L a justice a infligé un camouflet à Donald Trump en maintenant la suspension de son décret très controversé limitant l'immigration. L'appel du gouvernement est «rejeté», ont écrit jeudi les trois juges de la cour d'appel de San Francisco dans leur décision prise à l'unanimité, insistant sur la nécessité de protéger «l'intérêt général». Le gouvernement n'a pas démontré que le maintien de la suspension du décret se traduirait par de graves atteintes à la sécurité des Etats-Unis, ont-ils conclu. Le décret signé le 27 janvier interdisait l'accès aux Etats-Unis pour trois mois aux ressortissants de sept pays musulmans et pour quatre mois aux réfugiés. Une interdiction illimitée dans le temps pour les Syriens. «Rendez-vous au tribunal, la sécurité de notre nation est en jeu !» a tweeté le président américain. Plus tard devant des journalistes, il a qualifié la décision de «politique». «C'est seulement une décision qui vient de tomber, mais nous allons gagner le dossier», leur a-t-il affirmé, selon la chaîne NBC. Cette mesure présentée comme nécessaire pour lutter contre le terrorisme est la plus emblématique de son début de mandat. Après seulement trois semaines à la Maison-Blanche, il subit donc un revers politique majeur et se retrouve entraîné dans une bataille judiciaire qui promet d'être longue. Le camp présidentiel a maintenant 14 jours pour demander à la cour d'appel de «reconsidérer» son arrêt ou faire monter l'affaire à la Cour suprême. Les juges William Canby, Richard Clifton et Michelle Friedland ont souligné que le gouvernement n'avait «pas fait la preuve qu'un étranger d'un des pays incriminés a perpétré un attentat aux Etats-Unis» par le passé. Le décret, qui suspend l'entrée aux Etats-Unis des ressortissants d'Iran, Irak, Yémen, Soudan, Somalie, Syrie et Libye avait été bloqué temporairement, vendredi 3 février, par un juge de Seattle, dans l'Etat de Washington, le temps qu'une plainte déposée par le ministre de la Justice de cet Etat soit examinée. Cette mesure, décriée dans le monde entier, avait dans les jours suivant sa promulgation, provoqué le chaos dans les aéroports américains et déclenché des manifestations dans tout le pays. «Personne n'est au-dessus de la loi, pas même le Président», s'est réjoui Jay Inslee, gouverneur de l'Etat de Washington, qui avait contesté ce décret en justice. Les déboires de Donald Trump ne s'arrêtent pas là. Une de ses proche conseillères a provoqué jeudi une nouvelle controverse sur les conflits d'intérêts à la Maison-Blanche en appelant à acheter les produits de la fille aînée du Président, retirés de la vente par une grande enseigne. «Allez acheter les produits d'Ivanka. Je déteste faire les courses, mais je vais aller en acheter aujourd'hui», a lancé sur la chaîne Fox Kellyanne Conway, depuis la Maison-Blanche. «C'est juste une ligne magnifique. J'en possède moi-même (des produits). Je vais faire de la publicité gratuite : allez tous en acheter aujourd'hui, vous pouvez en trouver en ligne !» a ajouté la responsable dans une salle ornée du sceau officiel de la Maison-Blanche. La conseillère du Président entendait ainsi répliquer à l'annonce, la semaine dernière, par la chaîne de magasins Nordstrom qu'elle cesserait de vendre la ligne de vêtements et d'accessoires d'Ivanka Trump. Cette décision avait déjà provoqué, mardi, la colère du président américain qui s'était précipité sur twitter pour dénoncer le traitement réservé à sa fille aînée. «Ma fille Ivanka a été traitée de manière si injuste par Nordstrom», avait écrit M. Trump, alimentant de nouveau les soupçons de mélange des genres entre intérêts commerciaux, politiques et familiaux. Plusieurs démocrates avaient dénoncé une sortie «inappropriée» du milliardaire, et la nouvelle offensive de Mme Conway n'a fait qu'ajouter à leur colère jeudi. «Les déclarations de Mme Conway semblent être une violation des règles d'éthique fédérales», ont écrit le président républicain d'une commission du Congrès, Jason Chaffetz, et le démocrate Elijah Cummings dans un courrier au Bureau pour l'éthique gouvernementale, lui demandant d'examiner l'affaire et de procéder à des recommandations.