Vêtements, couvertures, nourriture et même le logement sont des aides données par des groupes, collectifs et associations caritatives aux personnes nécessiteuses. Ces dernières sont nombreuses à réclamer de l'assistance. Si les autorités concernées brillent par leur absence, les citoyens algériens sont de plus en plus sensibles au cri de détresse de leurs frères et sœurs, qui, dans la plupart des cas, manquent de tout. Le développement des réseaux sociaux et la création des pages sur Facebook, voire des sites dédiés à l'action sociale, ont facilité le contact entre les Algériens et ont permis de révéler le degré de misère que subissent de nombreux citoyens. Ils sont nombreux à s'engager dans les actions humanitaires : mobilisation au niveau des quartiers, création de collectifs ou carrément d'associations à caractère humanitaire, en raison de la nouvelle loi sur les associations, qui exige de ces dernières de disposer d'un compte bancaire pour la collecte de l'argent. Les jeunes sont de plus en plus impliqués. Ils se mobilisent dans les quatre coins du pays et répondent présent à l'appel d'une veuve et de ses orphelins, d'une veille personne qui vit seule ou d'une personne malade. L'engouement de ces jeunes est très visible. «Ils (les jeunes ndlr) veulent faire du bien, être positifs dans la vie et surtout être fiers d'eux-mêmes», estime Lyes Fillali, président de Ness El Khir Alger. Par ailleurs, les appels à l'aide se multiplient. «Avec la multiplication de ces actions, les gens font de plus en plus attention. Les bienfaiteurs sont prudents, car on vit dans un milieu pourri. L'arnaque est partout», dénonce M. Fillali. Pour rappel, l'association Ness El Khir est arrivée au bout de six ans d'existence à intervenir et à aider les gens dans les différentes régions du pays, même les plus reculées. A l'occasion, M. Fillali revient sur l'expérience de son association et insiste sur les difficultés rencontrées sur le terrain, notamment la suspicion qui règne sur le travail associatif. «La société civile n'est pas structurée et on veut le faire. On doute de tout ce qui bouge», déplore ce bienfaiteur, regrettant par là même les interpellations et les interrogatoires que subissent les jeunes militants lorsqu'ils acheminent les aides (couvertures, denrées alimentaires) vers les zones montagneuses. Pourtant, certaines populations de ces zones n'ont vu aucun représentant de l'Etat venir s'enquérir de leur situation. «Nous avons aidé des gens dans une région montagneuse de la wilaya de Chlef. Ces gens n'ont vu aucun responsable de l'Etat depuis l'indépendance», révèle M. Fillali. La collecte de l'argent pose problème En dépit de tous ces obstacles, l'association Nes El Khir ne baisse pas les bras, ses représentants mettent en contact les bienfaiteurs et les personnes nécessiteuses, notamment lorsqu'il s'agit de la collecte de l'argent. «Nous donnons directement le numéro de CCP de la personne nécessiteuse», explique notre interlocuteur. D'autres groupes de bienfaiteurs s'abstiennent carrément de la collecte de l'argent, à l'instar du collectif de l'Ecole des réfugiés de Tizi Ouzou, qui a refusé des sommes d'argent à cause de l'absence d'un cadre légal (se structurer en association, avoir l'agrément et un compte bancaire). Ce groupe d'étudiants s'est contenté de la collecte de vêtements, couvertures et de l'alimentation qu'ils ont redistribués aux réfugiés subsahariens se trouvant dans la région de Tizi Ouzou en cette période d'hiver. L'idée de la création du collectif de l'Ecole des réfugiés est venue lorsqu'un groupe d'étudiants s'est rendu compte que des enfants subsahariens sont exploités dans la mendicité. Pis encore, certains ont été ramenés de leur pays, ont traversé le désert et sont arrivés jusqu'au nord de l'Algérie sans être accompagnés par leurs parents. Des enfants, qui vivent loin de leurs parents, exploités par des réseaux de mendicité pour leur collecter de l'argent. Le cas de la petite Aziza est effarant. Percutée par un véhicule, Aziza, qui avait une jambe cassée, a été emmenée à l'hôpital. «Les médecins ont refusé de prodiguer des soins à cette mineure en l'absence de ses parents. Ces derniers sont au Niger», révèle Nabil Ouldhadj, membre du collectif de l'Ecole des réfugiés. Face à cet embarras, des citoyens se sont mobilisés pour qu'enfin Aziza soit prise en charge. Il reste sa convalescence, Aziza n'a pas où aller. Avec une jambe plâtrée, elle est exposée comme tous les enfants subsahariens au froid glacial, aux averses et toutes formes de danger. L'Ecole des réfugiés avait comme idée au départ d'enseigner la langue pour faciliter l'adaptation de ces enfants. Mais durant cet hiver, le collectif a arrêté les cours qu'il donnait en plein air et a recentré ses efforts sur la collecte des dons pour aider les réfugiés. Ces jeunes étudiants, qui sont en contact avec les enfants subsahariens, avancent qu'il y a ceux qui collectent parfois jusqu'à 4000 DA par jour. «Cet argent va dans les poches des membres de ce réseau», estime-t-il. Le collectif d'étudiants a pour objectif de sensibiliser l'opinion sur la situation de ces enfants exploités et de faire pression sur les autorités pour les protéger mais surtout les scolariser. «Nous lançons un appel aux autorités afin de prendre soin de ces enfants et de les protéger de ce réseau qui les exploite», ambitionne M. Ouldhadj. «Les Algériens sont généreux. L'essentiel pour eux est de trouver des organismes honnêtes qui acheminent les dons aux personnes nécessiteuses», confie Brahim Benabdelmalek, président de Ness El Khir de Chlef. Même constat de côté de Tizi Ouzou. «Nous n'arrivons pas à suivre la cadence de ces dons. Nous avons un seul véhicule et nous avons réellement trois membres actifs», témoigne Younès Ali-Slimane, membre du collectif de l'Ecole des réfugiés. Ce dernier lance un appel aux associations qui sont bien structurées afin d'aider à la redistribution de ces dons, bien que l'aide n'était pas la mission initiale de l'Ecole des réfugiés, comme son nom l'indique. Les cas des personnes dans le besoin, qui ne trouvent pas d'écho, demeurent les malades nécessitant des prises en charge dans des hôpitaux à l'étranger. «Lorsqu'il s'agit de petites opérations chirurgicales coûtant jusqu'à 10 millions de centimes, on trouve toujours des donneurs. Mais pour ce qui est de celles coûtant des centaines de millions, voire plus, on n'est pas l'Etat», considère M. Fillali. Ce dernier soulève également un autre problème relatif à l'achat des quantités de produits. «Quand notre association tente d'acheter un produit, les grossistes refusent de lui donner la facture», regrette-t-il. Autre embûche ! Certaines associations caritatives n'ont pas de siège, d'où la difficulté d'organiser leurs actions.