Le temps n'est plus pour la lutte conventionnelle contre la toxicomanie. Il faut se pencher sérieusement sur la prévention à long terme mais surtout mettre en place dans l'immédiat un plan de prise en charge pour les toxicomanes en détresse », estime le docteur Abdellah Benarab, président de l'Association pour la lutte contre l'alcoolisme et la toxicomanie (ALAT) lors d'une rencontre avec la presse. Il dira aussi : « Le fléau de la toxicomanie prend des proportions graves. Tout le monde le sait et le perçoit quotidiennement à travers une croissance horrible de la délinquance mais personne ne semble agir pour venir en aide à ces toxicomanes qui ne savent plus où aller pour se débarrasser d'un mal dont ils sont réellement conscients. » Le constat révélé par une étude réalisée par l'ALAT dans les quartiers de l'Emir Abdelkader (ex-Faubourg Lamy), la vieille ville et Boudraâ Salah, est pour le moins surprenant. Le choix des lieux est délibéré, pour des raisons connues par le commun des Constantinois. Sur 215 cas mis sous la loupe, suivant les critères de toxicomanie, de suivi médical, du milieu social et de l'état psychiatrique, et classés en quatre stades de gravité croissante, on note que 58 % d'entre eux sont des polytoxicomanes, 24% des consommateurs réguliers de cannabis, contre 11 % pour les psychotropes. La proportion des jeunes parmi les toxicomanes étudiés est plus grande. De fait, 52% sont âgés entre 18 et 30 ans, alors que 27 % se situent dans la tranche des 30-40 ans. L'étude révèle aussi que 20 % de ces toxicomanes ont été des candidats au suicide, soit par médicaments dans le tiers des cas ou par incisions des poignets et automutilation dans le reste. Trois cas graves ont été rencontrés sur le terrain dont un à Boudraâ Salah et deux autres dans la vieille ville. Des personnes qui nécessitent une prise en charge urgente, à l'instar de plusieurs cas qui risquent de sombrer encore dans la toxicomanie faute d'une structure d'accueil. Dans ce sens, le président de l'ALAT déclare : « On ne peut pas concevoir qu'une wilaya de la dimension de Constantine ne dispose pas d'une structure qui peut accueillir des toxicomanes conscients de leur état, et qui désirent se soigner. » Dans les textes de loi, les toxicomanes qui émettent ce désir sont considérés comme des malades. Ces derniers ont besoin d'une insertion sociale sans omettre les bienfaits du volet familial et affectif. « Nous devons sauver et protéger au moins cette population qui a besoin de soins psychiatriques et psychologiques », affirme le conférencier. Il insiste sur la nécessité d'ouvrir au moins des centres de consultation dans les quartiers difficiles avec des noyaux de psychologues et d'assistantes sociales pour encourager les gens à venir dans une première étape. Cela en attendant une mise en place d'une équipe spécialisée au centre de désintoxication de l'EHS Djebel Ouahch avec des moyens plus importants.