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«Le retour de notre public nous pousse à travailler davantage»
Chemseddine Abacha. Chanteur et compositeur du groupe Freeklane
Publié dans El Watan le 18 - 03 - 2017

Après l'album à succès Lalla Mira, en 2013, le groupe Freeklane vient de signer, aux éditions Papidou, son deuxième album intitulé Nomad. Dans cet entretien, le leader du groupe, Chemseddine Abacha, éclaire les lecteurs sur ce dernier-né.
Vous avez clôturé l'année 2016 avec la sortie d'un deuxième album, Nomad, qui se caractérise par un métissage de styles musicaux ?
Nomad n'est autre que le deuxième album de notre groupe, sorti le 28 décembre 2016. Ce nouvel album nous a pris trois années de recherche, d'écriture, de composition et d'arrangements. C'est un travail qui nous a pris, également, une année au studio avec plusieurs thématiques différentes. Le titre choisi, Nomad, renvoie à notre quête d'une liberté musicale absolue. J'ai signé l'intégralité des onze titres que compte cet album.
Il s'agit d'un album qui a été enregistré en Algérie et en France, notamment dans un studio français, pour le mixage et le mastering. Je dirais, sans prétention aucune, que c'est un album de la maturité. Nous avons essayé de mettre tout ce que nous avons appris d'une façon un peu subtile. On apprend beaucoup de choses, mais il faut toujours rester dans le simple, dans l'optique que le public a aimé la première fois. C'est dans la simplicité, mais on a essayé de faire en sorte que notre harmonie soit celle qui montre que le groupe a tracé son parcours et a appris beaucoup de choses.
Les thèmes que vous avez abordés sont aussi divers que variés...
Concernant les thèmes que nous avons abordés, je dirai que c'est vraiment dans un équilibre que peut vivre l'individu algérien. C'est d'ailleurs, comme dans le premier album, entre joie, mélancolie et problèmes sociaux. Nous avons essayé d'être dans un équilibre pour canaliser l'énergie du jeune Algérien vers quelque chose de positif, de poser des problématiques pour proposer des solutions. Nous avons parlé d'amour, de la société, de l'identité à travers la chanson Amazighia, qui a annoncé la sortie de l'album, quinze jours à l'avance avec le clip Amazighia, tourné à Tamanrasset. Ce sont des thématiques nouvelles et d'actualité à la fois. Nous essayons d'être actuels dans ce qu'on dit dans nos textes et d'essayer, surtout, de parler de tout ce qui peut entourer l'Algérien.
Si vos textes sont exhumés d'une réalité algérienne certaine, il n'en demeure pas moins que vous êtes restés fidèles à certains instruments musicaux ?
Effectivement, nous sommes restés fidèles aux instruments musicaux que nous avons utilisés pour le premier album. Nous avons utilisé, essentiellement, ce que nous avons comme instruments, entre autres, les guitares, la basse, la batterie, le piano, ajouté à cela les voix. Parfois, on trouve des intervenants qui viennent enregistrer avec nous. Comme dans la chanson Souk — qui sera tournée, prochainement, en clip — où on trouve une touche de mandole et de banjo. Ce sont des instruments qu'on utilise par rapport à l'esprit de la chanson elle-même. Comme pour le premier album, nous avons invité des artistes. Dans la chanson Awah awah, nous avons invité Mohamed Rouane, qui a joué un thème au mandole pour nous. Donc, on a fait la même chose pour cet album, mais d'une façon différente, et ce, en fonction des titres.
Votre groupe s'est créé à l'université voilà plus de dix ans ?
C'est un groupe qui a vu sa naissance à l'université. Ce sont de jeunes étudiants universitaires qui se sont retrouvés et connus grâce à la musique. C'est une passion commune, qui a fait qu'ils sont devenus amis, à l'INPS de Ben Aknoun. A partir de là, nous avons fondé le groupe Freeklane, en 2007. J'avais proposé le nom Freeklane. On l'a accepté. En 2011, le groupe a eu de nouvelles recrues comme musiciens. Du coup, nous sommes devenus un groupe complet. Nous avons commencé à répéter sérieusement. Nous sommes passés par la suite à la radio. Nous avons essayé d'exposer ce que nous avions comme matière. Et du coup, le public a apprécié notre musique et continue de l'apprécier.
Votre musique s'inspire-t-elle du continent africain ?
Notre musique d'une façon générale est algérienne. Après, si on rentre dans les détails, on s'aperçoit que c'est une musique universelle. Un mélange de styles populaires algérien, nord-africain et même occidental, dans un métissage que nous essayons de rendre accessible aux jeunes et moins jeunes. Du coup, c'est parler à une grande majorité de la société, vu que les jeunes d'aujourd'hui sont beaucoup plus branchés sur la musique occidentale. On essaye d'apporter ces touches et ces nuances dans notre musique en gardant toujours le lien avec la génération passée à travers les textes et les styles musicaux.
Justement, quels sont vos artistes de référence ?
Dans mon travail musical, j'essaye de puiser dans tous les styles. La musique universelle est un grand jardin. On essaye de cueillir une fleur de chaque jardin. Si on parle de musique internationale, occidentale, dans le reggae, j'aime beaucoup ce que faisait Bob Marley. Musicalement, c'est quelque chose de très instructif et de trop naïf en même temps. Du coup, on apprend beaucoup de Bob Marley. L'auteur-compositeur et interprète français d'origine espagnole, Manu Chao, fait actuellement de belles choses. Dans le registre de la musique africaine, j'apprécie énormément les chanteurs et musiciens maliens Habib Koité et Salif Keita. Concernant la musique algérienne, c'est une grande école avec tous ses styles musicaux, dont, entre autres, les musiques chaâbie et targuie. Il y a de grands artistes qui ont porté haut la musique algérienne. A notre tour de reprendre le flambeau et de continuer sur ce chemin.
Votre album Nomad a été accompagné par un clip intitulé l'Amazighia, qui a été tourné à Tamanrasset...
L'album a été accompagné d'un clip, l'Amazighia (la Berbère). Il s'agit du premier titre de notre album Nomad. L'idée du clip l'Amazighia, tourné à Tamanrasset, est une idée commune, parce que tous les membres du groupe ont visité cette magnifique région. C'est une wilaya qui est très belle de par sa nature et sa société. Elle ensorcelle plus d'un. Nous avons décidé de laisser une trace dans cette wilaya. Ce qui nous a vraiment motivés, c'est le fait d'avoir l'habitude de voir la nature de Tamanrasset. Nous n'avons pas l'habitude de voir la vie urbaine. Nous avons choisi ce volet-là pour, justement, montrer beaucoup de choses que les gens du Nord ne connaissent pas. Nous avons réalisé ce clip au mois d'avril passé.
Quel est le retour de votre public à l'étranger ?
Nous avons fait beaucoup de spectacles intéressants à l'étranger, notamment en France, en Autriche, au Canada et en Afrique du Sud. La musique est un langage universel. Le public qui ne comprend pas l'arabe réagit par rapport à la musique et au rythme. Il y a bien sûr la communauté algérienne installée à l'étranger, qui comprend notre langue. Ce public-là est toujours présent. Nous avons été à chaque fois surpris par la foule nombreuse venue assister à notre concert. Preuve en est, à Paris, les tickets ont été vendus une semaine avant le concert. C'est un plaisir qui nous pousse à travailler encore plus.
Etes-vous partisan des duos ?
Par rapport à la question des duos, il y a beaucoup de choses qui entrent en jeu. Un artiste a toujours besoin de duo, quand il est en phase d'émergence. Il a besoin de faire des duos avec des têtes d'affiche qui le portent vers le haut. On voit actuellement beaucoup de duos, mais moi je ne suis pas trop chaud pour l'idée de duos entre des artistes qui sont en même temps en train de chercher à briller. Les duos ont souvent un aspect marketing plutôt qu'autre chose. Les têtes d'affiche oui.
D'ailleurs, je lance un appel à tous les grands artistes algériens à aider les jeunes par rapport à cela. Personnellement, j'ai eu une expérience de duo avec le chanteur Madjid Meskoud, à qui je souhaite un prompt rétablissement. Cela a eu un bel impact, car nous avons eu un public nouveau — le public chaâbi ancien — qui ne nous connaissait pas. Dans ce contexte, j'encourage les duos, mais dans un autre contexte, où on se rencontre juste pour faire un duo, je crois qu'il faut que cela soit étudié.
Après la sortie de votre album, quelle est la perspective du groupe Freeklane ?
La perspective du groupe, jusqu'à présent, c'est d'attendre le feed-back de cet album. Après, on est toujours là en train d'essayer d'offrir à notre public de plus beau de ce qu'on puisse offrir. Peut-être que d'ici l'année prochaine vous allez voir un nouveau single du groupe, ou bien une nouvelle aventure du groupe. On est toujours ouverts à une nouvelle expérience. Du coup Nomad n'est pas un album qui va dire voilà on va devoir attendre cinq ans pour voir du nouveau chez Freeklane. Nous sommes dans cette optique de produire un album par an.
C'est plus fort que nous. Notre musique demande beaucoup d'efforts et de temps pour réaliser un profit bien fait. Aujourd'hui, le marché musical exige qu'on ne doit pas trop tarder à produire des albums. Par rapport à cela, il est de notre devoir de nous débrouiller. La productivité en termes de musique passe trop vite. Il y a trop de choses qui se passent. D'ailleurs, nous en tant que professionnels, nous nous considérons comme des concurrents, des artistes étrangers. Car si nous ne faisons pas parler de nous, notre public va, certainement, écouter autre chose, que ce soit les Algériens ou des gens venus d'ailleurs. On essaye donc d'être le plus efficaces possible par rapport à cela, de réduire le laps de temps qui sépare un album d'un autre.
Pourrait-on parler d'une tournée nationale ?
C'est très difficile de parler de tournée en Algérie, parce que tout simplement nous n'avons pas l'engrenage qu'il faut pour pouvoir ficeler un programme. C'est trop difficile. C'est une discussion qui prendra beaucoup de temps, si on rentre dans les détails. Nous sommes en train de ficeler une tournée nationale par rapport à ce deuxième album.
Cela est en train de se faire, car il faut mélanger concert étatique et concert privé pour pouvoir ficeler une tournée sur une moyenne durée d'une année. On est en train de travailler sur cela. Cela étant, nous comptons nous produire le 8 avril prochain à Béjaïa, le premier Live animé hors Alger après la sortie de notre album. D'autres spectacles seront également, programmés durant les soirées ramadanesques. Nous sommes prévoyons aussi un autre programme pour une tournée internationale.


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