Les Britanniques sont appelés aujourd'hui à dire si oui, ou non ils veulent rester au sein de l'Union européenne. To be or not to be (in Europe) est la question à laquelle ils doivent répondre à l'occasion de ce référendum unique devant trancher l'avenir d'un Royaume pas très uni… Brexit. Voilà un vocable composé très en vogue qui déchaîne les passions depuis plus de six mois de l'autre côté de La Manche. L'abréviation «British Exit», évoquant l'hypothèse d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, faisant référence au «Grexit» évoqué durant l'été 2015 lors de la crise grecque, sonne et résonne très fort au royaume de Sa Majesté. Pour les partisans de la sortie de l'Europe, c'est un beau slogan devenu un tube d'été qu'ils chantent avec enthousiasme. Mais il sonne très mauvais et crève les tampons des Britanniques qui ne veulent point divorcer d'avec Bruxelles. C'est ce combat so british qui va se jouer aujourd'hui, en toute liberté et dans le secret des urnes, entre partisans de la sortie de l'Europe et défenseurs d'un Royaume-Uni qui reste sous la férule de Bruxelles. Jusque tard dans la soirée d'hier, les deux camps tentaient de séduire les 10% d'indécis. Et pour cause, la moyenne des intentions de vote de ces derniers jours offre des résultats extrêmement serrés. Le maintien du Royaume-Uni dans l'UE est certes légèrement devant avec 51% des intentions de vote, selon le site What UK Thinks, mais il ne faut pas crier victoire. Les partisans du «Brexit» redoublent d'agressivité sur les places publiques et font du porte à porte pour convaincre les récalcitrants à les suivre dans leur aventure en solitaires. Ils comptent sur le charisme de l'ancien maire de Londres et député conservateur, Boris Johnson, qui invite ses compatriotes à «saisir la chance de reprendre en main leur destin confisqué par Bruxelles». Un frisson «so british» Un discours qui fait mouche chez de larges couches de la population qui, majoritairement, ne se sentent pas forcément européennes mais acceptent bien ce statut pour des objectifs utilitaires qu'ils pourraient tirer de l'UE. De son côté, le Premier ministre David Cameron rassure les électeurs sceptiques dans une interview au Guardian qu'en choisissant l'UE ils enverraient le «message clair» que le Royaume-Uni n'est pas «replié sur lui-même». Mais ses adversaires ne l'entendent pas de cette oreille. Pour eux, l'Europe est devenue un triste épouvantail, un fantôme qu'il va falloir fuir le plus tôt possible. «Si la Grande-Bretagne vote pour rester dans l'UE, cela signifie que nous resterons soumis à un système de plus en plus antidémocratique, qui dicte aujourd'hui 60% des lois adoptées par notre Parlement, un phénomène qui contribue considérablement à l'apathie des électeurs car il entretient le sentiment que nous ne contrôlons plus notre destin, et que voter ne change rien», mettent en avant les partisans du «out». Ce sentiment d'être prisonniers de l'Europe est surtout prégnant au nord de l'Angleterre où on craint l'afflux massif des ouvriers étrangers si le maintien en Europe l'emportait. Cela étant dit et au-delà des enjeux internes au Royaume-Uni, ce référendum empêche sûrement les dirigeants de Bruxelles de dormir. La perspective de perdre un aussi grand pays au poids militaire et diplomatique immense conjuguée à la puissance financière de la City inquiète plus qu'elle ne rassure. A Bruxelles, on ne veut évidemment pas y croire. On craint aussi un éventuel effet domino. Mais on s'y prépare, sait-on jamais… A Londres, c'est cette peur de voir voler en éclats la couronne britannique. La victoire du «Brexit» pourrait induire un repli identitaire des Ecossais, des Irlandais et des Gallois. A moins que les déçus de l'Europe ne reviennent à de meilleurs sentiments en se contentant d'envoyer, cette fois, un sérieux avertissement à Londres et Bruxelles.