Difficile de demander à ceux responsables d'avoir érigé la corruption en mode de gouvernance et le plagiat en modèle de réussite de les combattre aujourd'hui. Ces mêmes dispensateurs de diplômes de complaisance à des responsables politiques en poste ou dans les administrations publiques ne peuvent jouir d'une légitimité suffisante pour mener ce combat. Difficile aussi de demander à ceux qui pistonnent leur enfants et proches pour le passage au niveau supérieur de s'affranchir des anciennes pratiques et de se saisir de cette lutte. Les habitudes sont tellement ancrées dans l'esprit de ceux-là mêmes qui président aux destinées de l'université qu'il serait quasi impossible d'inverser les rôles tant ils sont seuls responsables de la déliquescence et de l'abîme dans lequel se trouve l'université algérienne aujourd'hui. Bien que cette rentrée universitaire porte le signe de «la lutte contre le plagiat» annoncée en grande pompe par Tahar Hadjar, le ministre de l'Enseignement supérieur, rien n'indique que le combat sera mené sans encombre et sans résistance. Tahar Hadjar, s'il est peut-être animé de bonnes intentions, sait mieux que quiconque – en tant qu'ancien recteur de l'université d'Alger 2 – que ce n'est guère une mince affaire. S'attaquer à cette grosse «machine à production de la triche» nécessite une réelle volonté politique. Et pour mener bataille, le combat ne peut s'accommoder des responsables de l'échec. Même s'ils sont conditionnés par un nouveau dispositif juridique, puisque des lois dissuasives existaient déjà. Il s'agit de morale, d'éthique et de probité intellectuelle dont il est question et non d'un mal dont le palliatif est à chercher dans les laboratoires. Le remède se trouve plutôt dans le choix du personnel dirigeant et encadrant. Seule la bonne gouvernance, avec ses modes de gestion transparents, peut annoncer les prémices de la véritable bataille contre les maux de l'université : élection de recteurs en lieu et place de la formule de désignation par la tutelle ; établissement d'un code d'éthique et de déontologie et installation de commissions en charge de son application et de la révocation, sans hésitation aucune, des contrevenants ; réactiver les jurys de délibération pour mieux évaluer les candidats ; mettre fin à l'hégémonie de l'administration dans la gestion de la chose universitaire et la carrière des enseignants ; enfin, bannir toute forme de clanisme, de népotisme et de régionalisme tels sont les véritables sacerdoce à endosser par des décideurs courageux. Car l'enjeu est immense. Il s'agit tout bonnement de la réforme de l'Etat et de la refonte de l'université qui doit être au cœur des préoccupations et des priorités. L'université ne peut plus continuer à produire de faux docteurs, de faux professeurs, de faux ingénieurs et de faux cadres. Son délitement est inéluctablement synonyme de l'échec d'une nation.