Le Collectif du 17 Octobre 1961 a exprimé sa déception par rapport au «silence persistant» du président français, Emmanuel Macron, lors de la célébration du 56e anniversaire de ce massacre en France. Le locataire de l'Elysée n'a pas daigné répondre à la lettre du collectif et à l'appel d'une quarantaine d'organisations (associations françaises et franco-algériennes, syndicats et partis politiques) qui lui réclamaient de «confirmer, au nom de la France, la reconnaissance et la condamnation de ce crime d'Etat». Contacté par El Watan, Olivier Le Cour Grandmaison, historien et l'un des porte-parole du collectif, dénonce «la pusillanimité» de M. Macron, qui aurait succédé à son «courage un moment affiché à Alger». En effet, le 15 février 2017, il affirma à nos confrères d'Echorouk News que «la colonisation est un crime contre l'humanité», ce qui a suscité un tollé dans les milieux de la droite et de l'extrême droite françaises. Cette position «courageuse» lui permettra de gagner la sympathie des autorités algériennes et surtout celle d'une bonne partie de l'électorat franco-algérien. Le 5 mai, face à la rédaction de Mediapart, il avait même promis de faire «des actes forts sur cette période de notre histoire». Or, selon Le Cour Grandmaison, il s'agit là d'une «très classique involution qu'Emmanuel Macron partage avec beaucoup de ses prédécesseurs à l'Elysée, à commencer par François Hollande qui avait lui aussi promis de faire des “gestes forts” en faveur de la reconnaissance des massacres du 17 Octobre et qui s'est contenté d'un communiqué laconique et sibyllin». Effectivement, le prédécesseur de Macron a déclaré, le 17 octobre 2012, que «la République reconnaît avec lucidité ces faits». Le choix des mots était ainsi très vigilant, remplaçant le terme «crime» par «faits» et ne reconnaissant pas clairement la responsabilité de l'Etat français. Apparemment, le tout nouveau et jeune président français n'est pas encore prêt à assumer une telle responsabilité historique ! «Nul doute que dans le contexte actuel, marqué par de nombreuses réformes impopulaires, M. Macron est soucieux de ménager une partie de son électorat, nombre de ses ministres venus des Républicains et très certainement hostiles à une telle reconnaissance, de même pour la majorité parlementaire qui le soutient», explique Le Cour Grandmaison. «Nous n'avons eu ni réponse ni même un accusé de réception de notre courrier (lettre du 3 octobre 2017, ndlr), ce qui témoigne d'un mépris certain, alors que nul ne pouvait ignorer que de nombreuses initiatives allaient avoir lieu à Paris, dans la région parisienne et en région», regrette-t-il. Il est vrai que la journée de mardi, 17 octobre, a été marquée par de nombreux rassemblements de commémoration : Paris, La Courneuve, Bobigny, Rennes, Grenoble, Strasbourg, Besançon, Givors, etc. Le sentiment de déception est constatable également chez Henri Pouillot, un autre membre influent du collectif. Ce militant anticolonialiste, grand ami de l'Algérie, estime néanmoins que le silence de Macron n'est pas vraiment surprenant vu son «rapprochement de plus en plus visible de la droite française, particulièrement depuis son élection». M. Pouillot espère que cette désillusion ne découragera pas les militants de «la justice et la vérité» à aller de l'avant. «Nous n'allons pas baisser les bras et nous continuerons à soutenir toutes les actions qui revendiquent la reconnaissance de ce crime d'Etat», a-t-il réaffirmé, soulignant qu'il n'y a eu aucun représentant officiel du gouvernement français qui a réagi à leurs sollicitations ou participé aux célébrations. Cependant, Anne Hidalgo, maire de Paris, et de nombreux parlementaires et élus locaux de gauche étaient présents aux festivités qui ont eu lieu durant toute la journée de mardi sur le pont Saint-Michel, particulièrement à la cérémonie d'hommage à laquelle a participé Abdelkader Mesdoua, nouvel ambassadeur d'Algérie en France.