Ressortissants, économie, finances, coopération militaire... Les répercussions diplomatiques entre l'Arabie Saoudite, l'Egypte, Bahreïn, les Emirats arabes unis avec le Qatar sont énormes. Même s'il dispose de ressources financières importantes, le petit émirat doit trouver rapidement une issue à la crise Le Qatar peut-il survivre économiquement ? Oui, à condition que la crise ne dure pas. Le Qatar, avec un des revenus annuels par tête d'habitant les plus élevés au monde, de plus de 100 000 dollars, est un pays riche. Il dispose d'environ 350 milliards de dollars investis à l'étranger, mais les banques du Qatar, déjà en difficulté avec la baisse des réserves de trésorerie et des taux d'intérêt de plus en plus élevés, pourraient être durement touchées, si l'Arabie Saoudite et les Emirats choisissent de retirer leurs dépôts. Quelles sont les conséquences pour ses activités ? Le Qatar importe jusqu'à 90% de ses besoins alimentaires. Or sa seule frontière terrestre, désormais fermée, avec l'Arabie Saoudite, l'isole de tout acheminement de marchandises – notamment 40% de l'approvisionnement alimentaire et des matières premières nécessaires pour ses projets d'infrastructure de quelque 200 milliards de dollars liés au Mondial 2022 de football – par la route. Selon les autorités, le pays aurait suffisamment de denrées alimentaires pour un an, la dépendance du fret aérien et maritime fera augmenter les coûts et l'inflation. Bien que les approvisionnements alimentaires du Qatar transitent d'habitude par la frontière avec l'Arabie Saoudite, désormais fermée, les denrées alimentaires peuvent aussi être acheminées directement au port de Doha ou par avion. Les exportations de gaz et de pétrole ne devraient, quant à elles, pas être affectées : elles transiteront par le détroit d'Hormuz en route pour le Japon et l'Asie du Sud-Est. Quel impact pour ses échanges avec l'extérieur ? Les échanges commerciaux du Qatar avec ses voisins du Golfe seront limités, mais ses exportations vers l'Arabie Saoudite, estimées à 896 millions de dollars par l'ONU, seront réduites à zéro. L'isolement du Qatar affecte surtout Qatar Airways, déjà touchée par l'interdiction à bord des ordinateurs portables décidée par l'administration Trump, qui doit changer ses routes, causant des surcoûts d'exploitation. Que vont devenir ses ressortissants ? Le Qatar est un petit émirat de 2,4 millions d'habitants, dont 10% seulement sont des autochtones. Il compte notamment quelque 1,8 million d'Asiatiques, originaires d'Inde, du Népal et du Bangladesh. Le président de la Commission nationale des droits de l'homme du Qatar a expliqué que des familles se retrouvaient actuellement séparées de force et des élèves et étudiants ont été contraints de rentrer chez eux sans pouvoir passer leurs examens. «Nous sommes passés de la rupture des relations diplomatiques à un blocage d'ensemble de conventions internationales et de conventions sur les droits de l'homme», a-t-il souligné. En vertu des décisions annoncées lundi par Riyad et ses alliés, il a été demandé aux ressortissants du Qatar, visiteurs ou résidents permanents de partir dans un délai de 14 jours. Cette mesure contredit un accord sur la libre circulation au sein du Conseil de coopération du Golfe. Que demandent les adversaires du Qatar ? Abu Dhabi et Riyad veulent un «changement de politique» et non pas «un changement de régime» pour «arrêter de soutenir l'extrémisme et le terrorisme». Ce que les adversaires du Qatar veulent, c'est, entre autres, la fermeture d'Al Jazeera, une «action» des autorités face à «de nombreux individus sanctionnés par les Etats-Unis et l'ONU et qui circulent librement aujourd'hui», ou encore l'arrêt de son soutien au Hamas. Le chef d'une importante organisation humanitaire a d'ailleurs prévenu que les mesures diplomatiques contre le Qatar risquaient d'affecter la reconstruction dans la bande de Ghaza, car l'émirat est l'un des principaux pays donateurs au territoire. Que va devenir la base américaine du Qatar ? Le Pentagone s'est empressé de dire que les opérations militaires américaines au Qatar ne seraient «pas affectées». Pièce maîtresse du dispositif américain au Moyen-Orient, l'immense base d'Al Udeid, au sud-ouest de la capitale Doha, est invisible pour ceux qui vivent au Qatar. L'armée de l'air américaine peut ainsi y stationner des bombardiers B-52 utilisés pour des frappes aériennes contre l'EI en Syrie et en Irak. Elle abrite le centre de commandement des opérations aériennes américaines au Moyen-Orient : c'est une plateforme clé pour les avions ravitailleurs KC-135, les bombardiers lourds et les avions de transport, de reconnaissance et de surveillance opérant dans la région.