Depuis samedi, des enseignants et des étudiants en architecture strasbourgeois (France) et leurs homologues de l'université des sciences et de la technologie d'Oran (USTO Mohamed Boudiaf) sillonnent les rues du vieux centre-ville d'Oran, qu'est le quartier de Sidi El Houari. Objectif : proposer des aménagements qui tiennent compte du caractère historique dudit quartier et les possibilités d'y introduire des formes de modernité architecturale et urbaine. En effet, il s'agit d'un atelier d'architecture et d'urbanisme collaboratif international initié dans le cadre d'une convention entre l'USTO et l'Ecole nationale d'architecture de Strasbourg, pour l'année 2016-2017. Selon le porte-parole de l'USTO, Boudia Maâmar, «ce programme a pour ambition de donner l'occasion aux étudiants des deux rives de travailler en commun sur un sujet d'urbanisme et d'architecture à Oran. Principalement, il est question de réfléchir, jusqu'au 14 novembre, sur le rapport de la ville à la mer, d'explorer les potentialités des tissus existants et de proposer des aménagements». Pour ce faire, une équipe de 17 étudiants français et d'autres nationalités européennes ainsi que des étudiants de l'USTO, est répartie en plusieurs groupes qui se dispersent dans le vieux quartier. Ces jeunes marchent à pied, parlent aux gens, glanent, dessinent et réfléchissent selon des parcours bien définis, allant de la porte de Canastel aux bains turcs en passant par la place Kléber, dont une du même nom existe à Strasbourg. En somme, c'est un exercice de diagnostic mené à travers des enquêtes, une cartographie ainsi que des études des architectures et des aménagements existants. M. Boudia explique que «ce travail a pour objectif de démontrer la capacité de la ville ancienne — dans notre cas Sidi El Houari — à absorber des aménagements spatiaux pouvant permettre aux quartiers concernés d'intégrer les exigences de la modernité contemporaine, tout en considérant les nécessités de la protection des environnements bâtis et naturels.» Et l'atelier ne se limite pas au quartier Sidi El Houari d'Oran, mais devra être mené également dans une ville de la rive nord-méditerranéenne. Notre interlocuteur a expliqué l'objet de cette coopération franco-algérienne et sa dimension sociale et civilisationnelle : «Il est question d'envisager des interventions dans une ville en transformation, en tenant compte des interactions entre la ville bâtie, la société qui l'habite et le contexte environnemental, en s'intéressant aux formes de la ville, mais aussi au temps, aux acteurs et aux facteurs naturels.» Et justement, dès le début de la semaine, les étudiants en mastère sur le terrain observent et tentent de comprendre la ville dite contemporaine d'Oran, en décryptant ses changements physiques, économiques et sociaux. Les observations et données recueillies feront l'objet d'un mapping, qui permettra d'élaborer une carte spécifique. Après le workshop viendra l'étape de la conceptualisation en vue d'un projet spatial. Méthodologie nouvelle Pour résumer, l'approche méthodologique suivie est subjective. Elle repose sur l'expérience personnelle et individuelle de chaque étudiant lors de son séjour. Plus explicitement, ce sont les ressentis et les perceptions des jeunes architectes qui dicteront le devenir à proposer pour le quartier Sidi El Houari. Le résultat de cet atelier international fera certainement foi d'expertise à même de décider du sort de la Casbah historique d'Oran. «Ce travail permettra de savoir quelles parties il faut éliminer, réhabiliter ou réaménager en espaces verts ou logements promotionnels, par exemple. Et les étudiants sont en train d'interroger les habitants, les associations, l'histoire et les plans pour proposer des scénarios possibles ou impossibles», explique M. Boudia. Il faut savoir que cet atelier répond à une certaine exigence, car le mouvement associatif a dénoncé les démolitions récentes programmées dans ce quartier suite à une opération de relogement social. Les spécialistes du tourisme à Oran, les guides et les habitants de Sidi El Houari ont demandé à être associés ou consultés avant la transformation de ce quartier historique. Ceci a coïncidé avec un vif intérêt manifesté par les architectes de l'USTO pour le quartier et l'avenir de la ville en général. Plusieurs conférences, ateliers et rencontres-débats ont été organisés avec pour thème central le patrimoine tangible et l'identité architecturale d'El Bahia. Des visites de jeunes étudiants en architecture et en urbanisme sont programmées toutes les semaines. Certains étudiants ont même créé des clubs au sein d'associations comme Saha Sidi El Houari et son club Patrimoine. Mais c'est la première fois que le département d'architecture investit le terrain avec un projet aussi concret, moderne et novateur et propose son expertise et celle d'une école étrangère réputée. De quoi rassurer les citoyens et les amoureux du patrimoine, mais aussi confirmer la nouvelle politique de l'université qui se tourne de plus en plus vers la ville.