Des hommes de loi et des défenseurs des droits de l'homme s'inquiètent du climat politique qui prévaut actuellement en Algérie. Une régression criante est constatée sur tous les plans, notamment dans le domaine des libertés d'opinion et d'expression. Hier, la Ligue algérienne des droits de l'homme, présidée par maître Nourredine Benissad, est sortie de sa réserve pour dénoncer les atteintes flagrantes et répétées aux libertés collectives et individuelles. Cet avocat a dressé un bilan des plus négatifs de la situation des droits de l'homme dans notre pays, comme il s'est élevé contre les restrictions récurrentes des espaces d'expression pourtant pacifiques (d'opinion, de la presse, de la défense des droits humains et de la liberté de commerce). Pour cette ligue, certains médias sont particulièrement ciblés du fait de leur ligne éditoriale qui dérange. Il cite au passage les quotidiens El Watan, El Khabar et la chaîne KBC dont certains animateurs et producteurs sont en prison. A ce sujet, la LADDH s'inquiète des poursuites judiciaires engagées à l'encontre des responsables de KBC et l'emprisonnement pour certains, notamment Mehdi Benaïssa, le directeur de production de KBC, et Nora Nedjaï, fonctionnaire au ministère de la Culture chargée de délivrer des autorisations de tournage. Les griefs retenus contre ces personnes sont les «fausses déclarations» et la «mauvaise utilisation de la fonction», et ce, dans le cadre de l'affaire des autorisations de tournage de deux émissions de la chaîne de télévision. L'acharnement du pouvoir ne se limite pas seulement au monde de la culture et de la presse, mais s'étend à d'autres personnes exerçant diverses fonctions. Me Benissad énumère une longue liste et cite, entre autres, le cas du général Benhadid en détention provisoire depuis plus de dix mois et dont la liberté provisoire lui a été, encore une fois, refusée alors qu'il est âgé et malade. Il donne l'exemple des poursuites judiciaires engagées contre des avocats dans l'exercice de leur mission, comme le défenseur des droits de l'homme et avocat Nordine Ahmine, l'avocat Salah Dabbouz, de Belkacem Khencha du comité de la défense des chômeurs, le défenseur des droits de l'homme Hacène Bouras et le journaliste Talmat. La Ligue des droits de l'homme rappelle que l'exercice de ces libertés fondamentales et la protection des défenseurs des droits de l'homme et de l'avocat sont consacrés par la Constitution adoptée récemment en grande pompe. Sans omettre les différentes conventions internationales relatives aux droits de l'homme ratifiées et promulguées dans les Journaux officiels ainsi que les déclarations onusiennes en la matière. Ces textes, explique Me Benissad, garantissent dans leur ensemble les principes de la présomption d'innocence, de la liberté comme règle et de la détention provisoire comme exception en privilégiant les mesures alternatives comme le contrôle judiciaire à la privation de liberté et au droit d'être traduit dans un délai raisonnable devant un tribunal impartial. A cet effet, la LADDH s'en remet au premier magistrat du pays, garant de l'indépendance du pouvoir judiciaire aux termes de la Constitution en l'appelant à user de ses prérogatives pour faire cesser ces poursuites et appliquer les différents textes juridiques. La LADDH invite aussi l'ensemble des citoyens épris de liberté et de l'Etat de droit à se mobiliser pour exiger l'exercice libre et pacifique des droits d'expression, d'opinion, de réunion, de manifestation, d'organisation et exiger aussi la libération de tous les détenus d'opinion, d'expression et de défense des droits humains.