Les équipements de pointe dont disposent les hôpitaux algériens dans le cadre de la prise en charge du cancer font l'objet d'une mauvaise exploitation, a mis en garde vendredi à Tizi Ouzou le professeur Mustapha Boubrit, à l'occasion des premières Journées internationales de cancérologie organisées vendredi par l'hôpital Chahid Mahmoudi. Lors de cette rencontre consacrée aux cancers du sein et du col de l'utérus, le chef du service d'imagerie médicale du Centre hospitalo-universitaire de Beni Messous (Alger) a précisé : «Les structures de santé au niveau national disposent d'un équipement médical très développé, mais qui est mal exploité, faute de maîtrise de la technique.» «Nous avons des moyens très développés qui ne sont pas utilisés correctement par manque de technicité», a-t-il ajouté. «Les appareils radiologiques, à l'instar de l'IRM, la mammographie ou l'échographie ne sont pas exploités dans toutes leurs capacités, ce qui se répercute sur la durée et la qualité du diagnostic établi, et, par conséquent, sur la qualité de la prise en charge du patient et le coût des soins», a encore relevé le spécialiste. Citant l'exemple du cancer du sein, le Pr Boubrit a expliqué que «des erreurs de diagnostic continuaient à être faites malgré l'existence de toutes les techniques d'exploration à travers les CHU et les établissements spécialisés dans le cancer». «Il faut que l'examen réponde à tous les critères de qualité et mettre à profit toutes les techniques qu'offrent les appareils de diagnostic. (...) On ne peut pas faire une écographie sans utiliser la focale, en dressant la sonde d'une manière inadéquate, ou encore sans analyser le contour de la lésion, car cela induit automatiquement des erreurs et nous empêchera de diagnostiquer la maladie en temps opportun», a-t-il assuré. Dans le même contexte, le spécialiste a relevé que le bon choix des examens à effectuer dans le cadre du déroulement d'un diagnostic contribue également à l'amélioration de l'efficacité de l'intervention, tout en réduisant les coûts de la prise en charge. Dans le cas de l'écoulement mamelonnaire, a-t-il souligné, le rôle de l'échographie et de la tomosynthèse est déterminants dans l'identification de la cause de l'anomalie, contrairement à la mammographie qui a une sensibilité faible dans ce genre de cas et passe à côté des trois quarts des lésions. «L'imagerie à résonance magnétique (IRM) n'est également pas adéquate dans les écoulements qui sont causés dans 50% des cas par des papillomes (une infection bénigne du sein) et dans 2 à 15% par un cancer», a-t-il soutenu, poursuivant : «En somme, une stratégie diagnostique radiologique s'avère très importante dans la détection d'une maladie cancéreuse chez la femme et l'établissement d'un diagnostic juste et rapide.» Toujours concernant le dépistage de la néoplasie du sein et du col de l'utérus, le Dr Belahrèche, du service oncologie du Centre Pierre et Marie Curie (CPMC), a abordé la campagne nationale de dépistage dans les zones rurales, initiée par l'association El Amel, en collaboration avec le ministère de la Santé, le CPMC et l'hôpital de Bab El Oued. Depuis son lancement, cette opération a touché 6000 femmes, dont 60 ont subi des examens complémentaires au niveau du CPMC ou du CHU de Bab El Oued, a-t-elle déclaré. A l'issue de la dernière sortie du mammo-mobile de l'association El Amel dans la wilaya de Laghouat, 375 femmes ont été examinées et 5 cas de carcinomes mammaires (tumeurs malignes) ont été découverts et pris en charge par les équipes médicales. Sur ce point, des spécialistes qui sont intervenus lors des débats ont mis l'accent sur la nécessité de développer le dépistage de masse, dans la perspective de diminuer le diagnostic tardif des cancers féminins au profit d'un diagnostic précoce qui facilitera la prise en charge et augmentera les chances de guérison.