Participation de plus de quarante pays, six ambassadeurs, cent vingt personnalités marquantes de la tidjania, le colloque en annonce d'autres en dépit des imperfections. S'agissant d'un premier pas qui confirme Aïn Madhi comme centre de la plus puissante confrérie au monde, la seule à puiser ses racines du continent africain même. En dépit des contraintes qui ont présidé à la préparation de ce colloque qui se devait de se tenir dans les délais qui lui était impartis ; inutile de traiter des imperfections, des flottements au niveau de l'organisation, pour dire qu'un colloque sur une confrérie du poids de la tidjania est une charge très lourde pour être confiée aux seuls fonctionnaires des affaires religieuses, dont acte. Une première, selon la plupart des participants, marquée par le sceau du Khalifa général qui, bien avant son intronisation, était gagné par l'idée d'enclencher le retour aux sources, redonner à Aïn Madhi, berceau de la confrérie, la place qui lui sied en tant que centre de rayonnement spirituel, « Mecque » pour les quelque quatre millions d'adeptes que compte la Tidjania à travers le monde. Rien d'étonnant. S'agissant de l'élève de cheikh Ahmed Lanaya, l'un des derniers savants que le vieux Ksar ait jamais enfanté, connu en Afrique et en Orient comme le compagnon de cheikh Ben Omar, lors de leur périple africain de 1947 à 1951. Faut-il rappeler que du temps du fondateur Cheikh Ahmed Al Tidjani Abu Al Abbas, ils se comptaient par dizaines entre grammairiens, astrologues, chimistes, ouléma et mathématiciens. Et au regard de l'état des lieux, redynamiser les halkas, aussi modeste soit-il comme premier pas, le mérite réside dans la volonté de l'initier. En plus de la présence des ambassadeurs de Tunisie, du Burkina Faso, du Mali, du Tchad, du Soudan et de Mauritanie, on enregistrait celle de personnalités politiques du continent africain venues à titre personnel en qualité d'adeptes, le colloque a été rehaussé par la participation d'une pléthore de savants et érudits des quatre coins du monde, particulièrement d'Afrique et du monde arabe, entre autres Ahmed El Hafedh (Egypte), Abdelkader Kettani (Syrie), Mahmoud Sob (Espagne ), Mansour Sal, imam Hassen Sissé (Sénégal), Bachir Messaoud (Soudan), M. Salah (Tchad) ainsi que d'autres d'Iran, de Malaisie et de Libye. Si l'absence de cheikh Adam (Nigeria) s'est fait ressentir eu égard à son poids dans la tariqa, la défection des Marocains, invités, n'a pas besoin d'être commentée au regard de l'irritation que cela représente pour le royaume du Maroc. ALGERIANITE DE LA TARIQA Le déplacement du monarque au Sénégal dont on devine l'intention, reprendre à son compte l'idée née à Houston (USA), sous-traiter « le dialogue des religions et des civilisations » en s'appuyant sur un vecteur de choix, la tidjania, se l'approprier au travers d'une rencontre prévue pour le mois de mars au Maroc, n'a pas réussi outre mesure. En effet, particulièrement ciblé, le Sénégal dont près de 70% de la population sont des adeptes de la tidjania, a participé avec une forte délégation où l'ensemble des régions, familles et zaouias étaient représentées. « Aucun doute pour nous adeptes tijanis sur l'algérianité de la tariqa ; elle l'est de par le fait que Aïn Madhi est le lieu de naissance du qotb (pôle), c'est là qu'il reçut les enseignements du soufisme et fonda la seule confrérie endogène », a tenu à préciser Mustapha Sissé, conseiller du président du Sénégal. Suite à l'ouverture solennelle des travaux du colloque par le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, et la lecture du message du président de la République, la parole fut donnée à M. Chakroun (Tunisie) qui, au nom de l'ensemble des hôtes de l'Algérie, a dû improviser, emprunter une partie de la conférence qu'il devait donner, pour dire que « le soufisme est la réponse aux problèmes posés par la mondialisation, il faut que l'on se débarrasse de l'archaïsme négatif qui nous freine et emprunter à l'Occident les éléments positifs de progrès, c'est en sorte l'un des objectifs que beaucoup d'entre les participants assignent aux rencontres de ce type ». « Le problème de la mondialisation c'est l'absence de l'humain, le développement matériel est vide de sens tant il s'accompagne d'un vide moral, spirituel où l'on fait peu de cas de l'humain. Le mysticisme constitue sans exagération aucune une solution à ces problèmes. De ce point de vue, la tidjania constitue une force colossale. L'Algérie, berceau et centre de cette confrérie, dispose d'un atout majeur, soubassement d'une unité réelle du monde musulman face aux défis de la mondialisation », souligne S. Lamine Niasse du Sénégal. Au terme de la première journée et l'entame des travaux d'ateliers, et dans le but de préparer des recommandations qui seront rendues publiques aujourd'hui, le ministre des Affaires religieuses a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a particulièrement insisté sur la nécessité pour l'Algérie de redynamiser le rôle des zaouias. « Il s'agit pour nous de nous réapproprier nos propres valeurs, notre culture, loin des clichés folkloriques, marquer notre différence pour un meilleur dialogue avec l'autre. L'Islam est la tolérance, la paix, même si on lui colle le terrorisme comme une nature, et les zaouias gardiennes de nos valeurs sont la parfaite illustration de ces faits ». A la question de savoir dans quelle mesure la tidjania peut-elle être mise à contribution pour le règlement des problèmes que connaissent certains pays africains (Soudan), le ministre a tenu à souligner que la zaouia est prête à apporter son concours, « c'est l'Occident qui le refuse », souligne-t-il. La deuxième journée a été marquée par le pèlerinage de Aïn Madhi, visite au cours de laquelle les hôtes de la zaouia se sont rendus au palais de Kourdane, Aïn Sidi M'hamed, le vieux ksar où se trouvent la mosquée de Mohamed El Habib, la maison de Si Belgacem, lieu de naissance du cheikh fondateur, pour être reçus par le Khalifa général avant la prière du dohr.