrivés au sein de l'Union. L'autre coup dur, que pourrait encaisser la Grande-Bretagne, serait l'effondrement de la City. Considérée jusque-là comme l'une des plus grandes places financières au monde après New York, de grandes banques comme J. P. Morgan, HSBC et autres pourraient quitter Londres pour s'installer à Francfort ou à Paris. Des entreprises et des start-up, qui créent des milliers d'emplois chaque année, pourraient aussi leur emboîter le pas. Le taux de chômage, actuellement très bas (4% environ), pourrait en revanche augmenter sous le coup des délocalisations de nombreuses multinationales qui iront chercher un ciel plus clément financièrement et plus stable politiquement. Sur le plan politique, la sortie de la Grande-Bretagne de l'Europe donnera la chance, pour la première fois depuis des années, à la gauche européenne d'être majoritaire et de faire passer des lois plus sociales et en faveur de l'environnement. Cela sera facilité une fois que les 73 députés britanniques de la droite et du centre-droit auront quitté l'hémicycle de Strasbourg. 2- Si la grande-bretagne reste au sein de l'Europe Si les Britanniques choisissent de rester au sein de l'Europe, alors l'UE fera des gestes à l'égard de Londres comme, par exemple, le plafonnement des allocations familiales et sociales versées aux citoyens de l'Union européenne vivant en Grande-Bretagne, comme le réclame David Cameron. Cependant, si Bruxelles devait accepter cette mesure, d'autres pays de l'union demanderaient d'en bénéficier. Ainsi, on verra la naissance d'une européo à la carte. Autrement dit, l'harmonisation sociale et fiscale que demandent de nombreux pays risque de voler définitivement en éclats et affaiblir le projet de la construction de l'Union européenne. Par ailleurs, le maintien de la Grande-Bretagne au sein de l'Europe lui permettra de conserver ce statut de pays moteur dans le domaine de la finance internationale. Le pays pourra garder en son sein toutes les grandes banques mondiales et sociétés internationales au grand bonheur du gouvernement Cameron qui a fait de la lutte contre le chômage son cheval de bataille. Enfin, les partis extrémistes auront échoué à faire passer leur projet, ce qui va exacerber à coup sûr les tensions sociales et politiques internes et poussera de nombreux partis extrémistes, comme UKIP de Nigel Faraj en Grande-Bretagne, le Front national de Marine Le Pen en France ou le FPO en Autriche, à se radicaliser davantage. Ils chercheront à se venger à la moindre élection locale ou nationale. Hier, un dernier sondage donnait une légère victoire (51%) aux partisans du maintien de la Grande-Bretagne au sein de l'Europe, mais l'écart risque de se réduire d'ici la fermeture des bureaux de vote. Pour les deux camps, l'objectif est de convaincre les 10% qui n'ont pas encore choisi leur camp. La bataille promet d'être acharnée.