Ainsi, «tel est pris qui croyait prendre.» Ce proverbe s'applique parfaitement au royaume du Maroc qui, en tentant d'exclure le Sahara occidental du Sommet afro-arabe tenu à Malabo, la capitale de la Guinée équatoriale, s'est piégé lui-même. A quelques semaines du sommet de l'Union africaine (UA) qui doit décider du sort de sa demande d'adhésion introduite l'été dernier, le Maroc joue et perd lourdement. En effet, son geste commis à la veille de l'ouverture des travaux de la conférence afro-arabe, en ameutant toutes les monarchies arabes du Golfe contre la RASD, a produit l'effet contraire. Non seulement les pays africains n'ont pas quitté la réunion qui n'a pas été annulée, comme le voulaient le Maroc et ses alliés, mais le Sahara occidental a engrangé un succès important au niveau continental : un soutien africain indéfectible. Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'UA, rapporte l'agence APS, ont effectivement dénoncé «cette manœuvre» marocaine tout en réaffirmant «leur attachement à l'Acte constitutif de l'UA et leur soutien à la cause sahraouie». «Le Sahara occidental est membre à part entière et jouit de ses pleins droits que lui confère l'Acte constitutif de l'UA», a indiqué le représentant de l'Ethiopie. Ce dernier est soutenu également par les représentants de l'Afrique du Sud et de la Namibie, qui ont souligné que «la cause sahraouie est pour l'Afrique ce que la cause palestinienne est pour le Monde arabe, et sa sacralité (de la question sahraouie) relève des principes de l'UA». Tenu pour la première fois en Afrique, le Sommet afro-arabe était pour le Maroc une aubaine pour tenter de gagner des points sur le continent. Mais il n'a été suivi que par ses alliés traditionnels en Asie. Car à part les monarchies pétrolières du Golfe, aucun autre pays arabe ne s'est retiré de la réunion. Même la Somalie, annoncée la veille comme faisant partie des soutiens marocains, n'a pas quitté la réunion. Un engagement fort de l'UA A cette occasion, les membres de l'UA, qui ont insisté sur la participation de la RASD aux travaux du sommet, signent un engagement fort et lourd de conséquences. Il s'agit de la décision de «ne pas prendre part à des événements que manquera le Sahara occidental». En tout cas, ce 4e sommet Afrique-Monde arabe a «été témoin de l'isolement total du Maroc sur le plan africain». «Il a révélé que la politique de colonisation, d'expansion et d'annexion par la force de terres voisines ne figure pas dans le dictionnaire africain contemporain dicté par les principes et idéaux de liberté, d'indépendance, d'autodétermination et de souveraineté», soutient le ministère sahraoui des Affaires étrangères dans un communiqué. Et d'ajouter : «La position des pays africains est en accord avec les valeurs communes de l'UA qui rejettent toute atteinte à l'intangibilité des frontières héritées de l'indépendance, l'annexion de territoires par la force et l'expansionnisme et sacralisent les droits des peuples à l'autodétermination et à l'indépendance.» Le soutien africain à la RASD est réaffirmé également par la présidente de la commission de l'UA, Mme Dlamini Zuma : «Nous continuerons à soutenir les peuples palestinien et sahraoui jusqu'à ce qu'ils recouvrent leurs droits nationaux.» Le Maroc rate le test avant l'examen de janvier En désaccord avec l'Arabie Saoudite depuis quelques semaines, l'Egypte qualifie «la décision marocaine de faux pas politique». Dans une déclaration au quotidien égyptien Al Watan, Ahmed Hacene Rakha, membre du conseil égyptien des Affaires étrangères et ancien vice-ministre des Affaires étrangères, dénonce aussi ceux qui ont poussé le Maroc à prendre cette décision : «Ceux qui ont dicté au Maroc de se retirer dans le but d'exercer une pression sur l'Union africaine (UA) doivent savoir que les Africains ne tolèrent pas une telle attitude, et que cela influerait négativement sur l'image des Arabes chez les Africains qui nous considéreront comme des royaumes agissant par complaisance.» Ces réactions confirment que le Maroc rate un test important avant le prochain sommet de l'UA appelé à trancher sur la demande du royaume d'intégrer l'UA, 32 ans après avoir claqué la porte de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), l'ancêtre de l'UA, en 1984. Les 54 membres de l'UA considéraient, en effet, cette conférence comme «un test» pour vérifier le «sérieux» du Maroc et son «engagement» à respecter les principes directeurs de l'UA. Le geste de Malabo ne fera qu'accentuer son isolement en Afrique, en réduisant à néant tous les efforts de lobbying tenté par le roi Mohammed VI. Ce dernier, rappelons-le, a entrepris, en octobre dernier, un périple dans le continent noir pour, sans doute, essayer de recueillir des soutiens en faveur de son entrée dans l'UA.