Dans le dernier rapport sur les flux migratoires de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), il est mis en évidence que plus de 7189 migrants et réfugiés sont morts ou sont portés disparus sur les routes migratoires mondiales. Il s'agit du nombre annuel le plus élevé jamais enregistré par l'OIM. Cela représente une moyenne de 20 décès par jour. Des chiffres qui pourraient s'avérer beaucoup plus importants dans la mesure où de nombreux décès «ne sont pas enregistrés par un gouvernement ou une agence d'aide humanitaire», insiste William Lacy Swing, directeur général de l'OIM. Des corps flottants en Méditerranée, y ceux compris des enfants qui portaient des bouées de sauvetage, révèlent périodiquement de nouveaux drames de l'immigration clandestine : d'un rêve, il n'en reste plus que des corps et les débris d'une embarcation dans la mer. Ces tragédies touchent toutes les voies migratoires, avec des augmentations observées en Amérique centrale et à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis et surtout en Méditerranée. Les migrations ont plus que triplé depuis le milieu des années 1970 : 77 millions en 1975, 120 millions en 1999, 150 millions au début des années 2000, près de 300 millions en 2017. En 2016, l'immigration du continent Afrique de 1,2 milliard d'habitants qui abritera 2,5 milliards de personnes, soit un quart de la population mondiale, en 2050, a dépassé les arrivées syriennes, afghanes et irakiennes en Europe. Selon une communication de Frontex (6 janvier 2017), l'agence européenne de gardes-frontières et de garde-côtes, 93% de ceux qui ont débarqué en Italie venaient de ce continent. Aujourd'hui, les Africains du sud du Sahara représentent à peine 10% des migrants de la planète, et la plupart de ces «déplacés» sont juste passés dans un pays voisin. L'OIM indique qu'en 2015, «sur les 32 millions qui ont pris la route, la moitié d'entre eux ont posé leur sac sur leur continent.» Ces migrants africains fuient la misère et la guerre. Ils ne sont plus de passage, mais s'installent définitivement au niveau des pays du Maghreb, dont l'Algérie, régis par des accords internationaux. «Cette situation nouvelle appelle donc des solutions nouvelles, loin d'une vision xénophobe, raciste, comportement étranger à la nature de la population algérienne. Il s'agit d'adapter la législation algérienne. Mais surtout pour l'Algérie de coordonner les actions avec l'Europe, avec les pays riverains, les dirigeants africains concernés, pour le rapatriement, sans dévaloriser la personne humaine et d'établir pour certains des cartes de séjour transitoire pour une émigration choisie, dont a besoin l'Algérie dans l'agriculture, le tourisme, le BTPH pour éviter l'assistance dévalorisante», analyse dans une contribution le Pr Abderrahmane Mebtoul. Les migrants souffrent généralement de plusieurs préjugés : on dit d'eux qu'ils apportent des maladies, des éléments criminels, ils viennent pour profiter des services de santé. D'autre part, la vague d'immigration constitue un business fort lucratif pour certains réseaux de passeurs. Les filières d'immigration clandestine sont passées progressivement aux mains de réseaux criminels. Le trafic d'êtres humains est désormais le troisième secteur d'activité le plus lucratif pour le crime organisé, derrière les trafics d'armes et de drogue. En août dernier, Nouredine Bedoui, ministre de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, avait rappelé que la commission nationale chargée du dossier «avait pris des mesures strictes en vue d'éradiquer les réseaux maffieux qui se livrent au trafic et à l'exploitation des femmes et des enfants sur notre territoire, à des fins criminelles», soulignant que certains de ces malfaiteurs ont été arrêtés l'année dernière. «Nous continuerons dans ce sens avec plus de fermeté», a-t-il martelé. Il a en outre précisé que «ces groupes qui se trouvent au niveau des frontières avec le Niger et le Mali travaillent fort malheureusement avec des Algériens». Des mouvements migratoires ont toujours existé entre les pays sahéliens et le Maghreb en général, mais il s'agissait surtout de Maliens, de Nigériens et de Tchadiens, qui s'y rendaient pour des travaux saisonniers et parfois pour s'y installer. Mais aujourd'hui, le but a changé : il s'agit d'aller plus loin… en Europe. Le système des visas pour accéder aux pays européens, la difficulté pour les obtenir, et la création de l'espace Schengen ont contribué au développement de filières migratoires clandestines, surtout en Algérie et au Maroc. Elles sont désormais, pour les candidats à l'immigration, la seule possibilité de réaliser leur projet.