Les ONG des droits de l'homme interpellent les autorités sur le fonctionnement de la justice. La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) regrette que des magistrats perpétuent par leur comportement des pratiques autoritaires, à travers principalement la détention préventive. «Il y a un excès dans l'exercice de la détention préventive. La loi stipule que cette mesure doit être l'exception pour préserver le justiciable. Le code de procédure civile amendé, qui traite de la comparution immédiate, fait qu'on a affaire à du référé dans le traitement des affaires. On veut vite faire les choses alors que les juges ont besoin de sérénité dans leur travail», a indiqué Me Aissa Rahmoune, vice-président de la LADDH, contacté par El Watan. Pour l'avocat, afin de permettre le bon déroulement de la justice, le magistrat ne doit pas traiter les affaires avec zèle. «Les juges font dans l'excès de zèle particulièrement dans les affaires économiques. Les mis en cause ont une adresse connue et une renommée. Les juges doivent respecter la dignité des justiciables. Sans un Etat de droit, rien ne pourra changer», tranche Me Rahmoune. Amnesty International, qui a salué les révisions de la Constitution, demande aux autorités de renforcer les garanties prévues dans la Loi fondamentale. «La Constitution renforce les garanties à un procès équitable dans les articles 45, 45 bis, 47, 48, 142 et 144 relatifs à la garde à vue et à la procédure pénale. Toutefois, le projet pourrait renforcer ces garanties, en incluant le droit d'être rapidement traduit devant un tribunal et le droit d'être jugé dans un délai raisonnable ou libéré», précise Hassina Oussedik, directrice d'Amnesty International, dans un commentaire transmis à El Watan. Selon Mme Oussedik, l'article sur l'inamovibilité des juges est une «avancée compromise». «La Constitution introduit le principe d'inamovibilité des juges (article 148) tout en suggérant l'introduction d'une nouvelle loi à cet égard. Cette avancée importante vers l'indépendance judiciaire est toutefois sérieusement compromise par les dispositions préservant l'influence du Président sur le pouvoir judiciaire, qui nomme les membres-clés de l'appareil judiciaire, notamment des juges (articles 78, 78-3 bis, 78-7) tout en se référant à une loi organique détaillant ces nominations.» Selon la loi actuelle, le Président nomme six des 20 membres du Conseil supérieur de la magistrature, un Conseil qui nomme, transfère et sanctionne par mesures disciplinaires les juges. Le Président continue de présider le Conseil en vertu de l'article 154 de la Constitution tandis que le ministre de la Justice en est le vice-président. Le Président continue également de designer le président du Conseil constitutionnel (article 164), détaille AI. L'ONG demande aux législateurs algériens de renforcer l'indépendance de la justice «en affirmant l'inamovibilité des juges sans ambiguïté et en s'assurant que la future loi sur le statut des juges incorpore les principes fondamentaux des Nations unies relatifs à l'indépendance de la magistrature».