Ce projet de réforme est une question hautement sensible dès lors qu'ils s'agit de «dégraisser un vieux mammouth» qui pèse 27,7 milliards de dollars dans le budget. Ce n'est pas une remise en cause de la politique des subventions, mais il s'agit d'une action de ciblage qui est à l'étude, s'est défendu récemment, le ministre des Finances, Hadji Baba Ammi, dans une interview à l'APS. Pour le premier argentier du pays, le dispositif des subventions généralisées n'est pas «équitable», d'où l'idée de revoir de fond en comble cette politique volontariste de l'Etat qui abreuve à la fois riches et nécessiteux, entreprises et ménages, Algériens et peuples voisins. Le projet de mettre en place un outil de ciblage relève de la gestion responsable de l'argent public. Lequel projet fait déjà son petit bout de chemin au niveau du ministère des Finances, épaulé dans son œuvre par le département de la Solidarité et de la Famille, ainsi que par certains organismes de statistiques, selon une source proche l'institution de Hadji Baba Ammi. La question est hautement sensible tant il est question de dégraisser un vieux mammouth qui pèse 27,7 milliards de dollars dans le budget, soit plus de 18% d'un PIB prévisionnel de 166 milliards de dollars. L'Exécutif souhaite tailler, en premier lieu, dans les subventions des produits énergétiques — l'électricité, le gaz et les carburants — dont le soutien aux prix coûterait à l'Etat 15,3 milliards de dollars cette année, selon une étude réalisée par Abdelmadjid Attar pour le compte du Forum des chefs d'entreprise (FCE). Après avoir introduit une première hausse des prix de l'électricité et des carburants dans la loi de finances 2016, le gouvernement propose une seconde augmentation vicieuse par le moyen d'un relèvement de la taxe sur l'importation des produits pétroliers, incluse dans la loi budgétaire du prochain exercice. Elle ne serait pas la dernière, selon certaines indiscrétions, puisque l'une des pistes de travail suggérée est d'aligner graduellement les prix des carburants sur ceux des pays voisins afin d'en finir avec le fléau de la contrebande qui coûte à l'Etat 3 milliards de dollars annuellement, soit 1,7% du PIB, d'après les chiffres du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. La première tentative de doter les automobilistes d'une «carte de carburants», dont les quotas devraient être fixés suivant le niveau de consommation, a fait un flop pour des raisons inexpliquées. Le gouvernement semble se rendre à l'évidence selon laquelle certaines subventions posent par ailleurs un sérieux problème de santé publique, dont le soutien indirect aux prix du sucre, d'où l'idée d'en finir définitivement avec cette concession. L'Exécutif compte également revoir sa contribution à l'économie avec, comme premier acte inclus dans le PLF-2017, la révision des subventions indirectes et fiscales accordées aux entreprises et la baisse des dotations financières accordées aux sociétés publiques. Le ministère des Finances serait sur un projet de rabotage graduel des subventions tant alimentaires et énergétiques que celles destinées à soutenir fiscalement et financièrement les entreprises à la fois privées et publiques. Lequel projet s'inscrit dans le cadre d'une politique d'ajustement budgétaire étalée sur plusieurs années, dont l'ambition d'une meilleure allocation des subventions est l'un des piliers fondateurs. Il y a assurément un arbitrage à faire, étant donné que cette action de rabotage, bien que graduelle, pourrait provoquer un effet retour de manivelle qui aggraverait le coût social de la crise. L'Exécutif veut, à terme, mettre en place un système de subventions plus performant, associant l'impératif de cibler les catégories socialement vulnérables, l'efficacité énergétique, la maîtrise des dépenses et la lutte contre certains dysfonctionnements structurels qui caractérisent la politique budgétaire. D'où l'urgence de cette réforme mise en branle. Scandaleux est le constat de l'Office national des statistiques (ONS) qui, dans une récente étude, a fait constater que la moitié la moins aisée de la population reçoit 28% des subventions totales ; le reste, soit 72%, va à la moitié la plus aisée.