La campagne de vaccination contre la rougeole et la rubéole, officiellement lancée hier dans les établissements scolaires du primaire et du moyen, a globalement été rejetée par les parents d'élèves. Des rumeurs faisant état de cas d'hospitalisation parmi les élèves vaccinés ont fini par compromettre une opération marquée, dès le début, par un déficit de communication. La première journée de la campagne de vaccination a été caractérisée par «un rejet quasi général» de la part des parents d'élèves. Non convaincus par les explications fournies par le ministère de la Santé et craignant les effets secondaires, les parents que nous avons rencontrés, hier à la sortie des classes, ont plus d'un argument pour refuser le vaccin. Les informations communiquées dès la matinée par l'Association nationale des parents d'élèves sur l'évacuation de 4 élèves scolarisés dans la commune de Bab Ezzouar, vers la polyclinique de la cité 5 Juillet de la même commune, ont accru la panique de tout le monde. «Le président de l'Association nationale des parents d'élèves précise que l'association attend toujours de savoir si les symptômes de fièvre et de faiblesse dont souffraient ces élèves sont ordinaires ou il s'agit de complications.» L'organisation dénonce également le silence du ministère de la Santé et autres autorités sanitaires sur ces cas. Les carnets de vaccinations déposés au niveau des établissements scolaires ont été réclamés par les parents qui ne veulent plus accepter la vaccination de leurs enfants. «Nous ne savons même pas de quoi il s'agit, pourquoi l'avoir programmé (le vaccin). Les autorités sanitaires n'ont même pas pris la peine d'organiser une campagne de sensibilisation par voie de médias lourds», dénonce la mère d'une élève scolarisée à l'école primaire Mohamed Mada à Sidi M'hamed. «Tout ce que j'ai compris des informations que j'ai obtenues, c'est que ma fille ne rate rien si elle ne se fait pas vacciner.» C'est la position de tous les parents d'élèves interrogés devant le CEM Aïssat Idir de la même commune. Aucun des parents d'élèves interrogés n'a déclaré avoir donné son accord pour la vaccination. Selon les informations recueillies auprès de ces établissements, le nombre des élèves qui se sont fait vacciner durant la journée d'hier ne dépasse pas les quatre par classe. L'argument que ne cessent d'avancer ces parents réticents est que «le rapport de confiance est brisé avec le ministère de la Santé, suite au décès, en 2016, de plusieurs nourrissons après avoir été vaccinés au pentavalent». A ce jour, les conclusions de la commission d'enquête n'ont pas été rendues publiques. «Le ministère de la Santé, qui au début avait nié tout rapport entre la mort des nourrissons et le nouveau vaccin pentavalent, a fini par retirer ce vaccin du calendrier national sans rendre compte de la situation», s'insurge le père d'un garçon scolarisé au primaire Mohamed Mada. Le pentavalent et le fantôme des nourrissons décédés «Nous ne sommes pas des ignorants, nous savons ce que veut dire un vaccin, mais nous refusons que nos enfants soient exposés à un quelconque risque», insistent des parents. D'autres ne manquent pas en effet de rappeler les décisions «contradictoires et peu professionnelles» du même département, comme l'autorisation de la commercialisation en tant que médicament d'un complément alimentaire par un herboriste présenté comme médecin avant que le produit ne soit interdit ! Le questionnaire adressé avant le lancement de la campagne de vaccination par les chefs des établissements scolaires aux parents a également influencé la décision de ces derniers. «Nous ne savons même pas si ce vaccin est obligatoire ou facultatif. Car si les autorités censées protéger la santé publique consultent les parents, c'est qu'il y a quelque part un risque à assumer», soutiennent plusieurs parents rencontrés devant des établissements à Alger. Le Syndicat national des praticiens de santé publique (Snpsp) estime, par la voix de son président Lyès Merabet, que la programmation dans «la précipitation» de cette campagne de vaccination «est en train d'installer la peur de la vaccination qui est en soi un fait grave». Pour le Dr Merabet, «ce climat de peur» résulte de la mauvaise préparation de la campagne, que ce soit au niveau de la logistique ou en matière d'information du corps de la santé qui doit assurer cette campagne, ou bien en matière de vulgarisation et de sensibilisation à l'adresse du grand public destinataire de cette campagne. Khaled Ahmed, président de l'Association des parents d'élèves, révèle que, vers la fin de la journée d'hier, «le nombre des élèves ayant été vaccinés est très faible».Il préconise aux parents de ne prendre en considération que l'avis d'un médecin «auquel ils font confiance». La campagne de vaccination se poursuivra jusqu'au 15 mars et concerne tous les élèves des cycles primaire et moyen.