Avocat de l'ancien général à la retraite Hocine Benhadid, Me Bachir Mechri s'est offusqué concernant le maintien du contrôle judiciaire contre son mandant depuis sa libération de prison il y a plus de dix mois. Dans une déclaration à El Watan, l'avocat est revenu sur le cas de cet ancien officier supérieur qui avait passé 11 mois en prison pour ses déclarations sur la situation politico-militaire à une web-radio, où il s'en était pris aussi bien au Président et à son frère conseiller qu'au chef d'état-major de l'ANP, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, qu'au président du FCE, Ali Haddad. «Le général à la retraite a été poursuivi pour un crime, avant que son affaire ne soit requalifiée en délit et transférée devant le tribunal. Le dossier est donc sorti du bureau du juge d'instruction. Il était au niveau du parquet qui devait le programmer pour un jugement. Comment peut-on continuer à l'obliger de signer devant le juge d'instruction alors que ce dernier n'est plus en charge du dossier ? C'est une grave violation de la procédure et personne ne veut rétablir le droit. J'ai moi-même été voir au niveau du greffe pour savoir où en était le dossier, et on m'a appris qu'il n'est toujours pas à leur niveau. Ce qui est inadmissible…». Benhadid avait été arrêté au début du mois de septembre 2015 par une escouade de gendarmes qui lui avait dressé un barrage au milieu de l'autoroute Ben Aknoun-Alger. Après avoir été embarqué de force à bord d'un des véhicules, il a passé plusieurs heures d'audition dans les locaux de la gendarmerie, puis déféré devant le tribunal, qui l'a placé sous mandat de dépôt pour entre autres chefs d'inculpation : «divulgation de secret militaire», «atteinte au moral des troupes». Emprisonné à la prison d'El Harrach, à Alger, il y restera en dépit de la détérioration de son état de santé et malgré les nombreuses demandes de mise en liberté provisoire. Ce n'est que le 11 juillet 2016 que cet ancien haut gradé a été placé en liberté provisoire pour des raisons de santé. La décision avait été prise trois jours seulement après l'appel lancé pour sa libération par un collectif d'avocats qui dénonçait l'absence dans le dossier d'une plainte préalable. L'ex-commandant de la 3e Région militaire, commandant de la 8e division blindée, une unité des forces spéciales réputée pour son engagement dans la lutte antiterroriste, Hocine Benhadid devra par la suite attendre des mois pour retrouver son droit à voyager. L'interdiction de quitter le territoire national a été levée, mais sa liberté n'est pas totalement acquise, puisqu'il est soumis à la procédure du contrôle judiciaire, étant obligé de signer devant le juge une fois par mois. Pourtant, son affaire n'est plus du ressort du magistrat instructeur à partir du moment qu'elle a été renvoyée devant le tribunal pour y être jugée. Me Mechri qualifie cette situation de «flagrante violation des libertés individuelles consacrées par la Constitution et garanties par le code de procédure pénale». Il demande aux autorités judiciaires de lever ces restrictions liberticides et de programmer au plus vite le procès du général à la retraite. «Si la justice reproche à mon mandant des faits, qu'elle le défère devant le tribunal. Il est inconcevable de laisser un justiciable éternellement sous le coup d'une affaire pendante en justice. Ou Benhadid est coupable, et dans ce cas il faut le juger, ou il ne l'est pas et alors il faut qu'il retrouve rapidement sa liberté», lance Me Mechri d'une voix coléreuse, précisant : «Nous craignons que Benhadid reste éternellement l'otage de ce dossier. Ceux qui en sont à l'origine doivent faire en sorte d'en finir.» Les craintes de l'avocat sont légitimes, d'autant que les plus initiés écartent tout procès de cet officier supérieur à la retraite. «Il est évident que personne ne veut prendre la responsabilité de laisser un prévenu aussi bavard profiter d'une tribune comme la barre d'un tribunal pour redire et déverser ce qu'il a eu à dire sur les ondes de la radio web et sur une chaîne de télévision. Et ce n'est certainement pas la loi sur l'obligation de réserve promulguée l'année passée pour interdire aux militaires en fonction et ceux à la retraite toute déclaration sur l'armée qui va l'en empêcher. Il est très probable que l'affaire soit mise sous le coude jusqu'à ce qu'elle tombe sous le coup de la prescription», révèlent nos interlocuteurs.