Une année après l'horrible agression dont a été victime Marie-Simone, une migrante camerounaise de 33 ans, le tribunal criminel près la cour d'Oran a rendu son verdict jeudi dernier. Les trois auteurs présumés, parmi les sept identifiés, ont été reconnus coupables de «viol et coups et blessures volontaires avec armes blanches» et condamnés à 15 années de réclusion criminelle. Contre ceux en fuite, une peine de 20 ans de réclusion a été prononcée par contumace. Il y a une année, l'histoire de Marie-Simone, une jeune migrante camerounaise de 33 ans, avait bouleversé l'opinion publique et suscité de nombreuses réactions de solidarité. Le visage tuméfié, Marie-Simone apparaît dans une vidéo, racontant l'horreur qu'elle a vécue en cette nuit du 1er octobre 2015. Au moins sept individus, armés de couteaux et avec des chiens, l'ont accostée au quartier Coca, situé à la périphérie d'Oran, alors qu'elle était en compagnie d'une de ses compatriotes, qui arrive à prendre la fuite. Malheureusement, Marie-Simone n'a pas eu cette chance. Elle est traînée par ses agresseurs vers un parking de voitures et autocars pour être sauvagement battue, violée, délestée de son téléphone mobile, d'une chaîne en or et d'une somme d'argent qu'elle portait sur elle avant d'être abandonnée sur la chaussée, inconsciente. Son accompagnatrice donne l'alerte et son mari arrive peu après sur les lieux. Malgré son état de détresse, Marie-Simone se voit refuser les soins dans plusieurs hôpitaux et cliniques où son époux l'a emmenée et ne pouvait, de ce fait, se faire délivrer un certificat attestant de son agression. A la brigade de gendarmerie de Yaghmorassen, dont dépend la localité où a eu lieu le viol, Marie-Simone et son mari sont soumis à un interrogatoire sur leur situation irrégulière, avant d'être sommés de quitter les lieux. La victime ne se laisse pas faire. Elle diffuse un témoignage poignant sur les réseaux sociaux, suscitant une large mobilisation de la société civile en sa faveur, ce qui pousse les autorités judiciaires à ouvrir une enquête. Le 15 octobre 2015, 12 associations, ONG internationales et collectifs ont lancé une pétition dans laquelle ils ont dénoncé ce qu'ils ont qualifié de «pratiques récurrentes de déni de dépôt de plainte» et interpellé à ce titre aussi bien le ministre de la Justice que celui de l'Intérieur. L'enquête sur l'agression commence à donner des résultats. Parmi les sept suspects identifiés par la victime, trois sont arrêtés et déférés devant le tribunal criminel près la cour d'Oran. Lors du procès, qui s'est tenu jeudi dernier, les accusés ont évidemment nié les faits, mais le représentant du ministère public a requis une peine de 20 ans de réclusion criminelle à leur encontre. Mise en délibérée, l'affaire connaît son épilogue avec une condamnation de 15 années de réclusion contre les trois jeunes du quartier Coca, reconnus ainsi coupables des faits de «viol et agression avec armes blanches». Quatre autres accusés, en fuite, ont été condamnés par contumace à une peine de 20 ans de réclusion criminelle. Marie-Simone ne pouvait être présente au procès et mise une seconde fois face à ses bourreaux. Le souvenir de cette tragique nuit est toujours vivace et les blessures encore béantes. Son avocat a longuement insisté sur le traumatisme dont elle souffre. Trop clément pour certains et trop sévère pour d'autres, ce verdict n'a été rendu possible que grâce à la mobilisation de la société civile, mais surtout au courage de Marie-Simone, qui a osé dénoncer ses agresseurs malgré sa situation vulnérable de migrante et surtout la loi de l'omerta imposée à sa communauté, confrontée au racisme et à la violence.