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«Les réformes structurelles des finances publiques ne sont pas à l'ordre du jour» Mohamed Achir. Economiste et enseignant à l'universitaire de Tizi Ouzou
Quel regard portez-vous globalement sur le PLF 2018. Est-ce finalement une loi d'austérité, comme certains le prévoyaient, ou plutôt dépensière ? Le projet de loi de finances pour 2018 intervient dans un contexte de crise financière et budgétaire marquée notamment par l'épuisement total de l'épargne publique et le recours du gouvernement au financement non conventionnel pour couvrir les besoins du Trésor public, financer la dette publique interne et le Fonds national d'investissement (FNI). Ce projet est censé gérer cette crise et atténuer ses effets à moyen terme. L'Exécutif veut éviter les ajustements douloureux ou une thérapie de choc pour ne pas exposer le pays à des tensions sociopolitiques et des situations incontrôlables. Autrement dit, les réformes structurelles concernant les finances publiques ne sont pas encore à l'ordre du jour. Les transferts sociaux sont budgétisés à hauteur de 1760 milliards de dinars (soit une hausse de 8%) et le niveau des dépenses de fonctionnement est largement supérieur aux prévisions des recettes fiscales ordinaires. A souligner que le plan d'action du gouvernement a fixé une feuille de route de redressement des finances publiques, dans laquelle il a prévu une réforme des subventions de l'Etat en vue d'assurer une répartition équitable et la limitation des dépenses de fonctionnement au maximum, au niveau des recettes de la fiscalité ordinaire. Je pense qu'on s'éloigne de ces objectifs, puisque le PLF 2018 prévoit des dépenses de fonctionnement à hauteur de 4584,46 milliards de dinars et des ressources ordinaires de seulement 3688,68 milliards de dinars. Il est prévu une augmentation sensible du budget d'équipement. Cela encouragera-t-il l'investissement ? La limitation du budget d'équipement a fait ralentir le niveau de la croissance économique. Car l'économie nationale est tirée par les investissements publics, notamment dans les projets d'infrastructures et le soutien à la demande globale. Le PIB hors hydrocarbures a connu une baisse durant le premier trimestre de cette année, suite au ralentissement de l'investissement public. Mais la question qui se pose est la nature des projets d'investissements et d'équipements et leur choix dans la conjoncture financière actuelle. Est-ce que ces projets sont priorisés en fonction des besoins urgents des populations ? Est-ce que ces projets vont générer rapidement des revenus nécessaires pour amortir la crise budgétaire actuelle ? Il est temps de revoir le mode de financement de certains projets d'infrastructures et même les programmes de logement. Les règles de la commercialité et de la rentabilité doivent être réhabilitées dans l'investissement public et dans certains services publics. La dette de l'Etat auprès des entreprises nationales et étrangères qui s'élève à 400 milliards de dinars et qui est inscrite dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018 confirme un déficit managérial et un manque de projection dans la gestion de l'investissement public. Des augmentations sont prévues sur certains produits, notamment les carburants. Dans quel cadre ces augmentations rentrent-elles ? Je pense que l'augmentation de la taxe sur les produits pétroliers (les carburants) est nécessaire et inévitable, car son importation coûte très cher à l'Etat et les subventions des prix du carburant encouragent le gaspillage et la consommation non modérée. Mais globalement, il faut, en parallèle, accélérer le programme structurel de transition énergétique en vue de diversifier les sources alternatives d'énergie durable. L'impôt sur la fortune introduite aura-t-elle un impact sur les recettes de l'Etat ? L'impact de cet impôt ne peut pas être évalué dans la situation actuelle. Il est très difficile d'identifier et de définir les fortunes des Algériens. Notre économie souffre structurellement de manque de traçabilité des transactions, de l'informel et du sous-développement du système des cadastres et des impôts. Il y a lieu de mettre en place un système cohérent pour régler le problème de traçabilité des transactions des différents patrimoines. Le système comptable financier (SCF), les dispositions de l'administration fiscale et le code de commerce doivent être harmonisés et mieux coordonnés.