«Si deuxième session il y a, je veux que mon fils en fasse partie. Je ne vois pas pourquoi on privilégierait les retardataires. Au dernier jour de l'examen, mon fils était complètement exténué. Tel un alcoolique, il se déplaçait en s'appuyant sur les murs. Pourquoi lui n'aurait-il pas une seconde chance ?» Mohamed, 52 ans, est un papa en colère. Ce dernier estime que cette deuxième session n'arrange qu'une certaine catégorie de candidats. Son fils, Redouane, partage son avis. «Je n'ai pas assuré mon examen. En apprenant cette décision, je me dis que j'aurais dû arriver en retard.» Aujourd'hui, rien n'est encore tranché. C'est le conseil ministériel restreint qui devrait trancher quant à la date de déroulement de l'examen. Le nombre exact des candidats concernés n'est toujours pas annoncé d'une manière officielle. La ministre de l'Education nationale, apprend-on, annoncera certains détails la semaine prochaine lors d'une conférence de presse qu'elle organisera. Qui est concerné ? Seulement les retardataires ? Sur quels critères l'Onec se basera-t-il pour convoquer à nouveau les candidats à cette session spéciale ? Comment pourra-t-on faire la différence entre les retardataires et ceux ayant carrément abandonné les épreuves au milieu de la semaine.
Absents «Cette session concernera les retardataires ainsi que les absents», assure Kamel Nouari, directeur d'un collège. Une information confirmée par Meziane Meriane du Snapest qui souligne : «Il faut savoir que cette décision n'avantage pas uniquement les retardataires mais également les absents étant donné qu'il est impossible de déterminer qui est absent et qui est retardataire.» Selon lui, cette décision est dramatique étant donné que désormais, même un candidat absent va réclamer et personne ne pourra le contredire puisqu'il n'y a aucun moyen de vérifier. Suite à cette décision présidentielle, les cartes ont été redistribuées, mais pas de façon égale. Ainsi, la majorité demande à ce que le bac soit repassé par tout le monde, ou alors par les retardataires et les recalés. «On doit refaire le bac pour les retardataires et pour être plus juste, qu'on le refasse pour les retardataires et pour ceux qui auront échoué, sauf pour les tricheurs qui doivent être sanctionnés», soutient Bachir Hakem. En attendant les détails, la polémique enfle. «Où est l'égalité des chances promise pour le bac ?» interroge Yasmine, une candidate qui a passé son bac. Cette dernière poursuit : «Nous avons passé le bac en pleine canicule. Le refaire pour une certaine catégorie est injuste. Ils auront plus de temps pour réviser.»
Ponctualité Mounir la rejoint et soutient : «Je ne comprends pas pourquoi on avantage les retardataires. Le bac est l'examen décisif dans la vie de tout candidat. S'il n'a pas conscience de cela, il n'a qu'à le repasser. En étant exclu, il aurait eu une année pour revoir ses priorités et arriver à l'heure le jour J.» La maman de Yasmine a une autre crainte par rapport à cette nouvelle session : «Ils vont repasser les épreuves à un grand nombre. Ces derniers auront plus de temps pour réviser et auront sûrement de meilleurs résultats. Logiquement, ils auront les meilleures orientations pour l'université, ce qui est injuste.» Pour Meziane Meriane, du Snapest, la deuxième session est une atteinte à la discipline et la rigueur. On aurait aimé que le gouvernement laisse l'Education donner des leçons de rigueur à la société concernant l'application des lois de la République. «C'est un bac basé sur l'inégalité des chances, car passer le bac en plein Ramadhan et le passer en septembre ou en dehors de Ramadhan n'est pas favorable à l'une comme à l'autre sessions. Les sujets n'auront pas forcément d'égales difficultés. Le temps de préparation pour l'une des catégories sera plus long. Les résultats obtenus ne seront pas équivalents», affirme-t-il. Un avis largement partagé par Nabil Ferguinis du Snapap, qui estime que la deuxième session est une «aberration pédagogique. Du pur populisme». Selon le syndicaliste, il s'agit d'une grave dérive et d'une décision politique qui rentre dans la stratégie du pouvoir et qui va juste mettre la première responsable du secteur dans une position de faiblesse. «Le débat politique a omis le programme du gouvernement et vire vers une organisation qui n'a aucun argument psycho-pédagogique. Au lieu de penser à la rigueur pédagogique dont notre école a tant besoin en ces moments, le pouvoir politique impose une autre forme de ‘‘seuil''», poursuit-il. L'activiste Kamel Nouari est aussi contre cette deuxième session.
Victimes «Le principe de l'égalité des chances n'est pas respecté. Comment peuvent-ils expliquer le fait d'interdire l'accès à l'établissement si un candidat est en retard, mais qu'on lui redonne la chance de repasser tout le bac, si ce n'est encourager la médiocrité», soutient-il. Il affirme aussi que même dans le cas d'organiser une autre session, il y a des règles à respecter : «Une autre session, ça se prépare avec l'accord de tous les partenaires sociaux, les parents d'élèves. Il faut aussi déterminer qui est concerné ou pas en précisant la date exacte.» Ce dernier confie qu'il serait pour une deuxième session uniquement si elle est organisée pour les retardataires mais aussi pour les recalés. n