Ils sont plus d'un millier à être concernés par la session spéciale du baccalauréat décidée par le président de la République. Le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, a annoncé l'organisation, sur instruction du président de la République, d'une session spéciale du baccalauréat pour les élèves ayant été exclus de la dernière session pour cause de retard. Signalant qu'ils sont «plus d'un millier» à être concernés par cette mesure, M. Tebboune a indiqué que «le président de la République a entendu les doléances des parents d'élèves et a ordonné au gouvernement de préparer une session spéciale pour ces retardataires». L'oukase présidentiel taille des croupières à la ministre de l'Education nationale, Nouria Benghabrit, qui a affirmé, le jour même de l'annonce, que les exclus du baccalauréat n'ont aucun justificatif à présenter car le protocole établi devait être rigoureusement appliqué. Des syndicalistes du secteur ont dénoncé une décision «populiste» et «illégale» qui décrédibilise l'examen du baccalauréat et encourage l'incompétence et la médiocrité. Le Satef, par la voix de son secrétaire général, Boualem Amoura, déclare ne pas cautionner une décision «prise d'en haut» et qui «souille la crédibilité» du baccalauréat. «Où est l'équité et la justice lorsqu'on accorde des privilèges à des paresseux et qu'on lèse les élèves disciplinés et sérieux», s'interroge le syndicaliste. Se déclarant contre la décision de cette session spéciale, le porte-parole du CLA parle d'une «honte nationale». «L'année passée à Tizi Ouzou, un cortège gouvernemental a provoqué un bouchon, ce qui a empêché une trentaine d'élèves de passer leur examen, mais personne n'a levé à ce moment-là le petit doigt. Je pense qu'il y a 2 à 3 fils de hauts gradés ce qui a justifié la prise d'une telle décision. La mesure n'a pas été prise au sein du secteur de l'éducation, mais elle est intervenue sur injonction extérieure. La politique prime toujours de la pédagogie», regrette Idir Achour, annonçant la tenue d'une réunion du conseil national du CLA pour décider de la position du syndicat par rapport à la prochaine session. Porte ouverte aux dérives Le président du Snapest, Meziane Meriane, parle d'une mesure «catastrophique» qui bafouent les lois de la République : «Jusqu'à quand continuerons-nous à obéir aux caprices des uns et des autres en bafouant toutes les lois de la République ? Jusqu'à quand permettre cette ingérence dans le domaine de la pédagogie ? La ministre du secteur a annoncé le matin à Blida que les exclus n'ont aucune justification à présenter, et le soir même elle est désavouée. Cherche-t-on à la pousser à la démission ? C'est fort probable.» Pour le syndicaliste, il ne faut pas s'étonner que des élèves réclameront une telle mesure lors des prochaines sessions. «L'année 2018 verra des lycéens provoquer des retards pour être exclus et ainsi pouvoir exiger une session spéciale. On est sortis de la «ataba» (seuil des cours à réviser) pour retomber dans la session imposée de force. Ce sont des mesures injustes envers des élèves studieux, arrivés à l'heure mais qui peuvent rater l'examen. Pourquoi dans ce cas-là ne pas accorder cette seconde chance aux recalés à l'examen ?» suggère-t-il. Le porte-parole du Snapap, Nabil Ferguenis, s'indigne contre une décision «irréfléchie» prise «à l'insu de la ministre de l'Education» qui «doit démissionner», car des obstacles l'empêchent de concrétiser ses programmes. Favorable à la tenue de la session, Messaoud Boudiba, porte-parole du Cnapest, considère que celle-ci doit être accompagnée d'autres mesures. «C'est une décision juste et sage qui vient prendre en charge une situation de crise provoquée par des instructions sur l'exclusion des retardataires prises en 2015 et dénoncées par nous. Les chefs de centre auraient pu juger d'eux-mêmes les situations qui se présentent à eux», explique Boudiba. Abdelkrim Boudjenah, président du SNTE, défend la mesure et appelle dans un communiqué à organiser la session «juste après l'Aïd pour éviter les grandes chaleurs». Il réclame aussi le report de la rentrée scolaire jusqu'à la deuxième semaine de septembre et la révision des textes régissant les centres d'examen.