Un procès d'ordre criminel marque par nature les annales judiciaires. Celui du dictateur irakien laissera tout le monde sur sa faim. Certes, Saddam Hussein est un sanguinaire qui ne mérite aucune pitié. Dans l'histoire de l'humanité, aucun dictateur n'a autant fait de mal à son peuple comme Hitler a mis à feu et à sang l'Europe, massacré des millions de personnes, mais il ne s'est pas attaqué à ses concitoyens avec la même barbarie de Saddam Hussein à l'égard des Irakiens. Un homme que même son gendre n'a pas échappé à sa fureur destructrice. La condamnation à mort par pendaison n'apaisera pas les cœurs et n'apportera pas de réponses aux questions que l'on se pose. Son exécution contribuera-t-elle à rendre sa sérénité au peuple irakien et à restaurer la paix dans un pays meurtri et dévasté depuis l'invasion américaine ? Ses partisans vont-ils au contraire chercher à se venger en provoquant davantage de chaos afin d'aboutir à la disparition définitive de l'Irak en tant qu'Etat ? C'est malheureusement ce qui risque d'arriver et ses avocats ont même parlé « d'ouverture des portes de l'enfer » après l'énoncé du verdict. Les Américains ont intérêt à voir disparaître cet homme de la surface de la planète. Il pourrait même devenir un enjeu électoral à la veille du vote de renouvellement des deux chambres des Etats-Unis, le 7 décembre prochain. Les républicains de George W. Bush, en nette perte de vitesse dans les sondages, penseront peut-être récupérer le terrain perdu en exerçant des pressions afin que Saddam Hussein soit pendu le plus tôt possible. C'est à ce prix qu'ils croiront récupérer leur électorat. Mais surtout, l'ancien maître de Baghdad partageait beaucoup de secrets avec les républicains. Il avait, entre autres, reçu les encouragements américains lorsqu'il avait envahi l'Iran en 1980. Pour cela, ils lui avaient même fourni des armes et surtout des armes chimiques prohibées. Il s'était même lié d'amitié avec un certain… Ronald Rumsfeld, à l'époque secrétaire de la Défense de Ronald Reagan. Saddam Hussein est ainsi devenu un témoin gênant qu'il faut faire taire à jamais. D'ailleurs, l'un des principaux dirigeants irakiens avait annoncé la couleur, il y a de cela quelques mois, en affirmant que si l'ancien dictateur est condamné à la peine capitale, il faut appliquer rapidement la sentence, sans avoir besoin d'ouvrir d'autres dossiers à son sujet, comme par exemple faire la lumière sur les rapports privilégiés qu'il avait entretenus avec Washington dans les années 80. Dans toute cette affaire, le problème réel, c'est-à-dire l'avenir du peuple irakien, semble ne pas beaucoup compter sur la balance.