En proposant à la Présidence le député de Tizi Ouzou, Saïd Lakhdari, pour figurer dans le prochain gouvernement, Mohamed Larbi Ould Khelifa a déclaré la guerre à Mohamed Djemaï», explique un membre du FLN, sous le couvert de l'anonymat. Pour plusieurs députés de la majorité, le différend entre les deux hommes n'a rien à voir avec l'exclusion du député Nacer Latrache de la délégation en partance pour Pékin. Cest plutôt lié à la décision du président de l'APN de refuser de proposer aux services de la Présidence le député de Tébessa et homme fort du parti, à la tête d'un ministère. Une décision vécue comme une attaque personnelle, alors que le président du groupe parlementaire à l'APN n'a jamais caché ses ambitions ministérielles. En privé, il ne cachait pas son amertume et sa colère après la désignation de Mohamed Khaoua, puis celle de Ghania Idalia, au poste de ministre en charge des Relations avec le Parlement, alors que le poste lui avait été promis par l'ancien secrétaire général du parti, Amar Saadani. Ce revers avait à l'époque porté un coup aux relations entre les deux hommes. Mardi, le député de Tébessa a décidé de porter l'estocade et de se venger. Il a choisi une séance plénière consacrée à l'examen du projet de loi sur la sécurité routière pour croiser le fer avec Larbi Ould Khelifa. «Mohamed Djemaï n'a pas supporté l'offense qui lui a été faite et a décidé de se venger en humiliant le président de l'APN devant tous les députés et en présence de la presse, mais cela s'est retourné contre lui», explique un ancien vice-président de l'APN. Cette passe d'armes entre les deux membres du comité central intervient alors que le patron de Starlight sort affaibli par le changement à la tête du FLN. Depuis l'arrivée de Djamel Ould Abbès, plusieurs députés ont pris leurs distances. Quand le président du groupe FLN leur a demandé de quitter la salle, seuls quelques-uns ont répondu à son appel. «Mohamed Djemaï est affaibli par le départ de Saadani, affirme un député FLN. En intervenant comme il l'a fait, il voulait faire croire qu'il était encore le patron, l'homme fort à l'APN.» «Jamais Ould Khelifa n'aurait agi de la sorte si Amar Saadani était encore en poste, peste pour sa part un proche du président du groupe parlementaire FLN. Chacun se souvient qu'il accourait au siège du parti quand l'ex-secrétaire général voulait le voir.» Une allusion aux déplacements du troisième personnage de l'Etat au siège du parti, à Hydra, pour rencontrer le secrétaire général de l'époque, alors que les us et coutumes protocolaires voudraient que ce soit l'inverse. Mais mardi dans l'hémicycle du Parlement, celui que certains députés de la majorité surnomment «Aïn El Hammam» en référence à sa région natale, mais également pour s'entourer d'une équipe issue de la même ville, a ostensiblement marqué sa défiance à l'égard du président du groupe parlementaire FLN, Mohamed Djemaï, en déchirant le papier qu'il lui avait fait parvenir. Un geste que beaucoup jugent comme le signal d'un large remaniement parmi les députés FLN pour les prochaines législatives. «Quand on connaît le personnage, personne ne peut imaginer que le président de l'APN a agi seul, explique un député. Il a reçu l'ordre de mettre fin aux agissements de certains députés du parti et de reprendre en main l'APN.» Entre Mohamed Djemaï et Larbi Ould Khelifa, la guerre risque de connaître les prolongations lors du vote du projet de loi sur les retraites.