Finalement, et après de très nombreuses rencontres, Russes et Américains se sont entendus sur une trêve vendredi à Genève. Trop peu, dira-t-on, au regard des attentes suscitées par le conflit syrien qui n'est plus, il est vrai, ce qu'il était à ses débuts, puisque l'on a fini par parler de guerre, avec l'émergence d'un danger devenu planétaire. Aussi, dira-t-on, les chefs de la diplomatie russe et américain se sont entendus sur un plan visant à instaurer une trêve dans ce pays déchiré par cinq ans de guerre, qui pourrait déboucher sur une coopération militaire contre les rebelles djihadistes. «Les Etats-Unis et la Russie annoncent un plan qui, nous l'espérons, permettra de réduire la violence» et d'ouvrir la voie «à une paix négociée et à une transition politique en Syrie», a ainsi déclaré John Kerry, tandis que Sergueï Lavrov assurait que Moscou «a mis au courant le gouvernement syrien de cet accord et il est prêt à le respecter». Les deux puissances cherchent à relancer un plan de paix adopté fin 2015 par la communauté internationale et qui comprend un cessez-le-feu durable, de l'aide humanitaire conséquente et un processus de transition politique entre le régime syrien et l'opposition modérée. Cette dernière entend jouer un rôle prépondérant, en demandant le départ du chef de l'Etat syrien lui-même devenu hostile à l'idée même de transition depuis que son armée a enchaîné les succès sur le terrain. Mais tout ne paraît pas clair puisque, selon M. Lavrov, le plan annoncé vendredi «permet de mettre en place une coordination efficace pour lutter contre le terrorisme, avant tout à Alep, et permet de renforcer le cessez-le-feu. Tout cela crée les conditions pour un retour au processus politique». Ce n'est donc qu'une étape, même si les deux parties se sont clairement entendues sur le danger qu'elles doivent combattre ensemble, et préalablement. Outre la lutte contre l'organisation Etat islamique (EI), les deux parties ont convenu de renforcer leur action contre toutes les forces djihadistes, notamment le Front Fateh Al Cham, l'ex-Front Al Nosra lié à Al Qaîda. La coopération passera en particulier, si la trêve tient, par un partage d'informations pour des frappes aériennes, ce à quoi Washington s'était jusqu'à présent refusé. Le chef de la diplomatie américaine a indiqué que si la trêve dure «une semaine», les forces américaines accepteront de collaborer en Syrie avec l'armée russe, une coopération réclamée de longue date par Moscou et sur laquelle les deux pays travaillent depuis des mois. M. Lavrov a annoncé la création d'un «centre conjoint» russo-américain destiné à coordonner ces frappes, «dans lequel des militaires et des représentants des services secrets russes et américains s'occuperont des questions pratiques : distinguer les terroristes de l'opposition modérée». Mais, dans un communiqué, le Pentagone a souligné que les engagements inscrits dans l'accord «doivent être totalement respectés avant toute coopération militaire potentielle». Autant dire que ce plan comporte plusieurs volets qui s'enchaînent et qui dépendent les uns des autres. Staffan de Mistura, l'envoyé spécial de l'ONU, a salué cet accord tout en espérant que «la volonté politique qui (y) a mené est durable», et cela après avoir affirmé que cet accord «aurait un impact positif sur la façon dont le processus politique serait relancé», et en assurant que les discussions, qui y ont mené, traitaient de «sujets complexes, délicats et difficiles» qui n'ont pas été dévoilés. Une trêve étant ce qu'elle est, elle peut mener vers une paix durable, et c'est ce que le monde attend.