La crainte, nous avertissent nos contacts à Tunis, reste l'agression perpétrée par des hommes de main et maquillée ensuite en fait divers. Ce fut le cas pour l'envoyé spécial du quotidien français Libération, Christophe Boltanski, en novembre 2005, à Tunis, alors que se tenait dans cette ville le Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI) : le 11 novembre 2005, dans la soirée, Boltanski a été agressé et poignardé dans le dos, à proximité de son hôtel, dans le quartier des ambassades de Tunis. Les agresseurs lui ont volé ses affaires, notamment ses carnets de notes, son téléphone et sa clef USB. Selon l'ONG Reporter sans frontières (RSF), Christophe Boltanski a tenté d'obtenir de l'aide de policiers tunisiens en faction devant l'ambassade de Tchéquie, mais ces derniers n'ont pas réagi. Les agresseurs ont, par ailleurs, mystérieusement disparu dans un quartier tout particulièrement quadrillé par la police. De même, un policier tunisien, venu quelques heures plus tard voir le journaliste à son hôtel, a refusé d'enregistrer sa plainte. Le jour même de l'agression, Christophe Boltanski signait dans les colonnes de Libération un article intitulé « Manifestants tabassés par la police à Tunis » dans lequel il relatait le passage à tabac par des policiers tunisiens de militants des droits de l'homme qui tentaient d'organiser une manifestation de solidarité avec sept personnalités de l'opposition qui observent une grève de la faim depuis le 18 octobre dernier. Plus récemment, deux journalistes tunisiens, Slim Boukhdir et Taoufik Al Ayachi, ont été passés à tabac, le 16 août 2006, alors qu'ils se rendaient chez Samia Abbou, l'épouse du célèbre avocat et cyberdissident Mohammed Abbou, afin d'y réaliser une interview. Un important dispositif de police est, en effet, déployé autour de son domicile depuis qu'elle a mené, le 13 août, une grève de la faim pour demander la libération de son mari, selon RSF qui donne plus de détails : « En arrivant aux abords du domicile de la famille Abbou, Slim Boukhdir, journaliste au quotidien Al Chourouk et correspondant à Tunis du site internet de la chaîne Al Arabiya, ainsi que Taoufik Al Ayachi, journaliste de la chaîne de télévision Al Hiwar qui émet depuis l'Italie, ont été pris à partie par une douzaine de policiers qui les ont battus. La caméra de Taoufik Al Ayachi a été confisquée tandis que Slim Boukhdir réussissait malgré tout à entrer chez Samia Abbou. Il a été appréhendé à sa sortie puis emmené à l'écart pour être tabassé une nouvelle fois. »