Mohamed Bouamari, figure emblématique du cinéma national, vient de tirer sa révérence en nous quittant brutalement, suite à un arrêt cardiaque. Boum, pour les intimes, était d'une modestie et d'une humilité exemplaires qui transparaissaient dans ses œuvres les plus riches et reflétant, le plus souvent, les mutations socioéconomiques de l'Algérie post-indépendante. Avec sa première œuvre, la plus pure, le charbonnier, Mohamed Bouamari a su, mieux que quiconque, réinventer le « cinéma djedid » en nous plongeant dans le monde de la féodalité avec toutes les séquelles laissées par le colonialisme. Grâce à des images d'une beauté toute imprégnée de lyrisme, cette œuvre magistrale et riche a suscité à l'époque de sa sortie toute une série de critiques élogieuses de la part aussi bien de la presse nationale qu'internationale. Mohamed Bouamari, cet ami de la cinémathèque, a accompli son véritable travail artistique dans le langage cinématographique qu'il a su investir et remodeler à sa manière. Bouamari a toujours puisé les sujets de ses films des réalités sociales vécues par les algériens à un moment donné de l'histoire de notre pays. Sa deuxième production, L'Héritage, traite également des séquelles de la colonisation, à savoir l'aliénation sociale dans un village en ruine. Une œuvre unique dans laquelle nous est montré un instituteur abandonné par les autorités coloniales, après avoir été torturé jusqu'à la folie. Avec Premier pas, Bouamari investit le monde politique à travers l'avènement d'une femme au poste de présidente d'APC et l'écroulement de l'unité du couple qui en découle, dès lors de l'intrusion de la femme dans le paysage politique dans un environnement à l'esprit étroit. Refus a, quant à lui, pour toile de fond l'histoire d'une famille émigrée depuis plus de 30 ans et toutes les conséquences inhérentes à l'émigration. Mohamed Bouamari est — avec le temps — devenu le cinéaste et porte-parole de la condition féminine. Aujourd'hui, il nous a quittés brutalement, furtivement, lui qui a toujours vécu et rêvé de cinéma, à tel point que sa tête était farcie de projets de films toujours en voie de concrétisation. Au revoir Boum, nous ne pourrons te dire adieu puisque tes films sont toujours là, présents dans nos mémoires. La Cinémathèque algérienne