Le niveau de remplissage de cette infrastructure hydraulique a atteint un taux de moins de 40%. En dépit des assurances des services concernés sur la qualité de l'eau du barrage de Taksebt, qui est de couleur jaunâtre et qui dégage une odeur bizarre, ces derniers jours, les citoyens ne cachent pas leurs appréhensions et inquiétudes dans la wilaya de Tizi Ouzou. «Depuis plus de dix jours, personne ne boit plus de cette eau à la maison. On achète de l'eau minérale. On craint les maladies. D'ailleurs, même avec les assurances des responsables, via les médias, rien n'a changé», nous confie un père de famille dans la ville de Tizi Ouzou où de nombreuses personnes s'inquiètent de la qualité de ce liquide précieux au point où on constate une véritable pression sur l'eau minérale qui tend à se faire rare en cette période estivale. La situation est de plus en plus difficile pour les habitants qui s'interrogent sur les conséquences de cette baisse importante du taux de remplissage du barrage en raison des faibles précipitations enregistrées cette année. En février déjà, avec les chutes de neige, le niveau des eaux de cette infrastructure hydraulique n'est remonté qu'à 45% de sa capacité totale pour alimenter Tizi Ouzou, pour laquelle est réservé 38% de la ressource, soit 150 000 m³ par jour. Une partie de la wilaya de Boumerdès bénéficie d'un volume quotidien de 81 000 m³. Cela après la suspension de l'alimentation de la wilaya d'Alger à partir du barrage de Taksebt avec une quantité de 200 000 m3 par jour. Même avec cette décision, ce barrage continue d'enregistrer une importante baisse de remplissage. Pour rappel, près de 40% des réserves hydriques étaient destinés à alimenter la capitale. «Le barrage n'a jamais connu une baisse de niveau de remplissage comparable à celle de cette année, et ce, malgré la décision de suspendre le transfert des eaux vers Alger. Cela suscite vraiment des interrogations. Où sont partis les 40% qui étaient destinés à la capitale ?» s'interroge un citoyen rencontré hier lors de notre déplacement à cet ouvrage. Là, on constate de visu que le niveau de remplissage est à un niveau jamais atteint depuis la mise en service de cette infrastructure hydraulique. Même des maisons anciennes sans toiture, ensevelies au fond de cet ouvrage, font leur apparition tout comme des arbres et l'érosion continue de la terre de la retenue du barrage. «L'envasement se traduit toujours par une perte de la capacité de stockage des barrages», essaye d'expliquer notre interlocuteur. Pour plus d'information sur cette histoire de couleur jaunâtre et d'odeur étrange de l'eau qui coule des robinets et qui alimente la Toile ces derniers jours, nous nous sommes rendus au centre de traitement de Tabarkoukt, situé à 6 kilomètres de Tizi Ouzou et géré par la Seaal. Mais en vain. «Je ne suis pas habilité à parler à la presse. Si les journalistes veulent avoir des informations, ils n'ont qu'à s'adresser à notre direction à Alger», nous a fait savoir le directeur de ce centre, via un agent de sécurité qui lui avait annoncé notre venue par téléphone. Par contre, au niveau de l'APW, le président de la commission hydraulique, Ramdane Ladaouri, s'est montré disposé à nous expliquer que «depuis dix ans, on n'a jamais eu un déficit hydrique comme cet été. La turpitude de l'eau est causée par la vase. Nous avons tenu des réunions avec les services de l'hydraulique et ceux de l'ADE qui nous ont signifié que l'eau n'est pas impropre, elle est potable. Mais, au niveau de l'APW, nous suivons toujours l'évolution des choses avec beaucoup d'attention. Nous avons mis en place une commission de veille pour suivre la situation avec beaucoup de vigilance, surtout en cette période de chaleur. Le directeur de la santé et celui du CHU Nedir Mohamed nous ont confirmé qu'il n'y avait aucun cas de typhoïde enregistré dans la wilaya de Tizi Ouzou. Nous demeurons aussi vigilants car il y a des tentatives de manipulation et de désinformation», a souligné M. Ladaouri. De son côté, le directeur de l'Algérienne des eaux (ADE), Amar Berzouk, avait assuré, le lendemain de l'alerte lancée via les réseaux sociaux, que «l'odeur est provoquée par la baisse du niveau du barrage mais l'eau reste toujours potable car le contrôle se fait quotidiennement. Le traitement est assuré de manière constante au niveau de la station du barrage qui est dotée d'un système de dernière génération et vérifiable. Le consommateur a, peut-être, senti un arrière-goût de terre en raison de la baisse du niveau de remplissage de cette infrastructure hydraulique. Donc, il n'y a aucun danger», avait-il déclaré. Par ailleurs, il est utile de souligner que le problème de pénurie d'eau est toujours d'actualité, au point de provoquer une grande tension dans plusieurs localités de la wilaya de Tizi Ouzou. Les citoyens ne cessent de monter au créneau pour réclamer de l'eau potable, notamment en cette période de grandes chaleurs. Il y a dix jours, les citoyens de Bouzeguène, à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Tizi Ouzou, structurés en coordination communale, avaient menacé d'organiser une marche au chef-lieu de wilaya pour dénoncer l'absence de ce liquide précieux dans leurs robinets. Il a fallu le déplacement du wali, accompagné du représentant du ministre des Ressources en eau, Saïd Abbas, ancien directeur de l'hydraulique de la wilaya de Tizi Ouzou, pour désamorcer la situation et rassurer les représentants des villages, annonçant un projet d'alimentation de leur commune en eau potable à partir du barrage de Tichy Haf, dans la wilaya de Béjaïa. Dans l'immédiat et afin d'étancher la soif des habitants, l'ADE compte mobiliser plus de camions-citernes pour effectuer des rotations quotidiennes dans les villages. Plusieurs autres communes, comme Tigzirt et Azeffoun, connaissent le même problème. Les populations de ces localités continuent de souffrir le martyre en raison de l'absence de cette ressource vitale. Face à cette situation, les citoyens n'ont pas d'autre choix que de s'approvisionner via les citernes, dont le prix connaît une nette augmentation durant la période d'été. Il est utile aussi de souligner que d'importantes quantités d'eau s'évaporent dans la nature en raison des fuites dans le réseau d'alimentation. L'eau n'arrive pas dans les foyers régulièrement en raison de la vétusté des réseaux, des piquages illicites, ainsi que de fuites sur les canalisations. Enfin, même quand le barrage de Takseb avait atteint un important niveau de remplissage, l'eau peinait à arriver en quantité suffisante dans les foyers de la wilaya de Tizi Ouzou.