Après avoir boycotté les élections de 2002 et celles de 2012, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) rompt avec la politique de la chaise vide. Son conseil national, qui s'est réuni hier en session ordinaire au club El Moudjahid à Alger, a voté, à la majorité écrasante, pour la participation aux élections législatives qui auront lieu au printemps prochain. Si cette décision en faveur de la participation était dans l'air depuis plusieurs semaines, elle était encore plus évidente après le discours du président du parti, Mohcine Belabbas, à l'ouverture des travaux de la réunion du conseil national. «Dans une situation normale, un parti ne se pose pas la question de participer ou non à un scrutin. Il se pose la question des moyens dont il dispose pour couvrir ou non les circonscriptions électorales et, bien sûr, les propositions à défendre ou les alliances à contracter», a souligné le responsable du RCD qui rappelle «le boycott des élections législatives et locales de 2002 et les législatives de 2012, sans compter toutes les présidentielles, à commencer par les deux dernières». Le RCD pouvait-il ainsi se permettre indéfiniment de tourner le dos aux élections ? Sans détour, son président donne une réponse claire et laisse même entendre que les précédents choix étaient discutables, en cela qu'ils n'ont pas été sans conséquences sur le développement du parti. «Il ne s'agit pas de regarder dans le rétroviseur pour dire est-ce que nous avions raison ou tort du point de vue de la construction du parti et de la propagation de nos idées», dit-il. «Chacun de nous peut avoir sa propre appréciation sur le sujet», insiste le président du RCD, qui semblait bien avoir la sienne, en faveur de la participation. Mohcine Belabbas s'explique : «Ce qu'il est important de toujours noter, c'est de bien entendre qu'un parti démocratique ne peut et ne doit pas être l'otage de dogmes ou de préjugés et ne doit se positionner qu'en fonction d'analyses rationnelles et sereines qui embrassent la conjoncture avec pour seules considérations les possibilités de faire avancer notre combat et de renforcer nos instances et notre influence dans la société.» «Chacun est libre de s'exprimer comme il l'entend sur la question des élections mais, de mon point de vue, l'urgence aujourd'hui est d'organiser le débat en fonction des conjonctures politiques, économiques et même géopolitiques, pour éviter la tentation facile de déclarations théoriques sans prise avec le réel», a-t-il déclaré à l'adresse des membres du conseil national. Et de rappeler : «Les structures de base du parti ont déjà anticipé ces discussions et cela peut aider à affiner nos échanges aujourd'hui. Il nous est demandé de bien cerner la situation générale du pays, notre place dans l'échiquier national, d'évaluer les dangers potentiels de la situation régionale et de réfléchir sur les conséquences des nouvelles lois qui régissent les élections.» Le message semble bien passer auprès des membres du conseil national. La participation du RCD aux prochaines élections présente plus qu'un enjeu. Il y va non seulement de la construction du parti, de son ancrage et de la promotion de ses idées, mais aussi de sa propre survie au regard des exigences qu'impose la nouvelle loi électorale. A la lumière du nouveau texte qui régit les élections, le choix du boycott peut s'avérer une option suicidaire et conduire à la mort certaine du parti. Maintenant que la participation est décidée, que fera le RCD, qui a «toujours considéré que la racine des problèmes dans ce pays ce sont les fraudes électorales endémiques», pour imposer des élections libres et propres ? Sa proposition portant «sur l'instauration d'une commission indépendante de gestion des élections» a été rejetée. Le pouvoir a préféré, puisqu'il s'agit de sa propre survie, la mise en place d'une commission maison, l'organe de surveillance des consultations électorales. Va-t-il alors engager une large concertation avec les partis qui feront le choix de participer aux prochaines élections pour dégager les mécanismes à même d'empêcher la fraude ? Sinon à quoi aurait servi alors la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CLTD) ou encore l'Instance de concertation et de suivi de l'opposition (Icso) ?