La question figure désormais comme une des quatre revendications de l'Algérie pour tourner la page de l'histoire avec la France. Il s'agit de la restitution des 36 crânes des résistants algériens tués par l'armée coloniale à la fin du XIXe siècle et conservés actuellement au musée de l'Homme à Paris. C'est l'un des dossiers sur lesquels est attendu le président français, Emmanuel Macron, qui effectue, aujourd'hui à Alger, une visite de travail d'une journée. Parmi ces crânes, il y a ceux appartenant à Mohamed Lamjad Ben Abdelmalek, dit Cherif Boubaghla, à Cheikh Bouziane, à Moussa El Derkaoui et à Si Mokhtar Ben Kouider Al Titraoui. Selon le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, «l'instauration d'une relation forte ou même ordinaire avec la France passe par une réponse positive sur les quatre dossiers relatifs à la mémoire : les archives de la Guerre de Libération, le sort des disparus durant la guerre, l'indemnisation des victimes des essais nucléaires au Sahara et la récupération des crânes des résistants algériens». Cette affaire a été soulevée, rappelons-le, pour la première fois en 2016. C'est l'écrivain et militant algérien résidant en France, Brahim Senouci, qui a lancé une pétition, en mai 2016, dans laquelle il demande à l'Etat français de «faire rapatrier en Algérie les crânes des insurgés des Zaâtcha massacrés en 1849». «Il faut que ces restes soient rapatriés en Algérie pour y recevoir une digne sépulture !» exige-t-il. Le gouvernement a pris le relais par la suite pour introduire une demande officielle pour leur restitution. Dans une interview accordée, il y a quelques mois, à l'agence APS, le ministre des Moudjahidine avait indiqué que les démarches «vont bon train». «La dignité humaine est sacrée et doit être respectée même pour les morts, et rien ne justifie, ni moralement ni idéologiquement, que ces ossements soient laissés dans la situation déplorable actuelle», avait-il déclaré. Une longue procédure Mais, depuis, il n'y a plus rien. Selon le président du muséum qui abrite ces ossements, Bruno David, il y a une longue procédure à suivre. «En tant que dépositaires des collections, nous devons évidemment en prendre soin, mais nous n'avons pas le droit de les céder. Cela peut d'ailleurs poser des problèmes éthiques : nous conservons des crânes de résistants algériens du XIXe siècle que l'Algérie réclame, mais dans la mesure où ils ne nous appartiennent pas, je ne peux pas les restituer sans suivre un processus assez compliqué», explique-t-il lors de son passage, le 7 décembre 2016, devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée française . Le processus, indique-t-il, «obéit à des règles, du point de vue éthique, afin de protéger la propriété intellectuelle et le patrimoine de chaque pays, mais elles compliquent sensiblement la vie du musée». «Il faut garantir la traçabilité des matériels et être prêt à les restituer en fonction des situations. C'est loin d'être simple pour les crânes humains», ajoute Bruno David.